Nous avons rdv à 8h Plaza de Armas. Comme hier, nous retrouvons d’autres touristes pour remplir un mini-bus pour partir visiter la lagune Paron à 4150 m d’altitude.
Après une heure de route, pause glace dans un village.
Il faut dire qu’il fait un franc soleil ! Les helados sont à des parfums aussi variés que l’avocat, le quinoa, la cerbeza, en plus de la mangue, la fraise et autres saveurs plus habituelles.
Elles sont crémeuses à l’envi, un régal.
On reprend notre route, 2h avant d’arriver sur site. Les 32 derniers kilomètres se font sur piste, entendez par-là un chemin de terre, bien sec, qui vous secoue bien jusqu’au point d’arrivée mais là-haut, quelle vue !
La lagune Paron aux eaux turquoises nous offre un panorama sublime, avec des pics enneigés en toile de fond, Artesonraju, La Pyramide Garcilaso et puis le mont Chacraraju (6112 m). La magie de Dame nature
On monte au mirador, le lieu où on peut la voir toute entière. On s’émerveille du spectacle.
Quand on en a pris plein les yeux, on redescend pique-niquer au bord de l’eau, un moment suspendu, coupé du monde, juste là.
Et puis, l’heure du retour sonne et là, c’est reparti pour une bonne heure de shaker. Le chemin est bordé d’aloe vera, d’eucalyptus, et plus improbables, de parcelles d’œillets, les fleurs, oui.
On profite de la descente pour admirer toujours et encore les paysages environnants, époustouflants !
De retour sur Huaraz à 18h, il fait encore jour, on flâne avant d’aller dîner. Cette nuit, nos rêves seront ponctués d’images grandioses et colorées, j’en suis persuadée !
Nous arrivons à 5h30 à Huaraz, le soleil commence à se lever. Nous faisons connaissance avec Christiano de l’agence Sechin Tours, il nous propose un package avec 4 jours d’excursions, avec des altitudes toujours plus hautes.
Il nous laisse 3h pour déposer nos affaires à notre hôtel, le Caroline Lodging, prendre une douche et un petit dej.
Nous avons rdv à 9h Plaza de Armas avec notre agence. Nous retrouvons d’autres touristes pour compléter un bus.
Départ pour la région de Chavin et bienvenue dans les grands espaces péruviens...
1er arrêt à la lagune Querococha, un lieu absolument sublime.
Nous passons dans un tunnel sous la cordillère blanche pour arriver à Chavin.
Nous sommes accueillis par le Christ blanc. Nous étions à 4 600 m d’altitude. Nous allons redescendre très vite pour visiter le site archéologique de Chavin. La visite est guidée, une nouvelle fois c’est indispensable pour comprendre l’histoire. Nous sommes en 800 avant JC.
Après le déjeuner, nous filons au musée qui vient compléter la visite du site. C’est là que sont exposés les poteries, bijoux et autres accessoires de la culture Chavin.
Saluons les investissements japonais qui, dans le cadre d’un jumelage, ont permis à ce musée de voir le jour et de conserver dans le village les trésors d’antan plutôt que de les voir disséminés dans le monde entier.
Retour sur Huaraz. La petite nuit d’hier dans le bus commence à se faire sentir. On passe dans une épicerie chercher notre pique-nique pour demain et ensuite, dodo !
Réveil en douceur à l’Hostal del Sol de Huanchaco. La nuit a été bonne et le petit dej copieux.
On laisse nos bagages à l’hôtel et on va profiter de l’océan au petit matin. Il y a un peu de bruine mais il fait très bon. Il y a beaucoup de pêcheurs, en tenue de plongée ou sans... ce sont des algues qu’ils ramassent à pleines mains.
Ce rythme farniente nous va bien ! Le soleil se lève, on en profite pour déjeuner en front de mer. A la Casa Rustica, le ceviche est juste excellent.
