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2019-08-22T06:00:00+02:00

Rien n'est noir de Claire BEREST

Publié par Tlivres
Rien n'est noir de Claire BEREST

Stock

 

Claire BEREST, avec son tout nouveau roman, nous emmène à la rencontre de Frida KAHLO, un portrait tout à fait saisissant d’une grande Dame de la peinture.

 

Nous sommes en 1928. Alors que l’artiste Diego RIVERA réalise une fresque murale monumentale pour le Ministère de l'Education, Frida, l’effrontée de 20 ans sa cadette, l’interpelle et lui demande de descendre de son échafaudage pour lui montrer quelque chose. Elle a, avec elle, deux tableaux. Elle veut son avis. Il lui donne rendez-vous le dimanche suivant avec une nouvelle toile. C’est ainsi qu’une relation passionnelle va s’engager entre deux personnages hauts en couleur : Diego RIVERA dont la qualité du travail artistique va grandissante, Frida KAHLO promise dès son plus jeune âge à un parcours atypique (à 15 ans, elle fait partie des premières filles à entrer à la Prépa) et ambitieux (passionnée d’anatomie et de biologie, elle veut être médecin). C’est à 18 ans que Frida KAHLO a un terrible accident de bus avec de multiples blessures qui la clouent à un lit d’hôpital pendant 3 mois et l’obligent à une nouvelle intervention chirurgicale l’année suivante. C’est alors que Frida demande à son père, allemand d’origine, photographe de formation, passionné de piano, de lui apporter un chevalet, des pinceaux et de la peinture. Grâce à l’installation judicieuse d’un miroir au sommet de son lit à baldaquin, Frida commence à peindre, bien qu’alitée. Une nouvelle page de sa vie s’ouvre alors...

 

Claire BEREST, c’est avant tout une rencontre. J’ai eu l’immense chance de participer le samedi 29 juin dernier à Paris à la présentation de la rentrée littéraire des éditions Stock et d’assister à un exposé de fougueux, passionné et passionnant, de l’écrivaine. A travers sa manière, très personnelle, de révéler Frida KAHLO, je me suis retrouvée dans un tourbillon de couleurs, de sentiments, à partager l’intimité d’une artiste mexicaine EXTRAordinaire. Au final, je ne sais plus très bien qui est la plus enflammée des deux, Claire BEREST ou Frida KAHLO, les deux certainement !

 

Quant au roman, il s’inscrit dans la droite ligne de ce moment tellement enthousiasmant.

 

D’abord, il traite de la vie de deux artistes peintres nés à la fin du XIXème et au début du XXème siècle, au moment même où, au Mexique, un mouvement historique de vulgarisation de l’art est lancé par le Ministre de l’Education, Vasconcelos, qui veut rendre la culture accessible à tous.


La peinture est devenue monumentale, accessible et édifiante, elle donne aux analphabètes le droit de lire leur histoire nationale, aux pauvres, le droit de vibrer gratis, à tous, leurs racines indiennes sublimées. P. 31

C’est à cette période que les murs se parent de fresques monumentales, Diego RIVERA est au rendez-vous, il intervient notamment sur l’amphithéâtre Bolívar de Mexico. De nouvelles opportunités s’ouvrent à lui, à l’international. Rockfeller en personne lui commande une oeuvre pour le RCA Building de New-York. Quand on sait que Diego RIVERA était communiste...  

 

Avec « Rien n’est noir », vous plongez au coeur de l’Histoire du Mexique et du streetart qui se distingue encore aujourd’hui. Vous visitez aussi le monde et côtoyez les hommes, capitalistes, en quête de montrer ô combien leur pouvoir est grand.

 

C’est aussi une histoire d’amour, ardente, bouillonnante, impétueuse, entre deux artistes, mais aussi deux personnalités totalement débridées. Rien ne saurait les arrêter ! Diego RIVERA ose faire un pied de nez au commanditaire de l’oeuvre du RCA Building en y ajoutant effrontément une figure de Lénine comme la touche finale d’une création artistique devenue militante. Le ton est donné. Vous imaginez bien que la vie de ces deux-là ne va pas être un long fleuve tranquille. Ils vont s’aimer passionnément, se haïr aussi ! A leur séparation, Frida KAHLO s’offre tous les hommes qu’elle peut, ils subliment tous Diego RIVERA dans ce qu’ils ont de faible, fragile, et elle en jouit.

 

J’ai adoré découvrir Frida KAHLO seule aussi. Elle est flamboyante et multiplie les symboles qui me ravissent. Rien n’est laissé au hasard. Elle s’habille avec des robes très colorées venues de l’isthme de Tehuantepec, une région du Mexique où les femmes sont les chefs de famille. A travers cette culture matriarcale qu’elle honore, elle contribue à véhiculer un message d’anticipation des femmes. Et des femmes, prodigieuses, elle va en rencontrer, à commencer par Lucienne Bloch, assistante de Diego RIVERA, fille du chef d’orchestre Ernest BLOCH, avec laquelle va s’instaurer une grande complicité en lien avec leurs deux pères photographes. Elle va aussi se délecter des plaisirs qu’offre Paris au bras de Jacqueline BRETON, l’épouse de l’écrivain. Elle va rencontrer Dora Maar, la compagne de PICASSO, elle-même peintre, photographe, poète. Frida KAHLO poursuit un rythme frénétique de création artistique, elle peint comme elle respire. Loin d’elle l’idée d’analyser son propre travail, elle s’en étonne quand des critiques s’y attellent. 


Peindre est une facette d’elle-même parmi d’autres, un trait de sa personnalité, comme de jurer constamment, de collectionner les poupées ou de se méfier des gens qui se prennent au sérieux. P. 209

« Rien n’est noir » est une très belle opportunité de prendre connaissance des toiles peintes par Frida KAHLO, personnellement j’ai un faible pour « La Colonne brisée » réalisée en 1944.

 

Ce roman est un coup de coeur à plus d’un titre.

 

Il y a le fond bien sûr. À travers l’itinéraire d’une femme éminemment romanesque, Claire BEREST égrène, comme autant de bijoux dont se pare Frida KAHLO, des souvenirs historiques qui font que le monde est ce qu’il est aujourd’hui. Elle honore aussi la mémoire d’une grande Dame de la peinture.

 

Il y a la forme aussi. Claire BEREST intitule ses chapitres des couleurs primaires utilisées par Frida KAHLO. Mais l’écrivaine qui, comme son icône, a le souci du détail, va plus loin en donnant systématiquement la signification de la nuance évoquée, initiant ainsi le lecteur au symbolisme des couleurs, les associations mentales, les fonctions sociales et les valeurs morales qui y sont liées.

 

La narration est foisonnante, à l’image de la vie de l’artiste célébrée. Elle est poétique aussi :


La peinture c’est un lieu sur la mappemonde de son caractère. P. 209

Claire BEREST maintient un rythme ahurissant qui donne à cette lecture une vivacité et un dynamisme absolument remarquables. J’en suis sortie envoûtée, et aussi sans voix. Je me sens déjà orpheline de la lumineuse Frida KAHLO et me prends à rêver de la vie qu’elle aurait pu mener s’il n’y avait eu l’Accident !

Quant à la plume de l’auteure, j’ai maintenant une furieuse envie d’aller plus loin. Vous me conseillez "Gabrièle" ?

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