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2018-04-30T09:28:55+02:00

Map of America de Juan DOWNEY

Publié par Tlivres
Map of America de Juan DOWNEY

En visite à la Fondation Louis Vuitton de Paris, j'ai été happée par l'esthétique de cette carte de l'Amérique latine, une représentation toute en couleur qui m'a interpellée. Je la partage avec vous aujourd'hui, c'est ma #lundioeuvred'art.

Juan DOWNEY, artiste chilien du XXème siècle, bouleversé par le coup d'Etat mené en 1973 contre le Président de son pays, Salvador ALLENDE, se lance dans un voyage qui va durer 6 ans à travers l'Amérique du Sud.

Il s'approprie les territoires, en efface les frontières pour les revisiter.

Il laisse libre court à son imagination et, au crayon de couleur, compose un tableau à l'image de son état psychique du moment.

"Map of America" est le fruit d'une introspection de l'artiste engagée dès son départ.

Cette expérimentation artistique est éblouissante. Outre la couleur, elle donne l'idée du mouvement, d'un bouillonnement, d'une agitation peut-être portée par les conditions climatiques perturbées. Elle fait prendre conscience de l'environnement, des océans, du relief sous-marin.

Je trouve le résultat fascinant.

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2018-04-29T17:49:25+02:00

Le cas singulier de Benjamin T. de Catherine ROLLAND

Publié par Tlivres
Le cas singulier de Benjamin T. de Catherine ROLLAND

Pleurer le départ du soleil et se ressourcer avec quelques valeurs sûres : un café noir, une tartelette façon crumble ET le dernier roman de Catherine Rolland - Ecrivain publié aux Editions Les Escales « Le cas singulier de Benjamin T. » une gourmandise à l’envi ❤️ #RL2018 

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2018-04-29T11:07:10+02:00

Celui qui disait non de Adeline BALDACCHINO

Publié par Tlivres
Celui qui disait non de Adeline BALDACCHINO


Comme si la littérature, qui semble faire écran entre les êtres et nous, servait en fait de passerelle. P. 25

Cette phrase est extraite du premier roman d'Adeline BALDACCHINO "Celui qui disait non" publié chez Fayard, un livre découvert avec les 68 Premières fois. Il assure la mémoire d'un acte  de résistance d'un homme et restaure ainsi l'honneur de toute une famille. Il met aussi le doigt sur ce que je préfère en littérature.

Belle lecture !

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2018-04-28T09:20:18+02:00

Kisanga d’Emmanuel GRAND

Publié par Tlivres
Kisanga d’Emmanuel GRAND

Éditions Liana Levi
 

Après un feel good book, « La chambre des merveilles » de Julien SANDREL, un roman familial, « Fugitive parce que reine » de Violaine HUISMAN et deux romans historiques, « Le théâtre de Slávek » de Anne DELAFLOTTE MEHDEVI et « Un océan deux mers trois continents » de Wilfried N’SONDE, le dernier en lice pour le #Prixdulivre France bleu_Page des libraires est un roman d’espionnage, éclectique comme sélection, non ?

 

Kisanga d’Emmanuel GRAND a récemment été couronné par le Prix Landerneau, c’est dans ce cadre que je l’avais repéré alors, quand France bleu et Page des libraires l’ont présenté dans la sélection, j’avoue avoir frissonné de plaisir et ce n’était que le début !


Je vous dis quelques mots de l'histoire :


Olivier et Isabelle sont mariés, ils ont une fille de 4 ans, Sarah. Lui travaille chez Carmin, ils assistent aux funérailles d’un de ses collègues, Michel assassiné en Afrique en mission. Olivier apprend qu’une proposition lui sera faite le lendemain, l’entreprise compte effectivement l’envoyer au Congo avec trois autres salariés choisis sur le volet. Il faut dire que l’enjeu est stratégique, les Français sont en train de signer un accord inespéré avec les Chinois pour l’exploitation des mines de cuivre de Kisanga. Ce partenariat aurait pu être la poule aux œufs d’or mais c’était sans compter sur les réminiscences du passé, une vielle affaire d’Etat jamais résolue et des soupçons pesant toujours sur Carmin. Raphaël Da Costa, journaliste grillé il y a une quinzaine d’années, a une revanche à prendre et souhaite en découdre définitivement avec cette histoire. Il reprend ses valises et s’envole vers l’Afrique quand d’autres flairent la démarche et décident de préserver le secret à tout prix. Un militaire à la retraite, Pierre Lauziere  qui a fait partie du 13ème Régiment de Dragons parachutistes des forces spéciales françaises pendant l’opération Serval au Mali en 2013, est recruté pour assurer les intérêts de l'Etat. Le destin de ces trois hommes va soudainement se trouver lié, à la vie, à la mort ! 


Entre fiction et réalité, mon cœur balance. Il fait dire qu’au moment où je termine ce roman, les médias relatent très largement la mise en examen de Vincent BOLLORÉ, inculpé dans une affaire de concession portuaire en Guinée et au Togo. Il est parfois troublant de voir ô combien les deux peuvent parfois se faire écho...


Bien sûr, comme le dit l’auteur, toute ressemblance est fortuite. Il n’en demeure pas moins que l’Afrique a toujours suscité les convoitises des investisseurs étrangers. Son sous-sol regorge de minerais très prisés notamment pour assouvir les besoins des pays occidentaux en nouvelles technologies.


Le Congo était maudit par les trésors de ses entrailles, un cancer qui prospérait dans son ventre et qui rendait les hommes fous à lier, violeurs, assassins, qui de son voisin, qui de sa sœur, qui de son frère. P. 332

À bien y regarder, Wilfried N’SONDÉ ET Emmanuel GRAND mènent le même combat et dénoncent tous les deux l’ignominie des hommes hantés par les affres du pouvoir, de l’argent, entraînant des malversations, de la corruption et des comportements que rien ne saurait excuser. Entre le XVIIème et le XXIème siècles, rien n’a malheureusement changé, à l’exception peut-être du K qui a laissé sa place au C, mais les terres restent les mêmes et les puissants continuent d’y instrumentaliser les plus faibles.


Le roman d’Emmanuel GRAND est original dans son approche des pays émergents. Il décide de faire la part belle à la Chine qui a jeté son dévolu sur l’Afrique. Toute la scène géopolitique se trouve de fait déstabilisée, menaçant de faire rompre l’édifice d’un savant équilibre entre l’hexagone et les nouvelles puissances mondiales.


Ce thriller est un véritable page-turner, de ceux que vous ouvrez et que vous ne lâchez que lorsque vous l’avez terminé. Le suspense est addictif. Les trois hommes ont, chacun dans leur rôle, trois mois pour arriver à leur fin. Dès lors, le compte à rebours est lancé, tous les coups sont permis, y compris une course effrénée à travers la jungle katangaise, faisant resurgir à l’occasion de vieilles rancunes ethniques.