Quant au café, ici pas d’expresso mais un grand mug 😉
On prend un collectivo qui nous emmène au site de Chan Chan, enfin presque. Il y a un peu plus d’un kilomètre à faire à pied dans un lieu désertique. Un taxi vous attend aussi le long de la route !
Chan Chan est un lieu de vestiges archéologiques de la civilisation Chimú (celle qui a suivi les Moches).
Ce site était la capitale de la culture Chimú, il est classé au Patrimoine Mondial de l’Unesco.
Là, nous sommes fascinés par les dimensions du site et la beauté des sculptures, des bandes entières de poissons, pélicans, écureuils... mises au grand jour.
Il y a une magnifique représentation des courants marins.
Nous avons profité d’une visite guidée, en certes, mais elle est incontournable si l’on veut prendre la mesure des lieux, imaginer la vie des hommes et des femmes ici. Il vous en coutera 40 soles.
Sur 11 palais, seul un est aujourd’hui ouvert au public, un lieu incontournable si vous êtes de passage.
Après 1 heure de visite, on reprend notre chemin et retrouvons un collectivo pour finir la journée sur Huanchaco.
Savourer une cusqueña ou siroter un coca le long de l’océan, profiter du coucher de soleil avec un fond musical particulièrement entraînant, avouez qu’il y a pire comme vie !
On se trouve un petit resto. On récupère nos bagages à l’hôtel et ensuite, on prend un taxi (très bon choix) sur la voie principale (il y en a des dizaines) et nous filons sur Trujillo, le terminal Linea pour prendre un bus de nuit qui va nous emmener à Huaraz.
La nuit passée dans le bus, arrivée sur Trujillo à 8h30.
Le comite d’accueil des chauffeurs de taxi franchi, les premiers repères pris, la Plaza de Armas nous tend les bras. Comme ses cousines, elle est carrée, fleurie, avec une sculpture en son centre, des édifices religieux autour.
Destination, le sud de la ville pour aller visiter le site de Huaca de la Luna, un site archéologique accessible en collectivo, ces petits mini-bus utilisés par les gens d’ici. Une fois installés avec nos sacs à dos, impossible d’en bouger d’ici le terminus !
Le site de Huaca de la Luna a été découvert en 1991. Les archéologues ont mis presque 30 ans à explorer le temple cérémonial de la civilisation Moche que nous visitons.
Les murs édifiés dévoilent une construction en pyramide inversée en 5 étapes. Les premiers murs formaient le plus petit carré, de nouveaux étaient construits en élargissant l’édifice.
Les constructions étaient réalisées avec des briques fabriquées par les familles de la communauté. Il s’agissait d’offrandes. Chaque famille avait sa signature.
De très jolies fresques sont représentées sur ces 5 niveaux de murs, peintes à partir de couleurs naturelles (le noir avec du charbon, le blanc avec du calcaire, le jaune, le bleu et le rouge avec l’oxydation de minerais).
Les sacrifices humains qui y étaient pratiqués sont représentés sur ces dessins. Les Moches décapitaient les hommes.
Les archéologues sont encore en action sur la Huaca del Sol qui était un centré administratif et politique.
Entre les deux, une ville de plus de 20 000 habitants y était construite. Les premières fouilles laissent imaginer l’ampleur des travaux encore à réaliser pour mettre au jour l’ensemble des installations.
Assurément un site à visiter, guidés bien sûr !
Ensuite, retour en collectivo sur Trujillo pour mettre le cap sur Huanchaco, une cité balnéaire qui offre le charme de l’océan pacifique et de ses « Caballitos de totora ».
Le coucher du soleil est splendide.
Dîner chez « My friend », un repas de poisson of course.
Le décalage horaire n’est pas encore très bien assimilé, bonne nuit !
Le petit déj avalé après une bonne nuit passée à l’Hostal Porta, en route pour le Pacifique et ses surfeurs. En bord d’océan, les cours se donnent entre les stands de matériel. Quant aux voitures, elles assurent le transport des planches !
