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2019-10-25T07:31:08+02:00

Vaincre à Rome de Sylvain COHER

Publié par Tlivres
Vaincre à Rome de Sylvain COHER

Actes Sud

Lecteurs que vous êtes, je suis sûre que vous avez toujours rêvé de courir un marathon EN LISANT.

Et bien, c’est maintenant possible ! Votre rêve devient réalité grâce à l’initiative de Sylvain
COHER.

Imaginez... sur la ligne de départ : 69 coureurs de 35 nationalités. 11 sont africains et vous en faites partie. Vous êtes éthiopien. 11, c’est aussi le numéro de votre dossard ! Vous faites 55 kilos. Vous êtes chrétien orthodoxe (ça vous semble un détail mais, on ne sait jamais, la foi et le spiritualisme pourraient vous être utiles !). Vous vous apprêtez donc à vous lancer dans une performance de haut niveau. Non seulement vous allez courir 42,195 kilomètres (c’est long !) mais encore, vous allez essayer d’arriver le premier (c’est à dire monter sur la plus haute marche du podium !) et pour couronner le tout (je ne sais pas vraiment comment vous l’annoncer !), vous allez courir pieds nus (oubliez donc les marques de chaussures high-tech, tout ça n’est que futilité quand vous avez un mental de gagnant !). Ah oui, j’oubliais, nous sommes à Rome et en 1960 (elle est bien cette épreuve sportive, vous venez de gagner presque 60 ans rien qu’en ouvrant le livre (vous n’étiez d’ailleurs pas nés pour nombre d’entre vous !). Vous vous appelez Abebe BIKILA. 1, 2, 3, partez !

Ce roman est tout à fait original. J’avais bien lu « Autoportrait de l’auteur en coureur de fond » de Haruki MURAKAMI. Nous étions en 2012... à J-7 de ma course à pied, un marathon justement ! J’avais beaucoup aimé la préparation réalisée par l’auteur, son humilité et sa modestie devant le défi à relever. A l’époque, ça m’avait fait du bien !

Là, rien de tout ça. Vous êtes venu pour gagner, vous allez gagner. Vous êtes coaché par un suédois, il croit en vous, rien ne peut vous arrêter... à condition de respecter quelques règles, notamment de ne pas jouer avec le feu dès le début de la course mais bien d’attendre le bon moment pour vous échapper... sans craindre d’être rattrapé !

Sylvain COHER va égrener les chapitres au rythme des kilomètres parcourus et des temps réalisés. Si vous focalisez le regard sur votre chrono, votre ami le plus cher le temps de la course, vous allez aussi ressentir chaque muscle. Là, il n’est pas utile de réfléchir ! Votre corps va se rappeler à vous. L’écrivain décrit formidablement bien les tensions du sportif de haut niveau. Il évoque les 20 premières minutes comme donnant le ton de l’épreuve. Il parle aussi des 30ème et 40ème kilomètres comme autant de repère dans la vie de votre organisme. Attention, la réserve de glycogène s’épuise, vous risquez de passer dans le rouge !

Ce roman, c’est aussi un itinéraire éminemment touristique. Vous allez avoir la chance de visiter Rome comme personne ne l’a jamais fait avant vous. Vous allez, certes à vive allure, découvrir le Colisée Trastevere, L’Obélisque d’Aksoum, les thermes de Caracalla, la route de Christophe Colomb, la
Place des Nations Unies, la Place du 25 Mars 1957, Le Cielo, La porte Saint-Sébastien, L’arc de Drusus, Le parc des Scipioni, La rue Saint-Grégoire et terminer avec l’Arc de Constantin. Vous allez repérer aussi la végétation : les cyprès, les chênes verts, les pins parasols...

Mais tout cela ne sera rien si vous n’aviez une revanche historique à prendre. Cette course relève du registre guerrier :


C’est la guerre, admet la Petite Voix. C’est la guerre contre la guerre et je reste dans le tracé de ma tranchée pour les trente-cinq kilomètres que je dois encore parcourir. P. 38

Souvenez-vous, 25 ans plus tôt, Mussolini lançait ses troupes pour contrer le fléau noir éthiopien. Abebe BIKILA veut prendre sa revanche, il veut représenter son pays et conquérir Rome. Il veut restaurer l’honneur des siens en passant le premier sous l’Arc Constantin, le symbole des ambitions coloniales du fasciste italien. Avec cette course, Sylvain COHER revient sur une page de la grande Histoire, souvent méconnue. Pour éviter qu’elle ne tombe dans l’oubli collectif, l’auteur en assure la mémoire. Rien que pour ça, bravo !
 


Aller contre la montre est un travail de mémoire puisque la mémoire seule peut nous rendre ce que l’on croyait perdu. P. 95

L’auteur fait d’Abebe BIKILA un héros, l’un de ces sportifs qui va « vaincre » les soldats. Peu importent les armes !


Ce que l’on perd à la guerre on le reprend autrement ; les militaires et les sportifs sont toujours là pour satisfaire ce besoin qu’à l’humanité de se confronter à elle-même. P. 159

Ce roman est prodigieux. Il allie de façon tout à fait audacieuse deux registres très éloignés l’un de l’autre et nous livre un roman à la première personne dans une plume profondément humaine. Quant au rythme, vous allez finir votre lecture essoufflé, mais peut-être rien de plus, en réalité ! Il ne me reste plus qu’à vous souhaiter une bonne récupération !

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