Je ne lis pas régulièrement ce type de romans, c'est un tort je l'avoue. Chaque fois, je tombe dans le piège de l’intrigue et prends plaisir à spéculer sur son dénouement.


Je remercie infiniment les libraires pour ce très bon choix. La plume est fluide, un brin romancée, très agréable à lire, elle vous met sous tension permanente, du début jusqu’à la fin.

Bravo à Emmanuel GRAND aussi pour cette prouesse littéraire parfaitement maîtrisée.

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2018-04-27T06:52:35+02:00

Fugitive parce que reine de Violaine HUISMAN

Publié par Tlivres
Fugitive parce que reine de Violaine HUISMAN

Ma #Vendredilecture est un roman en lice pour le #Prixdulivre France Bleu PAGE des libraires.

avec

- "La chambre des merveilles" de Julien SANDREL
- "Le théâtre de Slávek" de Anne DELAFLOTTE MEHDEVI
- "Kisanga" de Emmanuel GRAND
- "Un océan, deux mers et trois continents" de Wilfried N'SONDE

Violaine Huisman nous dévoile la vie d’une mère qui tangue entre les tréfonds de la maladie mentale et les vagues euphoriques d’un amour incommensurable.

« Fugitive parce que reine » publié chez Gallimard fait aussi partie de la sélection des 68 premières fois ❤️

 

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2018-04-26T06:45:38+02:00

La chambre des merveilles de Julien SANDREL

Publié par Tlivres
La chambre des merveilles de Julien SANDREL

Ma #citationdujeudi est extraite du premier roman de Julien SANDREL "La chambre des merveilles", un feel good book édité par Calmann Levy qui fait la part belle à la fantaisie d'une mère alors que la vie de son fils n'a jamais été aussi fragile.

Assurément, une très belle leçon de vie !


Ce roman est en lice pour le #Prixdulivre France bleu_Page des libraires.

avec

- "Fugitive parce que reine" de Violaine HUISMAN
- "Le théâtre de Slávek" de Anne DELAFLOTTE MEHDEVI
- "Kisanga" de Emmanuel GRAND
- "Un océan, deux mers et trois continents" de Wilfried N'SONDE


 

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2018-04-26T06:37:33+02:00

Le théâtre de Slávek de Anne DELAFLOTTE MEHDEVI

Publié par Tlivres
Le théâtre de Slávek de Anne DELAFLOTTE MEHDEVI

Anne Delaflotte Mehdevi nous ouvre la porte de la cité pragoise en pleine effervescence artistique du siècle des lumières avec « Le théâtre de Slávek » publié chez Gaia Ce roman historique trépidant est en lice pour le #Prixdulivre France Bleu PAGE des libraires

 

aux côtés de :

- "La chambre des merveilles" de Julien SANDREL

- "Fugitive parce que reine" de Violaine HUISMAN

- "Un océan, deux mers et trois continents" de Wilfried N'SONDE

- "Kisanga" de Emmanuel GRAND.

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2018-04-26T06:35:00+02:00

Un océan deux mers trois continents de Wilfried N'SONDE

Publié par Tlivres
Un océan deux mers trois continents  de Wilfried N'SONDE

Mon #Mardiconseil est cette lecture réalisée dans le cadre du #Prixdulivre France Bleu PAGE des libraires « Un océan deux mers trois continents » de Wilfried N’Sondé publié chez Actes Sud un roman historique qui en dit long sur les fragilités de l’Humanité.

Ce roman est en "compétition" 

avec :

- "La chambre des merveilles" de Julien SANDREL

- "Fugitive parce que reine" de Violaine HUISMAN

- "Le théâtre de Slavek" de Anne DELAFLOTTE MEHDEVI

- "Kisanga" de Emmanuel GRAND.

 

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2018-04-23T06:46:10+02:00

Torse de Clotho de Camille CLAUDEL

Publié par Tlivres
Torse de Clotho de Camille CLAUDEL

Camille CLAUDEL, RODIN et Jules DESBOIS réunis au Musée biographique de ce dernier de Parçay-les-Pins le temps d'une exposition !


Vendredi 20 avril a eu lieu le vernissage d'une exposition qui fait la place belle à la déchéance de la vieillesse.


Les trois artistes ont marqué leur époque avec un tournant majeur dans la création. Plutôt que de s'attacher à une Beauté académique largement représentée dans un corps féminin idéalisé, Camille CLAUDEL, RODIN et Jules DESBOIS ont préféré, eux,  en explorer une autre que seul l'Art peut sublimer. 


Nous connaissions le Syndrome de Stendhal, nous connaissons maintenant le Saisissement de RODIN devant La Misère de Jules DESBOIS, cette sculpture encore enjolivée par une récente restauration.


Avec La Vieille Heaulmière de RODIN, La Misère de Jules DESBOIS, le Torse de Clotho appellent un regard attentionné sur un corps en déchéance mais magnifié par la sculpture de ces artistes hors norme qui ont oeuvré à la fin du XIXème siècle. Ces oeuvres traduisent l'évolution du corps dans le temps et osent donner une réponse à la question universelle : Qu'est-ce que la Beauté dans l'Art ?  


Cette exposition intitulée "Sublime déchéance" est visible jusqu'au 4 novembre prochain, une très belle opportunité de (re)découvrir toutes les richesses artistiques exposées dans cette antre de la sculpture en plein coeur d'une campagne bucolique.


Bon début de semaine.  

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2018-04-21T07:31:46+02:00

Un océan deux mers trois continents de Wilfried N’SONDE

Publié par Tlivres

Actes Sud


Après un feel good book, « La chambre des merveilles » de Julien SANDREL, un roman familial, « Fugitive parce que reine » de Violaine HUISMAN et un roman historique, « Le théâtre de Slávek » de Anne DELAFLOTTE MEHDEVI, je renoue avec l’histoire avec le roman de Wilfried N’SONDE, lui aussi en lice pour le #Prixdulivre France bleu_Page des libraires.
 


Dom Antonio Manuel, appelé aussi Nigrita, vous connaissez ? Non ! Son buste en marbre noir, sculpté par l’artiste Stefano Mademo, avec la collaboration de Francesco Caporale, trône pourtant depuis 1608 dans la Basilique Sainte-Marie-Majeure de Rome. Il fut réalisé sur commande du pape Paul V.


Pourquoi ?


C'est ce que Wilfried N'SONDE va vous relater dans son tout dernier roman, une véritable invitation au voyage, dans le temps, à travers l’océan, les mers et les continents !