Retour sur la Costa Verde, en haut de la falaise, grâce à des passerelles très bien aménagées pour franchir les 2 x 3 voies où les véhicules roulent vite et bruyamment.
Là-haut, c’est un quartier en plein développement. Les constructions y poussent comme des champignons. À chacune son style, toutes rivalisent de modernisme. En pied d’immeubles se déploient des espaces verts qui font le plaisir des petits et des grands, on s’y repose, on y fait du sport.
Ça sera une pause gourmande pour nous au Buena Vista Café. Même s’il fait gris, la température y est très agréable. Nous retrouvons la saveur de l’avocat, un pur régal.
On est surpris par le panel d’oeuvres d’art qui s’égrènent tout au long des espaces verts, de quoi alimenter ma #lundioeuvredart au retour !
Celles de Gaudi bordent le chemin du Parc de l’Amour...
et accompagnent joliment « El beso » de l’artiste péruvien Victor DELFIN.
Les deltaplanes prennent leur élan au Parc Raimondi.
Passage au Parc Kennedy et visite du Marché de Surquillo, de l’autre côté du périphérique !
Retour à l’hôtel où nous retrouvons notre conducteur de taxi, direction av Javier Prado pour le terminal de la compagnie Cruz del Sur. Nous partons ce soir pour Trujillo en voyage de nuit.
Et bien, voilà, le voyage que l’on programmait depuis un an , c’est-à-dire depuis notre retour du Pérou l’année dernière, se profile.
Après un passage éclair à Paris, direction Roissy Charles de Gaulle pour s’envoler à destination de Lima.
Cette année, pas de retard, ni de retour sur Paris après une heure de vol, arrivée dans la capitale Péruvienne à 16h heure locale, il est 23h en France.
Nous voyageons de jour et profitons de vues splendide en quittant les côtes françaises !
Parce qu’un livre n’est jamais loin, j’ai choisi d’emmener avec moi celui reçu de Rakuten pour les #mrl2018 « Miss Sarajevo » d’Ingrid Thobois, un bijou.
Les bagages sont tous là. Avouez que c’est toujours avec un petit pincement au cœur que vous voyez vos voisins soulagés de découvrir leur valise sur le tapis roulant jusqu’au moment où... mais, oui, les vôtres aussi sont là !
Notre taxi nous attend. Si vous voyagez, profitez de ce service en général très facile à organiser avec votre hôtel. Le premier contact en terre étrangère donne un peu le ton du séjour !
Nous avons fait la conversation avec Julio, en espagnol bien sûr. Il faut bien se jeter à l’eau !
Très bon accueil à l’Hostal Porta et puis direction Larcomar, une grande galerie aux enseignes internationales. Pas de quoi se dépayser mais juste de quoi permettre à notre intestin de s’acclimater !
Retour à l’hôtel pour dormir. Ça fait 24 heures que nous sommes debout !
Ce document fait partie de la sélection de novembre du 50ème Grand Prix des Lectrices Elle. Après l'univers de la justice avec "Même les monstres" de Thierry ILLOUZ, place à Lampeduza et ses vagues de migration avec "La Loi de la mer" de Davide ENIA.
L'auteur et dramaturge a mené l'enquête sur cette île qui fait la une de l'actualité depuis plusieurs années. Située entre l'Afrique et l'Europe, elle se trouve sur l'itinéraire maritime de tous ces migrants en quête d'une terre plus hospitalière. A bord d'embarcations de fortune, des centaines d'hommes, de femmes, d'enfants, tentent leur dernière chance, malheureusement, à chaque voyage, ce sont des dizaines, voire la quasi totalité des individus qui périront.
Il y a bien des bénévoles qui font ce qu'ils peuvent pour leur porter secours dans une mer parfois déchaînée, mais la tragédie humaine se poursuit devant l'impuissance générale. Les migrants meurent noyés dans des conditions effroyables, ils sont trop nombreux pour avoir une tombe et des funérailles dignes de tout être humain, leurs corps sont enlaidis par la mer, grignotés par les poissons, gonflés par l'eau.
