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Articles avec #vendredilecture catégorie

2025-05-09T13:17:20+02:00

L'Appelé de Guillaume VIRY

Publié par Tlivres
L'Appelé de Guillaume VIRY
 
Et de 3... dans ce bal des 68 Premières fois. Je vous propose quelques notes d'Edwin STARR pour l'occasion, c'est vrai, "War (What is it good for)."
 
La sélection est éclectique. Place à un roman historique, "L'Appelé" de Guillaume Viry, un court roman dont les mots résonnent comme les balles tirées en Algérie. C'est là que Jean sera appelé en 1962, la dernière année de la guerre d'indépendance d'un territoire colonisé par la France en 1830. Nous sommes en 1969 quand commence le roman avec une scène d'hôpital, d'un asile en réalité, de ceux qui pratiquaient à l'époque les électrochocs. De cette première scène émergent les traumatismes de la grande Histoire...
 
Parce que lire sur la guerre d'Algérie n'a jamais été aussi nécessaire. Il suffit pour s'en convaincre de lire dans les actualités de ce début d'année 2025 les tensions entre la France et l'Algérie, le colonisateur et la colonisée-décolonisée, des statuts qui laissent des traces à jamais et qui se transmettent de génération en génération. Quelle ingénieuse idée d'ailleurs de l'auteur de déclencher les recherches avec une erreur de prénom pour remonter le fil d'une histoire comme tant d'autres sont tombées dans l'oubli, à moins d'un déni encore plus abject.
 
Guillaume VIRY nous livre un long poème, en prose. Dès la première page vous serez happés par la forme du texte, la rhétorique. C'est à la fois troublant et fascinant, troublant parce qu'exigeant, fascinant par l'onde de choc.
 
Ce qui m'a profondément touchée, une nouvelle fois j'oserai dire, c'est l'absence de connaissances des faits de guerre et de leurs conséquences sur les êtres, des hommes qui n'en ont pas encore assez souffert et se retrouveront sous la main mise d'autres tyrans. Je sors lessivée de cette lecture, ma #VendrediLecture.

Retrouvez toutes les références de ce bal 2025 des 68 Premières fois, édition 2025 : 

Je suis fait de leur absence de Tim DUP

Ecouter les sirènes de Fabrice MELQUIOT

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2025-04-25T07:56:37+02:00

L'œil de la perdrix de Christian ASTOLFI

Publié par Tlivres
L'œil de la perdrix de Christian ASTOLFI
 
Nouvelle bonne pioche du Book club, le dernier roman de Christian ASTOLFI, L'œil de la perdrix, un roman historique à plus d'un titre.
 
Rose est une femme née au début du XXe siècle en Haute Corse, mariée à 16 ans à un berger de l'île, Paul-Dominique. Avec cet homme, elle aura trois enfants, deux garçons et une fille. Quand la petite dernière aura 6 mois, la famille quittera Bastia pour s'installer à Toulon, c'est à l'arsenal que son mari travaillera une trentaine d'années. En frontière de leur quartier, est installé un bidonville. Les deux communautés sont voisines mais ne se fréquentent pas. Rose fera pourtant connaissance avec Farida. À partir de cet instant, elles ne se quitteront plus ou presque. Avec cette relation d'amitié, affaire de sororité, de nouveaux horizons s'offriront aux deux femmes. Il souffle sur leur destinée un brin d'émancipation !
 
Ce roman historique, foisonnant, à l'échelle de 80 ans environ, invite le lecteur à regarder le monde à travers le filtre des invisibles.
 
Il y a d'abord la condition féminine du début du siècle dernier, une premier exemple de soumission, des femmes au foyer qui s'occupent de préparer les repas de leur mari et de leurs enfants, qui s'évertuent à servir les autres sans jamais demander la moindre reconnaissance. Le modèle semble se perpétuer à l'envi...