Nsaku Ne Vunda est né vers 1583 au royaume du Kongo. Sa mère est morte en couches, son père foudroyé alors qu'il courait chercher des secours. Orphelin, sa vie n'a tenu qu'à un fil et pourtant, l'enfant a survécu. Considéré à l'époque comme un miraculé, son existence a toujours été auréoléé d'un profond mystère. Devenu grand et attiré par la foi chrétienne, il est ordonné prêtre. Lors de son ordination, il est baptisé Dom Antonio Manuel. Les Bakongos le désignent ambassadeur de leur peuple et porteur d'un message à destination du Saint-Père. Il se retrouve à embarquer sur Le Vent Paraclet commandé par le Capitaine Louis de Mayenne sur ordre d’Henry IV. Alors qu'il se croit à destination de l'Italie, il prend le large en direction du Nouveau Monde. Victime d'une supercherie organisée par le roi Alonso II, il découvre dans les soutes du bateau des dizaines d'esclaves vendus comme des marchandises et faisant l'objet de la plus grande ignominie. Son voyage durera trois ans, trois longues années pendant lesquelles il découvrira la condition humaine dans ce qu'elle a de plus barbare mais ce n'est pas tout, et là commence une autre histoire...


Ce roman historique, sous la plume de Wilfried N'SONDE devient une véritable épopée. Semé d'embûches, le parcours initiatique du jeune Dom Antonio Manuel est mené tambour battant, à un rythme haletant. Sa vie est régulièrement mise en danger. Les pirates sévissent en plein océan, les conditions météorologiques sont instables et les embarcations incertaines.


Devant le tableau brossé par l'Homme qui devient un loup pour l'homme, le jeune Dom Antonio Manuel ressent une profonde culpabilité. Alors que lui vénère la bonté, la générosité, l'amour de son prochain, il est plongé en pleine barbarie et ressent une profonde culpabilité.
 


Une peine abyssale me consuma. P. 141

Il assiste à l'entreprise de déhumanisation portée par l'Homme appâté qu'il est par le gain, l'argent :
 


Ce fut la première fois que je vis des hommes enchaînés. La confrontation avec l’âpre réalité de la servitude me bouleversa, sans doute m’étais-je aveuglé ? P. 56

Il mesure aussi toute la fragilité de son statut, lui, l'homme noir, protégé, alors que ses congénères sont à croupir dans les soutes du navire. Seuls les érudits de son peuple bénéficient d'un tel privilège, les autres n'étant bons qu'à être exploités, y compris dans leur propre pays, au service des activités portuaires.


Le roman dédie aussi de longs passages à l'approche des religions. Entouré de chrétiens, il se voit confronté à des pirates, eux, musulmans, qui, mal inspirés du Coran, proclament une lutte acharnée contre tous les plaisirs :
 


A force de marmonner leur haine du bonheur des autres, ils estimèrent qu'au nom d'Allah il était impératif d'interdire tout ce qui égayait pourtant la vie sur Le Dragon. P. 185

Ce passage résonne cruellement avec l'actualité du XXIème siècle. Je ne peux croire que de tous temps des hommes se soient appropriés des textes saints pour servir leur sauvagerie et pourtant... Et n'allez pas croire que les musulmans soient les seuls, non, les chrétiens ont aussi à leur actif des faits peu glorieux. Il suffit de s'intéresser à l'Inquisition espagnole qui sévit justement à cette période et à laquelle le jeune Dom Antonio Manuel est également confronté.


Quant aux juifs, eux, sont toujours là pour être persécutés. Où qu'ils soient, ils sont la cible à abattre. En terre sainte, ils ne sont pas plus protégés, non, ils font même rire aux éclats un Pape hilare et subjugué par une course organisée dans les rues de la papauté, une course où les hommes sont vêtus de haillons et chaussés d'escarpins de femmes.


Ridiculisés, ils avaient été réduits à l’état de nature à côté des costumes admirables et raffinés de leurs concitoyens chrétiens. P. 259/260

Alors que la tyrannie sévit dans le monde, et que Wilfried N'SONDE nous dresse un portrait insoutenable de la société du début du XVIIème siècle, l'écrivain réussit à tenir un propos profondément humaniste.

Déjà, par le jeu de la narration, la première personne du singulier donne au personnage principal sa dimension humaine. On vit au gré des émotions du jeune Dom Antonio Manuel, on frissonne dans le froid, sous la pluie, dans la nuit, on vibre de colère devant des actes d'une cruauté sans pareille.

Mais c'est sans compter sur la grandeur d'âme du personnage qui, malgré toutes ces tribulations, n'abandonnera jamais ses convictions, ses valeurs, quitte à manquer de respect au Saint-Père. Avec Dom Antonio Manuel, l'auteur trouve à exprimer la voie de la fidélité, de la loyauté, de la sincérité, lui devient le porteur d'un message de tolérance, de bonté et de charité. 


J'ai adoré voyager aux côtés de Dom Antonio Manuel, c'est un roman très bien écrit, la plume est éminemment romanesque. Quelle aventure !


Un mot enfin, un dernier, pour la beauté de la couverture. Je la trouve sublime. Elle ne sera pas pour déplaire à Diane DUCRET je crois...

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2018-04-20T11:24:03+02:00

La petite fille sur la banquise d’Adélaïde BON

Publié par Tlivres

Éditions Grasset


Le temps d’une lecture, côtoyer l’indicible, c’est ce que nous propose Adelaïde BON avec le récit de sa vie. Dans ce livre, il n’y a pas de place pour la fiction, l’imagination, nous ne sommes pas dans un roman, non, nous entrons de plein fouet dans l’intimité de l’écrivaine qui, à l’âge de 9 ans, a rencontré un homme dans l’escalier. Ce jour-là, la petite fille, qu’elle était, est morte. Une nouvelle vie a, depuis « l’événement », commencé. Retrouvée murée dans un silence par ses parents, une plainte contre X est déposée le lendemain. Dès lors, Adelaïde BON n’a fait que lutter, contre son corps d’abord, envahi de méduses, contre ses crises d’angoisse, de boulimie, de profonde tristesse et toujours, cette mémoire qui n'en fait qu'à sa tête. A coup de thérapies en tous genres, de recherches et de mobilisation, Adelaïde BON apprend à nommer les faits, une première clé pour ouvrir le coffre-fort de sa précédente vie, elle a été victime d'un viol. Le mot est lâché, dès lors, elle accède à la connaissance des modalités de fonctionnement du cerveau et en comprend la mécanique, un premier pas sur le chemin de la résilience. La deuxième clé, c’est la voie de la justice. 23 années se sont écoulées entre les faits et ce premier appel téléphonique des services de police lui annonçant avoir découvert un suspect. Giovanni Costa est impliqué dans 72 affaires, viols ou tentatives de viol sur enfants. Les jours passés devant la Cour d’Assise ont été profondément douloureux mais le jugement a été rendu. Adélaïde BON a retrouvé le goût de la vie :
 


Dans ma bouche, dans ma gorge, le feu d’artifice d’une pomme croquée à pleines dents, dans mes narines, le long de ma trachée, l’odeur des aiguilles de pin roulées au bout des doigts, dans mes paumes, la chaleur vibrante et moite d’une poignée de terre grasse. P. 251

Toute son enfance, sa jeunesse, son adolescence, sont marquées de l’empreinte laissée par "l’événement". J’ai été bouleversée par son parcours et tellement impressionnée par sa ténacité, son courage, sa force de caractère.
 