Le corps est un journal intime où se lisent les événements des derniers jours de la vie. 60
Sur terre, le lecteur fait connaissance avec Paola, une ancienne avocate, et son compagnon, Melo, ils y gèrent une maison d'hôtes. Pour eux, leur existence n'a de sens que par la voie de la solidarité. Leur vie a eux est ponctuée de rencontres, fortuites, temporaires, profondément humaines.
Une phrase gentille, une poignée de main, une oreille qui écoute le trop-plein qui s’y déverse. C’est de cette façon-là aussi qu’on guérit. P. 136
J'ai été profondément touchée par ces êtres qui s'expatrient par centaines, par milliers, que dis-je, par... comment imaginer que chaque jour l'océan engloutisse ou rejette, selon les cas, des corps en nombre aussi conséquents. Jamais l'expression "une goutte dans l'océan" n'a eu autant de sens. Je sors de cette lecture en colère après les politiques, comment imaginer que ces drames humains perdurent depuis autant d'années ? Je suis profondément indignée aussi du sort réservé à celles et ceux qui fuient leur pays d'origine et qui n'ont plus d'espoir que dans cette traversée, aussi incertaine soit-elle.
Cette Histoire contemporaine, bien réelle, pourrait nous paraître loin de nous mais c'est sans compter sur le talent de Davide ENIA de la mettre en parallèle avec la mort annoncée de l'oncle Beppe, malade d'un cancer. D'un coup, on passe du collectif à l'individuel et là, la prise de conscience est décuplée.
La plume de Davide ENIA, et la traduction proposée par Françoise BRUN, sont assourdissantes. Elles décrivent de façon presque journalistique les événements qui se suivent et malheureusement se ressemblent, elles donnent la voix à des habitants de l'île totalement dépassés par le nombre. Qu'ils s'agisse de ceux qui s'investissent pour porter secours ou des autres qui ferment leur porte pour se protéger eux-mêmes de l'invasion, l'auteur a le mérite d'assurer la traçabilité des propos. C'est beaucoup, et c'est bien peu...
Retrouvez toutes mes lectures dans le cadre du Grand Prix des Lectrices Elle 2019 :
Ma #lundioeuvredart est cette sculpture monumentale découverte à Venise lors de mon séjour en 2017.
En Marbre de Carrare, et donc d'une blancheur remarquable, elle est le fruit du travail de Damien Steven HIRST (965), artiste et collectionneur anglais. Il fait partie du groupe "Young British Artists" (or YBAs).
Cette sculpture est sublimée par l'écrin que lui offre la ville italienne, un joyau.
Ce roman fait partie de la sélection de novembre du 50ème Grand Prix des Lectrices Elle. Autant vous l'avouer dès maintenant, c'est un coup de coeur.
Ce livre m'a profondément bouleversée.
Je vous dis quelques mots de l'histoire.
Nous sommes dans les années 1950 à Reykjavik en Islande. Helga a 19 ans, Sigvaldi 30. Ils vivent le parfait amour. Ils ont une enfant de 7 mois. Une nouvelle grossesse se profile. Ils cherchent un prénom pour le bébé à venir, une autre fille. En mémoire d'une lecture qu'ils avaient partagée, « Gens indépendants » de Halldór LAXNESS (Prix Nobel de littérature), et qui les avait beaucoup émus, ils choisissent Ásta. A une lettre près, le prénom de la fillette aurait signifié "amour", mais voilà, cette lettre va faire toute la différence ! La grossesse d'Helga est marquée par ses crises de nerfs, un peu comme si la maternité faisait resurgir le passé et tourmentait les âmes par des souvenirs douloureux. Avec la naissance, les sentiments s'apaisent malgré une vie de famille chahutée par une économie en perte de vitesse. Sigvaldi est contraint d'exercer deux métiers pour permettre à sa femme et ses enfants de vivre. Il est marin. Il est peintre en bâtiment aussi, il a monté son entreprise avec un associé. D'ailleurs, un jour il tombe d'une échelle. Un peu sonné, il se remémore les bons moments de son existence. Il culpabilise aussi. S'il n'avait pas été un bon père pour sa fille...
