Éditeur : ALBIN MICHEL (2016)
Ce roman, je l'ai lu dans le cadre de la sélection des 68 premières fois.
Aurélien GOUGAUD nous fait partager le quotidien d'un homme et d'une femme d'aujourd'hui. Elle travaille dans une radio, Elle assure le créneau de la matinale. Elle est chargée e l'animation des jeux. Depuis quelques temps, Elle ne va plus au travail avec le même enthousiasme. Tout sonne faux, à commencer par les auditeurs à qui l'on fait porter un costume revisité. Si quelques situations graves pouvaient être évoquées, ça serait bien pour stimuler l'émotion de ceux qui écoutent ! Dans ses relations personnelles, ça n'est pas beaucoup mieux. Les liens d'amitié avec Jade résonnent comme une fausse complicité. Un matin, son regard reste posé sur l'écran éteint de son ordinateur. Une remarque de son chef et tout vole en éclats. Elle démissionne. Lui, il travaille à la Défense, ce haut lieu de la Finance où les cadres supérieurs arrivent tous à la même heure le matin, tous avec les mêmes vêtements des mêmes marques. Aucune personnalité dans cet univers stéréotypé à l'envi. Il passe ses journées à escroquer des vieux, public vulnérable par excellence. Il leur vend de faux contrats. Tout commence avec un appel téléphonique, et puis, pour concrétiser l'affaire, se poursuit avec une visite à domicile ! C'est quitte ou double, soit une évacuation manu militari avec menace d'appeler la Police, soit la signature du contrat !
Ces deux-là n'avaient pas a priori grand chose à voir ensemble côté travail j'entends. Mais, il y a une vie en dehors du travail ! Et quand on vit à Paris, que l'on est seul, que l'on a envie de rencontrer quelqu'un avec qui partager sa peine, on fréquente les bars. C'est là qu'Elle et Lui vont se croiser, boire un verre, échanger quelques mots. Mais le compte à rebours est lancé, Elle a décidé de quitter la France et de s'envoler pour l'Australie, histoire de s'offrir une parenthèse.
Aurélien GOUGAUD va construire son roman sur les 7 derniers jours qui leur restent à vivre, ensemble peut-être... procédé ingénieux pour permettre un regard croisé sur la société, celui d'une femme et celui d'un homme, la parité est respectée !
Lire Lithium avant de prendre le métro parisien, c'est être assuré d'ouvrir les yeux sur des réalités autres que la sienne, c'est porter une attention différente aux autres. Derrière chaque femme se cache peut-être Elle, et chaque homme Lui. Tous ces gens que l'on côtoie le temps d'un trajet ne sont peut-être que des Elle et Lui... J'avoue que je ressens un profond malaise dans ce transport en commun. Alors quand un homme monte dans la rame pour faire part à l'ensemble des voyageurs de son parcours et de sa misère... mon coeur se soulève. C'est le double effet d'une lecture : il y a celui immédiat qui se nourrit des mots survolés, et puis celui qui va nous émouvoir, nous perturber, nous faire évoluer dans le temps. Je crois bien puiser là ma passion de la littérature !
Lithium appréhende la dimension sociale du travail.
C'est tout son être qui est remis en question. On est ce que l'on fait. Au pire, ce que l'on souhaite faire. P. 67
Dire, il y a une vie en dehors du travail, c'est ce que l'on entend régulièrement, dans le monde du travail toutefois. N'est-ce pas l'apanage seulement de ceux qui ont un emploi ? De ceux qui ont une vie rythmée par les contraintes notamment horaires de leur travail ? Et les autres ?
Comment bénéficier d'une reconnaissance sociale quand vous n'avez pas de travail ? Comment palier ce manque pour exister ? Aurélien GOUGAUD nous trace une voie :
La question n'est pas d'élever sa conscience mais d'accroître sa présence, de se démarquer suffisamment pour ne pas vivre dans l'ombre des autres. P. 160
Ce roman pose un regard sans concession sur notre société d'aujourd'hui, un regard terrifiant sur la solitude, l'isolement, la condition humaine... alors, comment sortir de ce marasme ?
Il y a finalement 2 alternatives, soit accepter son destin, le subir aussi, comme Lui, soit prendre les choses en main, décider de donner à son avenir une nouvelle trajectoire, lui offrir de nouveaux horizons comme Elle. Personnellement, je choisis la deuxième solution. Alors, on s'envole pour l'Australie ?
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