Alors qu’il aurait été si facile, lorsqu’elle était suspendue au-dessus du vide au 7ème étage d’un immeuble parisien, de faire ce petit geste de trop, alors qu’elle accumulait les opérations destinées à réparer sa mâchoire impactée par un accident de mobylette, alors qu’elle était à cette époque traversée par des pensées suicidaires, qu’est-ce qui a fait qu’Adelaïde BON a continué à se battre ?
 
Avec le recul de la lecture, chacun pourra en déduire que son combat en valait furieusement la peine, mais quel calvaire, quel chemin de croix !
 
Adelaïde BON parsème son récit de toutes ces petites choses qui sont loin d’être des détails, des rencontres, des relations d’amitié, d’amour, qui lui ont permis de tenir le coup.
 
Le théâtre s’est fait une place dans sa vie, il lui a offert des parenthèses, des bouffées d’air, et elle en rend compte dans une bien jolie formule :  
 


Ce feu qui l’habite et l’éclaire lorsqu’elle joue la dévore au dehors, et sans les planches pour le contenir, il la consume. P. 44

Elle rend hommage à tous ces professionnels aussi qu’elle a croisé sur son chemin, avec des moments d’espoir et des périodes de grand désarroi, l’impression de devoir toujours tout recommencer à zéro, tout réexpliquer, pleurer, submergée par les émotions et envahie par ces périodes blanches :
 


[…] les heures maudites, celles dont les victimes se sentent si coupables qu’elles n’en parlent jamais. P. 162

Elle n’oublie pas sa famille. Bien que présente avec parcimonie dans le récit, elle a toujours été là, peut-être même dans les moments les plus forts. Et même si les relations mère/fille sont souvent décriées, il y a un très beau passage où elle évoque sa mère, une pépite :


Elle m’écoutait, cette femme sensible et aimante, et cette femme, soudain, je m’en suis souvenue, c’est Maman, ma Maman perdue et enfin retrouvée. P. 142

Ce récit est douloureux, il est à la limite du supportable et vous donnera peut-être la nausée, mais il est profondément lumineux par la leçon de vie que nous donne Adelaïde BON. L’auteure nous livre le témoignage d’une femme qui a réussi à faire son deuil de l’enfant blessée dans son corps et dans son âme, morte alors qu’elle n’avait que 9 ans. Quand on referme le livre, on a envie d’aller se rouler dans l’herbe fraîche et batifoler comme elle le fait avec son enfant, c’est dire.
 
Mais ce récit, je vous le conseille aussi parce qu’il est militant, c’est un véritable plaidoyer contre un fléau de notre société et en faveur d’une prise de conscience du grand public et d’une évolution des politiques publiques.
 
Adelaïde BON met les mots sur des faits et dénonce une cause totalement insoupçonnée dans son ampleur :
 


Dans ce dossier, vous avez soixante-douze petites victimes recensées, vous pouvez ajouter un zéro. P. 265

Elle contribue avec ce livre à lutter contre l’omerta qui entoure cette cause, la dévoiler dans ce qu’elle a de plus pervers pour mettre fin (c’est peut-être une utopie) ou à tout le moins, freiner, l’élan des serials violeurs et les faire condamner par la Justice.

Mais pour que la Justice ait connaissance des faits, encore faut-il que des hommes, des femmes, osent prendre la parole, porter plainte et aller jusqu'au bout de la procédure. 


[...] on estime à quatre-vingt-dix pour cent le nombre de victimes de viols qui ne portent pas plainte et ce chiffre est encore plus important pour les enfants. P. 235

L'enjeu est de taille, oui, mais n’est-ce pas en vulgarisant ce récit auprès des mères, des pères, qu’un pas sera déjà franchi ?

Leur permettre d’aborder le sujet, aussi grave soit-il, en toute connaissance de cause, devient de surcroît une problématique de santé publique. L’auteure le dit haut et fort :


Quand on sait que lorsqu’une victime de violences sexuelles est correctement repérée, diagnostiquée et soignée, elle guérit. P. 232

Et ce n’est pas une affaire de genre, non, il suffit de se tenir informé(e) des actualités pour comprendre que les petits garçons sont aussi victimes d’agressions sexuelles. Il serait de surcroît extrêmement réducteur et particulièrement préjudiciable de l’appréhender sous l’angle exclusif de la cause féminine. D’ailleurs, Adelaïde BON fait la part belle aux hommes dans son récit. Il lui ont permis d’avancer. Certains avec des objectifs purement sexuels, d’autres, beaucoup plus sensibles ont su repérer ses fragilités, l’apprivoiser, l’accompagner, la soutenir dans toutes ses épreuves.
 
Mais ce récit ne serait rien sans la qualité de la plume de l’écrivaine. Adelaïde BON nous livre un récit crû, sans fioriture aucune, mais percutant. Elle se livre aussi à un exercice littéraire ingénieux, redoutable mais j’ai l’impression que plus rien ne l’est pour elle aujourd’hui, réussi avec des narrations alternées. Majoritairement à la 3ème personne du singulier pour la prise de distance, le récit donne lieu aussi à des fulgurances du « je » qui sont autant de passerelles entre la petite fille, morte, et celle qui s’est construite depuis l’événement.
 
Vous l’aurez compris, il convient de ne pas laisser seule « La petite fille sur la banquise » !

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2018-04-19T06:00:00+02:00

Fugitive parce que reine de Violaine HUISMAN

Publié par Tlivres
Fugitive parce que reine de Violaine HUISMAN

Il y a des extraits qui, à eux seuls, peuvent résumer un livre. C'est le cas de ma #citationdujeudi pour le roman de Violaine HUISMAN "Fugitive parce que reine".

La famille de Violaine HUISMAN, puisqu'il s'agit d'un roman autobiographique, a vécu au rythme des excès de sa mère, fantasque, excessive, exaltée, hystérique... une mère hantée par une maladie mentale et qui pourtant, toute sa vie durant, a tenu à donner à ses filles tout l'amour qu'elle pouvait.