Ce roman d'apprentissage est absolument EXTRAordinaire.
Dès la première page, j'ai été totalement happée par le tourbillon des destins qui se croisent, se lient, se délient, se relient, perturbés qu’ils sont, comme le climat islandais. Il y est question d'amour, de passion, l'incandescente, celle qui brûle, enflamme, et s'éteint pour ne plus laisser derrière elle que quelques cendres. Mais c'est sans compter, parfois, sur un léger souffle qui suffit à rallumer le tison que l'on croyait à jamais disparu. Jón Kalman STEFANSSON illustre parfaitement la fureur de la passion amoureuse, les hauts, très hauts, et les bas, très bas. Il n'y a pas de demi-mesure, juste l'immense sensation d'exister.
Avoir hâte. Surtout quand il s’agit de retrouver une personne qui vous est chère. Alors, on se sent vivant. P. 217
Dans ce roman dont la construction narrative est exceptionnelle émerge un certain rapport au temps. Il y a d'abord celui qui prend appui sur les deux générations de couples, Helga et Sigvaldi d'une part, Ásta et Josef d'autre part. Mais il y aussi celui qui se déploie au rythme des sentiments, tantôt il y a urgence à vivre, assouvir sa passion, chaque minute, chaque heure compte, tantôt les mois, les années, s'étirent inlassablement.
Nous avons tant à faire que parfois, on dirait que notre existence va plus vite que la vie elle-même. P. 42
Enfin, j'ai été profondément touchée par cette espèce de déterminisme dans les générations de femmes, un peu comme si, avec la filiation, elles se transmettaient une partie de leur histoire qui se répéterait indéfiniment. J'avais déjà mesuré cette fragilité dans le roman de Lenka HORNAKOVA-CIVADE et ses "Giboulées de soleil".
Mais là, sous la plume de Jón Kalman STEFANSSON, la tragédie devient une fatalité, emportant tout sur son passage, y compris la raison. L'histoire d'Ásta est ponctuée par des périodes de profonde dépression, certaines réalités sont trop lourdes à porter.
L’ignorance vous rend libre alors que la connaissance vous emprisonne dans la toile de la responsabilité. P. 264
L’exercice littéraire est époustouflant dans la maîtrise des scénarios. Ce roman fait un peu plus de 490 pages, j'aurais aimé qu'il en fasse 100, 200, 300 de plus, totalement habitée que j'ai été par le personnage d'Ásta.
A saluer également la qualité de la traduction proposée par Eric BOURY, juste prodigieuse !
Ásta fait partie des INCONTOURNABLES de cette rentrée littéraire.
Retrouvez toutes mes lectures dans le cadre du Grand Prix des Lectrices Elle 2019 :
Ce roman fait partie de la sélection de novembre du 50ème Grand Prix des Lectrices Elle. Je vous dis quelques mots de l'histoire.
Nous sommes en hiver, à Brooklyn aux Etats-Unis. Jim a 32 ans, il est marié depuis deux ans avec Annie, enceinte. Il envoie Annie faire les courses et pendant ce temps-là, prépare son suicide au gaz domestique. Cheminot, il avait été renvoyé une quinzaine de jours plus tôt pour manque de fiabilité et insubordination. Il n'a pas supporter cette humiliation. La nouvelle a fait grand bruit dans le quartier et alerté la communauté des nonnes voisines. Soeur Saint-Sauveur prend le relais des pompiers au chevet de la jeune femme, veuve, et assure l'organisation des funérailles. Annie est hébergée par la communauté qui va offrir un cadre de vie à la petite Sally, sa fille. Pour toutes les deux, la vie prend un tournant insoupçonné.