Paul-Dominique n'était pas si différent. Indulgent envers lui-même tout autant qu'à l'égard de nos fils. Incapable d'écrire une autre histoire familiale que celle que les maris et les pères du village lui avaient transmise. P. 96

Il y a encore celui des exilés d'Algérie, des hommes, des femmes, des enfants, tous français, nés sur une terre colonisée, dont la guerre d'indépendance les poussera à quitter leur terre, celle de leurs origines, pour vivre entre des planches, abrités par quelques tôles. Si beaucoup de romans abordent désormais cette période, Christian ASTOLFI décide, lui, de prendre le parti de relater ce qui se passe en métropole histoire de ne pas oublier les conditions dans lesquelles ils furent parqués. 
 
Entre invisibles, une certaine forme de solidarité peut se développer à l'image de ce parcours de vie mené en commun par Rose et Farida. Toutes deux se retrouveront autour des mots...


Puis, j ai levé les yeux vers elle. Découvert son regard baigné de confiance. Si différent de ceux qui m'avaient toujours avilie. Ce froid qu'il y avait sous leur larme. Ce froid qui m'avait tant de fois traversée par le passé. Ce froid que j'avais appris à supporter. P. 104

Comme j'ai aimé lire les mots posés par Christian ASTOLFI sur des récits de vie, un regard porté par un homme pour incarner une femme avec une extrême sensibilité.
 
Et puis, ce roman est rythmé, il y a cette ascension dans le propos jusqu'à la première révélation, d'autres suivront, toutes plus puissantes les unes que les autres, me prenant à la gorge au point de laisser couler les larmes. Je peux l'avouer, cette histoire m'a rappelé certaines expériences de la vie, des moments de fraternité que je n'oublierai jamais.
 
Enfin, il est aujourd'hui en lice pour le Prix des Libraires, je lui souhaite le meilleur. C'est ma #Vendredilecture.

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2025-04-04T07:34:00+02:00

Écouter les sirènes de Fabrice MELQUIOT

Publié par Tlivres
Écouter les sirènes de Fabrice MELQUIOT

Et de 2... dans ce bal 2025 des 68 Premières fois.

Vous prendriez bien quelques notes de rock... country comme vous y invite la première de couverture du roman de Fabrice MELQUIOT "Écouter les sirènes".

Le premier roman de Fabrice MELQUIOT chez Actes Sud nous emmène aux États-Unis.

Jodie Casterman habite Portland. Elle a la trentaine. Elle vit de petits boulots (dog-sitter, serveuse dans un bar...) et pratique le théâtre. Son père se sait condamné par un cancer. La maladie ne devait lui laisser que 4 mois à vivre, ça fait 12 mois qu'il attend la mort dans un refuge, une cabane en forêt. John va se confier à Jodie, sa fille adoptive, il va lui dévoiler le secret de son existence. Dès lors, Jodie n'aura plus qu'une idée en tête !

Ce roman, c'est une revue complète des références musicales, cinématographiques, artistiques des années 1960 à aujourd'hui, au risque de me lasser, j'avoue. Il y en a beaucoup, beaucoup... même un peu trop.

Mais dans ce roman, librement inspiré du personnage de Suzanne VERDAL à qui Leonard COHEN a dédié l'une de ses chansons, "Écouter les sirènes", titre éponyme du roman, il y a l'histoire d'une jeune femme, l'histoire d'une enfance revisitée au moment du grand départ de son père adoptif.

La littérature se prête parfaitement à l'exercice de ce genre de révélations au crépuscule d'une vie, un peu comme si l'être humain avait besoin de se délester des secrets pour mieux tourner la page de sa vie sur terre.

De cette lecture il me restera quelques fulgurances, des passages profondément émouvants, des phrases qui vous rappellent ô combien l'humain peut être complexe.

Et puis, il y a l'approche de la mort. Comment l'aborder quand elle rôde autour d'êtres chers, comment l'apprivoiser ? Fabrice MELQUIOT, par la voix de Jodie, nous propose une formule empreinte de silence, comme si, être là était déjà beaucoup.


Sous sa couverture de laine épaisse, le silence fait son poids, ni plus, ni moins. Je continue de le chérir, il est une autre parole entre nous, un autre espace entre John et moi, un refuge après la pluie. P. 68

J'ai beaucoup aimé ce père choisissant un abri, en cœur de forêt, se retirant de ses concitoyens pour mieux savourer le plaisir de faire corps avec la nature.
 
La qualité de ce premier roman est irrégulière mais je lui garde une petite place dans mon cœur. C'est ma #VendrediLecture.
 