Ce premier roman est aussi déchirant qu'il est lumineux, écrit dans une plume remarquable, poétique et raffinée, une plume prometteuse, quoi !

Il est en lice pour le Prix du Livre France bleu_Page des libraires

avec

- "La chambre des merveilles" de Julien SANDREL
- "Le théâtre de Slávek" de Anne DELAFLOTTE MEHDEVI
- "Kisanga" de Emmanuel GRAND
- "Un océan deux mers trois continents" de Wilfried N'SONDE

 

Résultats le 4 juin prochain.
 

Il fait aussi partie de la sélection des 68 Premières fois

 

"L'Attrape-souci" de Catherine FAYE

"Les déraisons" d'Odile d'OULTREMONT

"Pays provisoire" de Fanny TONNELIER

"L'homme de Grand Soleil" de Jacques GAUBIL

"Les rêveurs" d'Isabelle CARRE

"Eparse" de Lisa BALAVOINE

"Celui qui disait nonde Adeline BALDACCHINO

"Une mère modèle" de Pierre LINHART

Fugitive parce que reine de Violaine HUISMAN

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2018-04-16T07:14:51+02:00

Le baiser du sculpteur, Etienne

Publié par Tlivres
Le baiser du sculpteur, Etienne

Parce qu'il y a des jours où on a besoin, plus que d'autres, d'amour et qu'il y a mille et une façons artistiques d'aborder le baiser.

Il y a bien sûr celle de Klimt, peinte, et puis il y a celle d'Etienne, le sculpteur.

De passage au Bon Marché Rive gauche pour fêter les 40 ans de la maison d'édition Actes Sud, j'ai découvert cette sculpture que je trouve d'une très grande beauté. 


Parfaitement équilibrée, hautement suggestive, elle inspire l'harmonie entre deux êtres, la couleur marron renforce l'impression de chaleur. Une jolie manière de commencer cette nouvelle semaine, non ?

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2018-04-14T06:00:00+02:00

Fugitive parce que reine de Violaine HUISMAN

Publié par Tlivres

Éditions Gallimard 


Ce premier roman de Violaine HUISMAN est en réalité une autobiographie, pas celle d’une personne célèbre, non, celle d’une femme que l’on pourrait qualifier d’ordinaire. Violaine HUISMAN a décidé de prendre sa plume pour relater sa vie, celle de sa soeur, celle de sa mère aussi. 


Tout commence quand Violaine et sa soeur, Elsa, ont 10 et 12 ans. Petites filles, en 1989, elles regardent à la télévision les images  de la chute du mur de Berlin et assistent à l'effondrement de leur famille. Leur mère, Catherine, est internée d'office pendant plusieurs mois. Sa maladie mentale a eu raison de son mariage avec le père des enfants. Violaine et Elsa sont accueillies par leurs grands-parents. Toute leur enfance est empreinte des excès de leur mère. Maniaco-dépressive, en permanence sous l’emprise des médicaments, elle peine à assumer ses responsabilités éducatives. Elle fait ce qu’elle peut, mais elle est humaine, avec ses faiblesses. Fantasque, libertine, elle a une vie sexuelle débridée, elle vole d’aventures amoureuses en relations éphémères. En lutte permanente contre son corps marqué à vie par les séquelles d’une maladie infantile, contre sa propre mère qui ne manque de la jalouser, Catherine se lance dans le projet fou de la restauration d’une maison d’un petit village de Corrèze. Elle la rénove et en fait un lieu de grandes fêtes, elle sera son refuge aussi, mais là, commence une toute nouvelle histoire.


Ce roman, je m’y suis plongée, tête la première, je suis tombée en empathie pour l’écrivaine dès les premières lignes du récit. L’enfant qu’est Violaine HUISMAN porte un regard sur la grande Histoire comme la petite, les deux lui échappent littéralement. Alors, comme un instinct de survie, les deux enfants vont développer une relation fusionnelle. Elles apprendront à garder leur maman en secret quand elles seront chez leurs grands-parents. Là-bas, tout n'est que bonheur à la condition de ne pas citer son nom. Elles affronteront ensemble aussi les sursauts de colère de leur mère proclamant haut et fort ses limites :
 


Je suis un être humain et je fais ce que je peux, je fais comme je peux. P. 41

Le modèle patriarcal avec une autorité parentale concentrée dans les seules mains du père assigné au rôle de chef de famille a explosé en plein vol en 1968. Cette année marque de son empreinte cette famille tout particulièrement. Elsa a un an, Violaine naîtra l’année suivante. L'environnement est en pleine mutation, il devient interdit d'interdire, c'est aussi la période de l'émancipation du corps. Violaine HUISMAN brosse le portrait d'une femme en quête de liberté, portée par un mouvement sociétal, d'une mère aussi qui cherche ses repères, qui navigue entre l’éducation qu’elle a reçu de sa propre mère, voire de sa grand-mère, et celle qu'elle aimerait donner à ses filles mais que la maladie mentale vient incessamment perturber. J'ai été bouleversée devant l'acharnement de cette mère à vouloir tenir le cap, coûte que coûte :
 


Il fallait à tout prix qu’elle reste mère, qu’elle ne perde pas ça. P. 25

J'ai été profondément attendrie par la manière de chacune des deux filles à SURvivre dans cette famille chahutée par une vie quotidienne perturbée. Violaine HUISMAN montre la dimension plurielle de la relation fille/mère. La fratrie est composée d’êtres singuliers qui inter-réagissent avec les comportements de l’adulte. Violaine, elle, est animée par un souffle de générosité, de bienveillance et de sérénité. Ses actes sont dictés par cette volonté de toujours faire plaisir, rendre sa mère heureuse, à l'image de ces bouquets de fleurs qu'elle offre à Catherine avec la menue monnaie que lui remet sa grand-mère. Sa soeur, elle, se nourrit des débordements de Catherine et lui répond avec fougue et violence. 


Maman et ma sœur s’aimaient comme des sauvages, elles se seraient entretuées pour se le prouver. P. 40

Ce roman aurait pu être sombre, triste, mélancolique, il est au contraire profondément lumineux. 


D'abord, la plume de Violaine HUISMAN est éblouissante, elle est poétique, pleine d'innocence et de candeur, ainsi quand elle décrit sa représentation de la maladie mentale de sa mère : 
 


Ça ne voulait rien dire d'abord, maniaco-dépressive. Ou si, ça voulait dire que maman pouvait monter dans les tours, des tours que je visualisais aux angles d'un château fort, des donjons, au sommet desquels j'imaginais maman grimper à toute allure, et d'un bond, plonger au fin fond des cachots ou des catacombes, enfin là où il faisait froid et humide, là où ça puait la mort. P. 12

Son écriture sublime les personnages. Même si Violaine HUISMAN dédie son premier roman à sa soeur, il s'agit bien là d'une formidable preuve d'amour offerte à sa mère. Elle en expose, y compris les fêlures, mais imprime dans notre inconscient son immense beauté. 