Je ne connaissais pas encore la plume d'Alice McDERMOTT, ni le talent de traductrice d'Alice ARNAUD, me voilà comblée par leur duo littéraire.
Ce roman dresse le portrait d'une communauté religieuse empreinte de solidarité, générosité et bienveillance. Elle porte secours aux plus défavorisés et offre ainsi un tout nouveau foyer à la jeune femme douloureusement affectée par le décès de son mari. La communauté lui assure un toit et le couvert mais elle va plus loin en conférant à la jeune femme une véritable utilité sociale. Elle lui permet de se (re)construire et de trouver une place dans la société religieuse telle qu'elle est organisée, hiérarchisée, rythmée par la prière et la réalisation des services communs. Annie va trouver du réconfort dans cette famille religieuse et établir une complicité avec les femmes qui l'entourent.
J'ai beaucoup apprécié l'approche moderne et ouverte de cette communauté religieuse. Le tableau est élogieux, il est audacieux aussi. Ecrire au XXIème sur la religion catholique aurait pu paraître dépassé, obsolète, démodé et archaïque. Il n'en est rien.
J'ai été aussi particulièrement séduite par le parcours de la petite Sally, qui, devenue adulte, va imaginer que la voie de la religion soit aussi faite pour elle, mais l'abnégation ne s'improvise pas.
Prononcer ses vœux signifiait laisser tout le reste derrière soi : la jeunesse, la famille et les amis, tout l’amour qui n’était qu’individuel, tout ce qui dans l’existence nécessitait un regard en arrière. P. 53
Malgré une éducation nourrie par la charité, il n'en demeure pas moins que chaque individu a sa manière de percevoir la pauvreté et la souffrance physique, une sensibilité singulière. Les valeurs transmises par la communauté ne sont pas le gage d'une vocation et c'est en cela que le roman est intéressant et original. Le projet littéraire de l'auteure est loin de servir un idéal religieux qui serait exclusif. Ceux qui croient que les ouailles sont des moutons de Panurge seront largement démentis avec "La neuvième heure".
Le style narratif y est remarquable, le texte est tout en beauté, poétique, sensitif, éminemment romanesque. Alice McDERMOTT maîtrise l'art de la description à merveille et séduit le lecteur avec cette composition profondément intimiste.
Si vous aimez la plume de Tracy CHEVALIER, assurément vous apprécierez celle d'Alice McDERMOTT.
Retrouvez toutes mes lectures dans le cadre du Grand Prix des Lectrices Elle 2019 :
Et si la pièce de théâtre de Shakespeare "Richard III" écrite au XVIème siècle nous aidait à comprendre les événements de l'hiver 1978-1979, c'est le pari que prend Thomas B. REVERDY dans son tout dernier roman "L'hiver du mécontentement" publié chez Flammarion.
Le pari était audacieux, il est gagné. La convocation des arts de la scène vient pimenter une actualité britannique chahutée par les grèves des ouvriers et instrumentalisée par la campagne électorale de Margaret Thatcher.
Ma #citationdujeudi est extraite peut-être du futur Goncourt 2018, et oui, il fait partie de la première sélection, ça mérite de s'y attarder, non ?
Ce document fait partie de la sélection de novembre du 50ème Grand Prix des Lectrices Elle. Il sort aujourd'hui en librairie.
Thierry ILLOUZ, avocat nous livre l'histoire de sa vie, de sa vocation pour la défense de "monstres", que dis-je, d'êtres humains qui, un jour, ont commis l'irréparable.
L'auteur déroule le fil de son existence depuis le déracinement de sa terre natale. Il n'avait qu'un an quand sa famille a décidé de s'exiler pour le protéger, lui. Il a été élevé en France avec son frère, en Picardie. Son père était policier, il incarnait la loi et tenait à la faire respecter, chez lui, nulle place à l'humain, la faille, la faiblesse, la fragilité. De là à imaginer que Thierry ILLOUZ y ait puisé les sources de sa vocation, il n'y a qu'un pas, un virage à 180° des principes inculqués par son père comme un acte de résistance, de rebellion.