Prix Transfuge du meilleur premier roman 2024
 
Retrouvez la sélection 2025 des 68 Premières fois
 

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2025-03-14T07:00:00+01:00

Après Dieu de Richard MALKA

Publié par Tlivres
Après Dieu de Richard MALKA

Vous connaissez certainement la collection Ma nuit au musée des éditions Stock. Je vous ai notamment parlé de

Jakuta ALIKAVAZOVIC avec "Comme un ciel en nous" et

Lola LAFON avec "Quand tu écouteras cette chanson".

Si Jakuta ALIKAVAZOVIC avait choisi la section des Antiques dans la salle des Cariatides du Louvre et Lola LAFON la Maison d'Anne FRANK, Richard MALKA, lui, a choisi le Panthéon, là où sont accueillies 83 sépultures d'illustres femmes et hommes.

Richard MALKA, vous le savez peut-être, est l'avocat de Charlie Hebdo. Comme Riss, il est menacé de mort depuis les attentats de 2015 et vit sous protection policière.

L'homme est aussi scénariste de romans graphiques et écrivain.

Dans ce livre, il s'adresse à François-Marie AROUET, plus connu sous le nom de Voltaire. L'écrivain et philosophe du XVIIIe siècle repose au Panthéon. L'auteur m'a d'ailleurs donné envie de relire des classiques...

Dans un monologue à la 2ème personne du singulier, Richard MALKA revient sur ce qui préoccupait déjà les Lumières. Impossible de passer à côté de la liberté d'expression, vous l'imaginez, et de ses amis, toute l'équipe du journal assassinée le 7 janvier 2015.


Ces personnes tolérantes partageaient sans exception une même qualité : elles étaient drôles et riaient d'elles-mêmes. C'est un marqueur, une protection contre le dogmatisme et le fanatisme. Le droit aux caricatures est non négociable. P. 82 

Mais il y est aussi beaucoup question de religion.


La religion opprime, on la combat, elle recule, elle laisse un vide, c'est la panique, elle revient, on n'en sort pas.
C'est un cercle vicieux qui ne sera brisé qu'en trouvant un substitut à la consolante transcendance du divin. P. 49

Comme dans "L'art de l'esprit joyeux" d'Alexandre JOLIEN et Laurent JOUVET, le livre est éclairant sur des subtilités qu'il convient de rappeler :


Tes propos sont un cas d'école illustrant la différence, que je me tue à expliquer, entre la critique des religions, qui est salutaire, et la critique des personnes à raison de leur religion, qui est un délit. P. 106

Je me suis laissée porter par la philosophie de Richard MALKA, un homme inspirant qui appelle au respect.

Il évoque encore l'architecture du bâtiment qui l'accueille le temps d'une nuit, inspirée de celui de Rome, avec une coupole à 90 mètres de haut. 

Ce nouvel essai de la collection Ma nuit au musée est presque un incontournable dans les temps troublés que nous traversons. Il est très bien écrit. A conseiller sans modération.

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2025-03-07T07:00:00+01:00

Sortir du rang de Rodolphe CASSO

Publié par Tlivres
Sortir du rang de Rodolphe CASSO
 
Aujourd'hui sort en librairie le roman de Rodolphe CASSO, "Sortir du rang" aux éditions des Forges de Vulcain, que je remercie d'ailleurs pour le cadeau.
 
Alerte, quand vous l'ouvrirez, vous ne pourrez plus le lâcher, au péril de votre nuit.
 
Almeria est espagnole. Elle travaille à Paris dans une multinationale en tant que directrice de communication. Elle met la main sur un fichier informatique hautement confidentiel. Dès la fuite de données repérée, une chasse à la femme est engagée, à la vie à la mort. Des hommes sont spécialement recrutés pour la tuer.
 
Je ne connaissais pas la plume de Rodolphe CASSO, elle est haletante. Tout est rebondissement !
 
Ce roman d'aventure est parfaitement orchestré pour ne plus vous laisser une minute de répit.
 
Des sujets de société du XXIe siècle constituent la toile de fond du livre : les intérêts économiques de grands groupes, ceux de santé publique, le statut du lanceur d'alerte, du journaliste d'investigation, le mouvement survivaliste, l'armement des citoyens...
 