Ensuite, parce que cette famille, aussi disloquée soit-elle, a toujours été portée par un prodigieux amour. Cette mère, malgré sa vulnérabilité, s'est toujours ennorgueillie de la tendresse et de l'affection qu'elle portait à ses enfants qui, au final, le lui rendent bien. Ce roman montre la puissance de la filiation mère/fille, ce lien pourtant si souvent blâmé en littérature et qui ici, revêt toute sa splendeur. Il y a quelque chose de l'ordre du viscéral, de l'intime et de l'inaltérable.


Enfin, parce que ce roman est une fabuleuse leçon de vie. Il y a dans le combat de cette mère quelque chose d'une force inouie qui nous invite, tout simplement, à vivre passionnément.
 


Le foyer de maman était un âtre, elle y faisait feu de tout bois pourvu qu’y règnent l’ardeur des sentiments, la chaleur brûlante de sa foi en l’âme humaine. P. 82

Il y a des coups de coeur, il y a aussi des lectures coup de poing, celle-ci en fait partie. Ce premier roman m'a émue intensément, il m'a fait vibrer, c'est peut-être ça, EXISTER !


"Fugitive parce que reine" est en lice pour le Prix du Livre France bleu_Page des libraires

avec

- "La chambre des merveilles" de Julien SANDREL
- "Le théâtre de Slávek" de Anne DELAFLOTTE MEHDEVI
- "Kisanga" de Emmanuel GRAND
- "Un océan, deux mers et trois continents" de Wilfried N'SONDE
 

Résultats le 4 juin prochain.
 

Il fait aussi partie de la sélection des 68 Premières fois

 

"L'Attrape-souci" de Catherine FAYE

"Les déraisons" d'Odile d'OULTREMONT

"Pays provisoire" de Fanny TONNELIER

"L'homme de Grand Soleil" de Jacques GAUBIL

"Les rêveurs" d'Isabelle CARRE

"Eparse" de Lisa BALAVOINE

"Celui qui disait nonde Adeline BALDACCHINO

"Une mère modèle" de Pierre LINHART

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2018-04-12T07:01:35+02:00

Les guerres de mon père de Colombe SCHNECK

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Les guerres de mon père de Colombe SCHNECK

Parce que l'absence torture et qu'elle a besoin d'être soignée comme on panse des plaies, Colombe SCHNECK dans son tout dernier roman "Les guerres de mon père" publié chez Stock éditions choisit la voie de l'imaginaire pour s'offrir une perspective de résilience.

Les guerres de mon père de Colombe SCHNECK

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2018-04-12T06:52:54+02:00

L'insouciance de Karine TUIL en version poche

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L'insouciance de Karine TUIL en version poche

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2018-04-10T06:00:00+02:00

Le théâtre de Slávek de Anne DELAFLOTTE MEHDEVI

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Le théâtre de Slávek de Anne DELAFLOTTE MEHDEVI

Gaïa éditions
 

Après « La chambre des merveilles » de Julien SANDREL publié chez Calmann-Levy, voici la deuxième lecture s’inscrivant dans le Prix du Livre France bleu_Page des libraires pour son édition 2018.

Je crois que je ne vais pas pouvoir vous le cacher bien longtemps, il s’agit d’un coup de coeur, de ceux qui vous transportent dès les premières pages.


Je vous explique :

Nous sommes à la fin du 18ème siècle, un vieil homme savoure les derniers moments de sa vie, fenêtre grande ouverte malgré un état de santé fragile. Il n’y a rien qu’il aime tant que s’imprégner de l’ambiance de la rue, de jour comme de nuit. Avant que la mort ne l'emporte, il prend sa plume et rédige ses confessions. Il relate sa vie et celle de sa ville, Prague, qu’il chérit depuis son plus jeune âge. Slávek, c’est son nom. Né en 1707 d’un mariage d’amour, il a connu une enfance heureuse. Il y a bien eu la grande épidémie de peste en 1713, mais la famille, cloîtrée, y a résisté. Les roues du carrosse du Comte Sporck auront toutefois raison de ses jambes. Alors qu'il jouait avec d'autres enfants pour fêter la Saint-Pancrace, il n'a pu éviter l'accident avec le véhicule lancé à vive allure sur la grande place. Sa vie aurait pu s'arrêter là mais c'était sans compter sur les soins du médecin attitré du comte. Remis sur pied, et devant la difficulté tout de même à se déplacer, Slávek bénéficiera d'une éducation privée, à domicile, dispensée par un piariste. A la mort de ses parents, le comte prendra définitivement Slávek sous son aile et lui offrira une destinée hors du commun. La vie, pour lui, ne fait alors que commencer !

Ce roman historique nous offre le loisir d'un voyage dans le passé, la bagatelle de 300 ans, pour nous immerger dans la ville de Prague. A l'époque, les métiers artisanaux sont à l'oeuvre, l'effervescence artistique du Siècle des Lumières porte l'ambition des hommes. Les uns sculptent la pierre, les autres bâtissent. Anne DELAFOSSE MEHDEVI nous offre un livre truffé de descriptions d'une grande précision. Les scènes de la vie, je les vois, je les sens, je les entends. Avec une narration à la première personne du singulier, tous les sens sont éveillés. L'auteure brosse un tableau si méticuleux qu'il se développe tout naturellement sous nos yeux. De là à composer un scénario cinématographique, il n'y a qu'un pas !

J'ai tout simplement adoré de me laisser porter par le mouvement de l'époque, celui de la création, de l'inspiration, il n'y a pas de rêve assez fou. Le comte Sporcks qui a reçu une éducation à l'étranger est un passionné de philosophie, de littérature. Il porte le projet extravagant de faire édifier un château sur le modèle de celui de Versailles orchestré par le Roi Soleil. Après la ville, l'écrivaine nous emmène à la campagne sur les rives de l'Elbe.  A Kuks, le comte fait construire des thermes, un hôpital, une église, un théâtre aussi. C'est là que Slávek fait ses premiers pas dans le 6ème art.


Des chanteurs et danseurs s'habillaient au vu de tous et sans gêne. Grande, très excitante affaire, et je dirais émouvante même, de voir ces nus trop maigres ou trop gras, fragiles en tout cas, passer des cuirasses fantastiques ou des toges dans lesquelles dès lors qu'ils en étaient parés, ils devenaient sublimes. P. 235

L'auteure rend hommage tout particulièrement au Vénitien, Denzio, l'impressario d'une cinquantaine d'opéras. Avec lui, c'est tout l'art italien qui rayonne dans la cité pragoise.
Malheureusement, l'homme est capable du meilleur comme du pire. Parallèlement à un monde qui s'enorgueillit de la magnificence et de la splendeur, le peuple se déchire.