Mais il n'y a pas qu'à l'égard de son père qu'il a souhaité prendre sa revanche, non, il y a aussi quelque chose qui relève de l'amertume à l'encontre d'une société qui ghétoïse les rapatriés d'Algérie dans des quartiers populaires, des zones urbaines sensibles. L'enfant timide qu'il était aurait pu s'identifier aux jeunes de son quartier, adopter leur mode de vie et de subsistance, mais c'est sans compter sur son rejet du stéréotype de l'immigré coupable de tous les maux.
Je crois que nous ne décidons que de cette manière, par les visages, par le mélange, par les lieux, les mots entendus, les regards qu’on a portés sur nous. P. 20
Alors, il va tracer sa voie, se former au métier d'avocat et décider du public qu'il servira. Il sera le défenseur de ceux qui sont dans le box des accusés. Bien sûr, il y a les victimes pour lesquelles il ressent un profond respect mais sa place n'est pas là. Non, lui veut comprendre ces hommes et ces femmes qui, à un moment de leur vie, basculent.
Thierry ILLOUZ va, tout au long du document, égrener les définitions qui sont les siennes du verbe défendre.
Il va mettre la focale d'abord sur la nécessité de dire, d'exprimer, de formuler, d'exposer les faits reprochés. Nulle intention de sa part de les cacher :
Défendre, ce n’est pas masquer mais dévoiler. P. 47
Et puis, il y a cette volonté qui l'a toujours animée, celle de comprendre. Qu'est ce qui fait qu'un jour, un homme, une femme, soit pris d'un sursaut de violence au point de commettre des faits totalement inimaginables pour un être raisonnable ? Dans chaque individu qu'il est amené à défendre, il cherche ce qui a pu justifier son action.
Défendre, c’est comprendre ce qui se trouve derrière les gestes, derrière les comportements [...] P. 52
Lui-même sait ô combien son itinéraire aurait pu être différent si... et pourtant, il a choisi de porter la robe et de servir celles et ceux qui sont considérés comme des "monstres" aux yeux du commun des mortels. Le propos de Thierry ILLOUZ est profondément humaniste. Celles et ceux qu'il défend sont faits de chair et d'os, ce sont nos semblables, ni plus ni moins. Il nous incite à les considérer tout simplement, les reconnaître comme des hommes et des femmes, ce qu'ils n'ont jamais cessé d'être.
Enfin, il s'attache à la notion du mal et au risque trop grand de se voir considéré, lui, l'avocat, par la société tout entière, comme la caution de ce qui a été commis.
Défendre n’est pas épouser le mal, ni la faute, ni le crime, jamais. Défendre, c’est ôter au mal toute chance d’être le mal, c’est-à-dire une idée réfractaire à toute compréhension, à toute histoire. P. 101
Thierry ILLOUZ attire l'attention du lecteur sur les travers d'une justice aujourd'hui hyper-médiatisée, une justice qui tend de plus en plus à être prononcée non pas par des "hommes de loi" mais par la société civile, avide qu'elle est de la presse à scandale. Mathieu MENEGAUX l'avait illustrée dans "Est-ce ainsi que les hommes jugent ?" mais il s'agissait d'une fiction. Là, le propos prend son ancrage dans une réalité qu'il dénonce.
L'écrivain nous livre une véritable plaidoirie. Il y a les faits et puis, les droits des accusés, et enfin, leurs prétentions. Thierry ILLOUZ, dans un exercice littéraire, signe un acte militant en faveur de celles et ceux sur qui nous devons oser porter le regard, une véritable leçon de vie qui prend appui sur la bienveillance, l'indulgence, l'écoute, la disponibilité, la compréhension. Homme de loi, Thierry ILLOUZ est aussi un homme de lettres. Ecrivain et dramaturge, il use d'une plume franche, sincère, droite et loyale, pour servir la cause des stigmatisés, des relégués...