Mais ce roman, c'est aussi une page de la grande Histoire qui sous-tend les relations entre les habitants du petit village de Vinça entre Perpignan et Prades, des événements qui continuent d'irriguer les générations suivantes.
 
Avec cette lecture, j'ai tout oublié, mon environnement, mes préoccupations du moment. Je me suis fait un film de la vie d'Almeria en fuite, résistante, et croyez moi, c'est à en perdre haleine. Bref, j'ai vécu un moment hors du temps, c'est aussi et surtout ce que l'on cherche en littérature, non ?

Retrouvez les chroniques des livres de cette maison d'édition :

Gilles MARCHAND"Une bouche sans personne""Un funambule sur le sable", "Des mirages plein les poches", 

Alexandra KOSZELYK avec "À crier dans les ruines", "La dixième Muse", "L'Archiviste" et "Pages volées"

Michèle ASTRUD avec "La nuit je vole",

Jean-Baptiste DE FROMENT avec "Etat de nature",

Alexis DAVID-MARIE et "#Martyrs Français"

Agathe SANJUAN avec "La maison enchantée"

Julia COLIN avec "Avant la forêt".

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2025-01-03T07:00:00+01:00

Mauvais œil d'Etaf RUM

Publié par Tlivres
Mauvais œil d'Etaf RUM
 
Traduit de l'anglais par Diniz GALHOS
 
Les éditions de L'Observatoire me fascinent. Depuis leur création, je m'émerveille de leur éclectisme mais aussi de leur justesse dans les mots, des mots qui me transportent, me font vibrer, qu'il s'agisse d'anticiper l'avenir ou de revenir sur le passé.
 
Cette rentrée littéraire de janvier en est une belle illustration avec "Le regard d'Aurea" et "Mauvais œil". Tiens tiens, s'il s'agissait effectivement d'un certain regard porté sur la société, une certaine philosophie... comme un point commun entre tous les livres. Merci aux éditions de nous émerveiller, merci de ces jolis cadeaux.
 
Là, nous partons en Caroline du Nord aux Etats-Unis. Yara et Fadi sont mariés depuis 9 ans. Ils ont deux filles, Mira et Jude. Elle travaille à l'université, elle en gère le site internet et les réseaux sociaux, elle les nourrit de ses photographies.. Elle aspire à un temps plein. Lui a monté son entreprise avec un ami. Dans cette famille que Yara s'évertue à magnifier dans ses publications personnelles sur Instagram, quelque chose semble clocher, quelque chose que Yara explique hâtivement par son histoire familiale, une malédiction portée par les femmes, transmise de génération en génération, comme le traumatisme de la Nakba depuis 1948 affectant le peuple palestinien. Et si Yara changeait de focale...
 
"Mauvais œil", c'est d'abord une première de couverture", une oeuvre d'art de Raphaëlle FAGUER pour illustrer ce roman d'Etaf RUM, la représentation d'une hamsa, cette amulette portée par les femmes, une tradition en Afrique du Nord et au Moyen-Orient. Cette main est censée les protéger des malédictions.
 
L'air de rien, mais grâce à la beauté de l'art, avec cette première description du livre, je viens de vous en dévoiler le fil d'Ariane.
 
Il y a d'abord l'espace familial, celui de l'intimité, marqué par les traditions entretenues par une famille issue de l'immigration. Vous allez saliver dans ce livre à la lecture de tous ces passages décrivant la préparation des repas. Bien que née à Brooklyn, Yara se fait un devoir de perpétuer les recettes de cuisine apprises de sa grand-mère en Palestine, c'est une certaine manière d'assurer sa mémoire. Elle oeuvre aussi, avouons-le, sous le couperet d'une belle-mère tyrannique. Yara et Fadi sont le fruit d'un mariage arrangé, la condition pour Yara de quitter le berceau familial. Sa mère l'avait elle aussi subi.
 
Mais dans cette famille se joue aussi la vie moderne américaine, celle d'aujourd'hui. Celle qui fait que les individus sont happés par les écrans comme autant de source de distractions à peine le travail quitté. Ce livre, c'est un roman social, un portrait brossé d'une génération tiraillée entre mille et une obligations.
 