Le roman historique devient alors un roman d'aventure. La vie de Slávek est marquée par une multitude d'événements donnant au récit un rythme haletant. Anne DELAFLOTTE MEHDEVI  sait parfaitement lier la petite histoire à la grande et nous relater l'ignominie qui animait alors l'humanité. Les soldats français sous les ordres de Maurice de Saxe conquièrent la ville en escaladant les fortifications. Les Autrichiens s'y affairèrent aussi avant que les Prussiens ne s'y aventurent, faisant chaque fois de nombreuses victimes et plongeant la population dans la misère. La stigmatisation des tziganes et la persécution des juifs ne manquaient pas d'animer des guerres intestines entre ceux qui jadis cohabitaient dans la même ville.   
 


Il y a des maux et des souffrances auxquels les hommes sont pour quelque chose, quand ils oppressent, torturent, humilient. P.360

Le tout est servi dans une plume d'une rare beauté. Le français y est riche et soutenu, la langue y porte ses plus beaux atours, l'épopée romanesque revêt le costume du chef d'oeuvre !

Je suis tombée littéralement sous le charme de la prodigieuse écriture de Anne DELAFLOTTE MEHDEVI. Il s'agit de son cinquième roman. Je me demande comment j'ai bien pu faire pour passer jusque là à côté. Mais heureusement, le choix des libraires est soigneusement éclairé.

Cette lecture concourt donc au Prix du Livre France bleu_Page des Libraires

aux côtés de :

- "La chambre des merveilles" de Julien SANDREL

- "Fugitive parce que reine" de Violaine HUISMAN

- "Un océan, deux mers et trois continents" de Wilfried N'SONDE

- "Kisanga" de Emmanuel GRAND.
 

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2018-04-09T06:45:54+02:00

"Voyageurs" de Bruno CATALANO

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"Voyageurs" de Bruno CATALANO

Parce qu'il est des lundis où l'on n'a qu'une envie, c'est de prendre sa valise, de s'offrir une parenthèse, de nouveaux horizons... et puis, parce que certains font des voyages qui s'inscrivent dans un parcours de vie, ceux-là quittent leur pays, parfois, pour toujours. Ma #lundioeuvredart est une sculpture de Bruno CATALANO extraite de la série "Voyageurs". 


Je la trouve magnifique pour l'effet visuel.


Je la trouve originale et très artistique, le simple fait qu'elle puisse tenir en équilibre alors même qu'elle est décomposée.


Je la trouve enfin parfaite pour illustrer la littérature qui parle de l'exil, de ceux qui laissent leur coeur sur leur terre d'origine, de ceux qui sont déchirés et qui souffrent tous les jours de ce départ qu'ils n'ont pas souhaité.


Il me vient à penser à un premier roman en particulier, découvert avec les 68 Premières fois, "De ce pas" de Caroline BROUE publié aux éditions Sabine WESPIESER. Cette sculpture l'illustrerait tout en beauté !


Très belle semaine à vous.

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2018-04-08T07:00:00+02:00

Quand un mois laisse sa place à un autre...

Publié par Tlivres
Quand un mois laisse sa place à un autre...

Parce que "le bonheur ne se voit que dans le rétroviseur" comme l'écrit Gaël FAYE dans "Petit Pays", je vous propose une rétrospective des découvertes du mois de mars.

Il y a eu quelques romans 5*

A commencer par "Celui qui disait non" d'Adeline BALDACCHINO, un roman inspiré d'une histoire vraie, celle d'August Landmesser, quand la littérature oeuvre en faveur du devoir de mémoire et restaure l'honneur de toute une famille. 

Dans le registre du roman familial, plusieurs lectures ce mois-ci :
"Une mère modèle" de Pierre LINHART, cette lecture concourt au Coup de coeur des Lectrices de Version Femina et puis "Eparse" de la sélection des 68 Premières fois

Deux lectures qui donnent à voir la condition  des femmes aujourd'hui, malmenées par les séparations, en quête de nouveaux modèles...


Je me suis aussi délectée avec des thrillers psychologiques de haute volée. Il y a eu celui de Lina MERUANE "Un regard de sang" et puis celui de Christian GUAY-POLIQUIN "Le poids de la neige"

Des lectures que je ne suis pas prête d'oublier !

Pour retrouver le sommeil, je me suis prise à rêver au bras d'Octavio... avec le premier roman de Miguel BONNEFOY "Le voyage d'Octavio"

Et puis, comme le voyage m'inspirait, je suis partie pour Montréal et le grand froid, j'ai découvert le premier roman de Jacques GAUBIL "L'homme de Grand Soleil" servi dans une plume caustique, vous allez rire... jaune !

Une déception avec "Les rêveurs" d'Isabelle CARRE, je suis passée à côté, j'en suis d'autant plus désolée qu'il est lauréat du Grand Prix RTL Lire 2018, dommage !

La sélection des 68 Premières fois m'a permis, une nouvelle fois, de me convaincre de l'immense talent des premières plumes.


En dehors du "Voyage d'Octavio", tous font partie de la rentrée littéraire de janvier 2018 et ont trouvé leur place Aux Bouquins Garnis dans le cadre du Challenge !
 

Il y a eu des rencontres-dédicaces aussi en mars, à la Librairie Richer :


La première avec Cécile LADJADI, un pur bonheur, le partage d'un après-midi avec une femme qui enseigne aux érudits mais aussi à des enfants sourds et auprès de jeunes de quartiers défavorisés. Un témoignage d'une grande puissance quant au pouvoir de la littérature. J'avais lu précédemment "Illettré" et son tout dernier roman "Bénédict", deux livres que je vous recommande chaudement.

Et puis, une toute jeune femme, dans la littérature s'entend, puisqu'elle vient de sortir son premier roman : "Pays provisoire" qui vous emmènera jusqu'à Saint-Pétersbourg et vous fera voyager dans le temps. Une belle rencontre qui a permis de cerner la source de son inspiration.

Il y a eu une BD aussi :

"Ida" de Chloé CRUCHAUDET, une trilogie réunie dans un album au graphisme gracieux et raffiné : 

Et puis des oeuvres d'art : 

Je me suis laissée transporter par le charme du tout dernier spectacle  de la Compagnie de Jérôme Thomas de passage au Théâtre Monfort de Paris : "Magnétic", de la pure féerie, magique !

J'ai adoré cette sculpture de Frank GIRARD, "Gourmandise", il faut dire qu'elle porte très bien son nom et représente parfaitement les travers de la boulimie de livres, cette maladie dont je souffre, comme vous, non ?