Même si ce qui est dénoncé a déjà pu être dit, écrit, "Même les monstres" a la force de la personnalisation, de quoi nous offrir quelques moments de méditation.
Retrouvez toutes mes lectures dans le cadre du Grand Prix des Lectrices Elle 2019 :
Ce roman fait partie de la sélection de novembre du 50ème Grand Prix des Lectrices Elle.
Je vous dis quelques mots de l'histoire :
Un vieil homme, hébergé en maison de retraite, est hanté par des images de Magdalena, une femme dont il a été passionnément amoureux, avec qui il a passé trois années de sa vie et sur qui il a écrit un livre. Il se lève, va à la fenêtre, voit Magdalena qui l'invite à le suivre. Nous sommes à Stockholm, il fait froid, le paysage est enneigé, le vieil homme a quitté sa chambre précipitamment, tout endimanché pour séduire sa belle, il en a oublié sa canne. Elle est encore jeune, lui, a dû mal à se déplacer. Et puis, il y a ce rendez-vous dans un cimetière de la ville. L'homme veut lui raconter une histoire, à Magdalena, à moins que ça ne soit Lena, une femme qui lui ressemble à s'y méprendre.
Je dois l'avouer, je ne connaissais pas l'univers de Peter STAMM avant cette lecture, je m'y suis plongée à m'en délecter.
Ce roman évoque la rupture amoureuse et le sentiment d'abandon qui meurtrit l'âme et le corps, l'absence de l'être cher qui avec le temps et l'âge se voit fantasmé. Le narrateur est profondément nostalgique de cette passion partagée avec Magdalena, comédienne. Il se souvient de ces moments de bonheur, portés qu'ils étaient par l'ardeur de leur relation. J'ai été profondément touchée par les empreintes laissées à jamais par l'être aimé :
C’était peut-être pour ça que je m’y sentais bien, ma vie aussi était une pièce vide où seules les ombres sur les murs révélaient qu’elle avait été habitée un jour. P. 92
L'auteur choisit la voie de la métaphore pour aborder les traumatismes psychiques de l'être délaissé, la mélancolie, le chagrin et l'isolement.
A l'époque de la rupture, le narrateur avait déjà l'idée d'écrire un livre et de faire de sa compagne un personnage de roman. Entre fiction et réalité, le personnage a sombré. C'était il y a 16 ans et déjà, le trouble était semé dans l'esprit du narrateur, épris d'une femme dont il ne réussissait plus à mesurer les contours.
En réalité j’avais peur que Magdalena me redevienne étrangère, que le personnage fictif puisse définitivement prendre le pas sur le personnage réel. P. 64
Le mal n'a fait que s'aggraver avec le temps pour laisser place à une nouvelle forme de confusion. Au gré des conversations du narrateur avec Magda(Lena), Peter STAMM nous livre les fragments d'une vie. Il suffit d'un mot, d'une image, pour que les souvenirs ressurgissent et qu'ils donnent lieu à un conte. L'auteur explore la capacité du cerveau à mémoriser dans le détail des instants qui devront inoubliables, ou presque.
Et si cette histoire se conjuguait aussi au présent ? Lena et Chris ne suivent-ils pas à quelques écarts près le même itinéraire ? Leurs existences ne sont-elles pas marquées par les mêmes lieux ? Et si ces coïncidences qui paraissent fortuites étaient en réalité au service d'un destin tout tracé ? Peter STAMM donne ainsi au roman une portée philosophique et pose la question de notre liberté. Sommes-nous responsables de nos actes ou bien les marionnettes d'un être supérieur qui orchestrerait nos vies jusqu'à décider de la date de notre mort ?
Dans un registre onirique, Peter STAMM montre son immense talent narratif. L'énigme est entretenue jusqu'à la toute dernière page, la plume est sensuelle et délicate, le jeu de l'écriture est parfaitement maîtrisé, le lecteur est sous tension.
Je me suis littéralement laissée porter par cette histoire, nul doute qu'elle va me poursuivre encore longtemps !