Il y a aussi la grande Histoire, celle de 1948. Elle a condamné des populations à l'exil, des populations déracinées, déchirées par les souffrances de la séparation. Elle continue toujours aujourd'hui, sur le territoire, à faire couler le sang des Palestiniens. Ce roman c'est aussi le moyen de revenir sur l'origine du conflit israélo palestinien, de mieux en comprendre les enjeux.


Mais notre histoire coule dans nos veines. Cela au moins, ils n'arriveront jamais à nous en déposséder. Tant que nous continuerons à nous raconter nos vies, notre histoire vivra dans les mémoires. P. 253

Mais ce roman, plus que tout, c'est un personnage, celui de Yara, une femme blessée, une femme victime de croyances, une femme moderne, une femme puissante aussi. Ce roman, c'est un parcours initiatique, porté par une formidable amitié, c'est le parcours d'un personnage de fiction, à moins que ça ne soit celui de l'écrivaine elle-même. Etaf RUM, dont je découvre la beauté de la plume, semble s'être largement inspirée de son itinéraire pour tracer la voie de Yara, une voie qui souffle comme un vent d'espoir en faveur d'un épanouissement personnel, largement empreint du pouvoir des arts.


Mais d'autres jours, son ancienne douleur bouillonnait à la surface pour des raisons qui n'étaient pas toujours très claires. À ces moments, elle s'asseyait, seule, et se réfugiait en elle-même. Puis elle s'en sortait par l'écriture, se servant des mots pour se recoudre, point après point. Son carnet était l'ancre qui l'empêchait de dériver quand la tempête se levait. P. 402

Je sors de cette lecture subjuguée une nouvelle fois par les mots, ceux qui assurent la mémoire, ceux qui traduisent les états d'âme, ceux qui portent vers un avenir nouveau. Sous la traduction de Diniz GALHOS, ils prennent une juste dimension. Virtuose !
 
Impossible de vous quitter sans lier cette lecture à la chanson de Clara LUCIANI, "Ma mère", je l'écoute en boucle. Quand les arts résonnent entre eux...

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2024-12-20T07:00:00+01:00

Smoothie de Stéphanie GLASSEY

Publié par Tlivres
Smoothie de Stéphanie GLASSEY

OKA'poche Uppercut

 

Ce roman, offert par la maison d'édition, que je remercie, est une belle découverte.

 

Découverte d'une plume d'abord. Je ne connaissais pas l'écriture de Stéphanie GLASSEY, c'est chose faite avec un roman court, savoureux... comme un "Smoothie" mais ne vous y trompez pas, derrière le breuvage sirupeux se cachent quelques gouttes d'acidité.

 

La narratrice vivait depuis 8 ans avec Adrian. Il vient de la quitter. Comme un instinct de survie, elle se connecte sur Tinder, le site de rencontre à la mode. Premier rendez-vous organisé dans un bar à smoothie. Rien ne va se passer comme prévu, enfin, la rencontre si, mais elle sera de courte durée et sans lendemain. Lui voue à son corps un culte sans faille, tout est paramétré, orchestré, performé, alors qu'elle souhaite se laisser aller. Sa vie va prendre un tout autre chemin...

 

Ce roman c'est d'abord un portrait de notre société du XXIème siècle. C'est amusant, caustique aussi. Vous allez rire... jaune !

 

C'est encore la quête d'une jeune femme du bien-être, d'un épanouissement personnel. Comme j'ai aimé l'accompagner dans cette découverte du yoga, d'une certaine forme de yoga, celle qui lui convient.

 

On pourrait presque parler d'un roman d'apprentissage. Si la narratrice est à l'âge adulte, il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'un cheminement vers quelque chose de spirituel. 

 

Découverte d'une nouvelle collection aussi. Ma rencontre avec les éditions Okawa remontent au roman de Catherine ROLLAND, "La dormeuse", un bijou.

 

Là il s'agit du nouveau format poche avec une charte graphique distincte sur fond blanc. Je souhaite que de bonnes fées se penchent sur son berceau. Ce premier roman est prometteur !