"La lecture" du sculpteur Etienne m'a aussi profondément inspirée. Nous étions le mois du salon du livre de Paris, rien d'étonnant à ce que les oeuvres d'art soient un brin orientées littérature !

Enfin des sorties en poche à signaler :


"Les indésirables" de Diane DUCRET :

"Giboulées de soleil" de Lenka HORNAKOVA-CIVADE

"Monsieur Origami" de Jean-Marc CECI

Vous ne pouvez décemment plus passer à côté de ces pépites de la littérature.

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2018-04-07T07:00:00+02:00

La chambre des merveilles de Julien SANDREL

Publié par Tlivres
La chambre des merveilles de Julien SANDREL

Editions Calmann-Lévy


Comme vous le savez peut-être, j’ai l’énorme chance de faire partie, avec Leiloona, du Jury du Prix du Livre France bleu_Page des Libraires pour l'édition 2018 présidée par Louis-Philippe DALEMBERT, lauréat 2017.

 


Tout au long du mois d’avril, je vous proposerai donc des chroniques sur les 5 romans sélectionnés par un réseau composé de 400 libraires. Attention, pépites en vue !
 

Pour la première, que les fées des 68 Premières fois se rassurent, l'infidélité reste limitée. Et oui, vous avez deviné, il s’agit d’un premier roman !


Je vous en dis quelques mots :


La mère de Louis est Directrice Marketing de la division Shampooing techniques chez Hégémonie, une entreprise de cosmétiques dans laquelle elle travaille depuis 15 ans. Elle vit seule dans un appartement du 10ème arrondissement de Paris avec son fils d’une dizaine d’années. Nous sommes samedi, le programme est chargé. Elle a prévu d’aller s’acheter des escarpins à talons, rouges, ceux dont elle rêve depuis quelques temps. Le réveil de Louis a été difficile mais elle a quand même réussit à le sortir de son lit. Dehors, lui fait du skateboard près de sa mère qui reçoit un appel téléphonique professionnel. Lundi se tiendra une réunion stratégique, elle décide de répondre. Louis choisit le moment pour interpeller sa mère qui l’envoie balader. Fâché, Louis met son casque audio sur ses oreilles, part en glissant, vite, très vite, trop vite. Il dérape, il percute un camion et tombe dans le coma. Hospitalisé, son diagnostic vital est engagé et pourrait bien le rester quelques temps. Sa mère se résigne à aller travailler le lundi suivant, la réunion commence mal, le Directeur est distrait. Elle cesse sa présentation pour attirer son attention. Le silence cristallise l'atmosphère. Sur fond de propos sexistes, elle le gifle. La peine ne tarde pas à tomber, elle est licenciée. Sa vie toute entière bascule, pour le pire et peut-être le meilleur...


Si les premières pages du livre témoignent d’un scénario catastrophe, rassurez-vous, le titre et les couleurs dynamiques de la première couverture représentent bien le message véhiculé par ce premier roman, un feel good book absolument jubilatoire, un vrai feu d'artifice.


L’ingéniosité de Julien SANDREL nous permet très vite d’échapper à la chape de plomb qui pèse sur cet environnement familial. Avec la découverte d’un « Carnet des merveilles » dont je ne vous dirais rien de plus, vous allez vivre de folles aventures, en France et à l’étranger. Un élan de fantaisie va souffler, une vraie cure de jouvence.


Ce roman vibre d’une intense énergie. Le temps est compté bien sûr et pour accélérer encore la montée en pression, l’auteur va lancer à partir de la page 89, une course contre la montre. Et si Louis n’avait plus que 24 jours à vivre. Là, vous allez apprécier chaque minute, chaque seconde, comme s’il s’agissait de la dernière. Le rythme est dynamique, le roman savamment ponctué de parenthèses fulgurantes. Il y a comme une urgence à vivre, une guerre ouverte contre l’oeuvre du temps :
 


Le temps estompait les odeurs, floutait les images. J’avais besoin de regarder des photos pour que ses yeux et son sourire ne d’effacent pas, pour les garder vivants, qu’ils ne sombrent pas dans les profondeurs d’une mémoire qui vacillait bien trop vite. P. 150

Bien sûr, la mère de Louis souffre dans sa chair et si vous avez lu « Une longue impatience » de Gaëlle JOSSE, vous aurez une petite idée de la puissance de l’instinct maternel, de cette approche qu’ont les mères des choses de la vie. Elles sont dotées d’une sensibilité singulière qui, en matière d’altérité, fait toute la différence :


L’instinct maternel, c’est voir ce que les autres ne peuvent pas voir, c’est ressentir au plus profond de soi la variation de l’autre. P.222

Cette mère en particulier souffre aussi d’un profond sentiment de culpabilité. Si elle n’avait pas accordé de place à son travail ce samedi matin-là, l’accident n’aurait pas eu lieu et ils ne seraient pas aujourd’hui dans la situation dans laquelle ils sont, mais c’est sans compter sur un traitement délicat et bienveillant, l’attention portée à des choses qui pourraient paraître anodines mais qui ne le sont pas en réalité :
 


Moi, j’écoute les silences, les hésitations, les mots choisis, ceux qui se sont échappés et qu’on aurait voulu retenir, la mélodie, l’humeur, les respirations. P. 214

Personnellement, je suis totalement tombée sous le charme du personnage de Charlotte, une infirmière qui s’occupe de Louis et tente aussi de panser les plaies de la mère, une jeune femme tendre, généreuse.


Avec « La chambre des merveilles », j’ai découvert la plume de Julien SANDREL, une plume gracieuse, pleine de fantaisie aussi, une plume qui peut se permettre d’aborder des sujets graves tout en beauté et en légèreté. Elle est aussi porteuse d’une formidable leçon de vie, de celle qui vous fait vous accrocher à elle malgré les épreuves, de celle qui vous offre une alternative devant la morosité du quotidien :
 


Le visiteur comprenait au premier regard qu’ici, ils avaient bien mieux à faire que la poussière. Ils avaient à vivre. Ici, tout était furieusement vivant. P. 178

Ce livre est un véritable diffuseur à bonheur, un hymne à la vie !

 

Dans l'édition du Prix du Livre France bleu_Page des libraires 2018, il est donc en lice avec :


- Le théâtre de Slavek de Anne Delaflotte Mehdevi chez Gaïa éditions ,


- Un océan, deux mers, trois continents de Wilfried N'Sondé chez Actes Sud,


- Fugitive parce que reine de Violaine Huisman chez Gallimard,


- Kisanga d'Emmanuel Grand chez Liana Levi.


Rendez-vous le 4 juin pour connaître le lauréat.
 

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