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2024-11-08T09:00:00+01:00

Les règles du mikado d'Erri DE LUCA

Publié par Tlivres
Les règles du mikado d'Erri DE LUCA

Traduit de l'italien par Danièle VALIN

Erri DE LUCA nous revient avec un roman, "Les règles du mikado" aux Editions Gallimard.

Un vieil horloger campe à la frontière entre l'Italie et La Slovénie. L'homme se délecte de sa solitude jusqu'au jour où une femme, une gitane, s'introduit dans sa toile de tente. Elle fuit la communauté, elle qui était promise à un mariage arrangé. Il lui offre l'hospitalité. Dans un espace contraint, les deux êtres vont lentement faire connaissance, s'apprivoiser, partager "Les règles du mikado".

Comme moi, vous avez peut-être lu "Le poids du papillon", "La nature exposée" ou encore "Le jour avant le bonheur". Dans ce cas, nul doute que vous avez hâte de retrouver la plume de l'écrivain napolitain au grand coeur.

Vous avez déjà entendu quelqu'un dire : "Nul ne ressemble à un autre, pas même des jumeaux homozygotes" ? Lui le dit ! Cet homme, humble, profondément humaniste, nous offre une très belle leçon de vie, celle d'accueillir l'autre, peu importe sa condition.


Près est pour moi le point le plus haut de l'intimité. P. 141

L'écrivain est un habitué des romans courts. En seulement 154 pages, il réussit à nous captiver avec l'itinéraire d'une migrante et la part de mystère qui entoure l'existence d'un horloger.

Erri DE LUCA joue avec les mots, les métaphores... tout en délicatesse pour traiter des frontières. Il y a celles au sens propre qui délimitent les territoires, il y a celles au sens figuré, celles de l'âme, qui empêchent d'apprécier l'autre dans ce qu'il a de plus beau.

J'ai beaucoup aimé son rapport au temps aussi. Quand la gitane pointe la différence d'âge entre eux, lui montre l'époque dans laquelle tous les deux vivent... Bien vu !


Je ne fais aucune différence d'âge. Tu me traites de vieux, d'accord, mais j'ai le même âge que toi, je vis à la même époque. Les générations n'existent pas pour moi. Tant que nous vivons, nous sommes contemporains. Nous sommes deux personnes. P. 72Je ne fais aucune différence d'âge. Tu me traites de vieux, d'accord, mais j'ai le même âge que toi, je vis à la même époque. Les générations n'existent pas pour moi. Tant que nous vivons, nous sommes contemporains. Nous sommes deux personnes. P. 72

N'est-ce pas le moyen de réunir toutes les générations vers un dessein commun ?

Erri DE LUCA peint un portrait de femme haut en couleur.

Ce nouveau roman est une pépite. L'écriture est belle, puissante, parfaitement orchestrée... comme une partie de mikado.

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2024-08-23T08:25:17+02:00

Pages volées d'Alexandra KOSZELIK

Publié par Tlivres
Photo du livre d'Alexandra KOSZELIK, en toile de fond mon tee-shirt, un cadeau offert par ma fille elle aussi passionnée de littérature, il y est écrit : "L'écriture c'est le coeur".

Photo du livre d'Alexandra KOSZELIK, en toile de fond mon tee-shirt, un cadeau offert par ma fille elle aussi passionnée de littérature, il y est écrit : "L'écriture c'est le coeur".

Alexandra KOSZELYK, je crois que tout ce qu'elle écrit me fait vibrer !

Il y a eu "À crier dans les ruines", "La dixième muse" et "L'Archiviste", tous des romans adultes Aux Forges de Vulcain que j'ai adorés, et puis "Le sanctuaire d'Emona", un roman jeunesse de la Collection R de Robert Laffont, un coup de ❤️

Si je connais depuis longtemps Alexandra, je l'avais interviewée pour T Livres ? T Arts ? à la sortie de son 3ème roman, et plus récemment au 122 dans le cadre des soirées littéraires de l'association Les Bouillons, jamais, non jamais je ne serai allée sur un terrain intime que je soupçonnais douloureux.

Mais là, c'est Alexandra KOSZELYK qui prend la plume pour nous livrer un texte très personnel. Elle nous apprend le décès de sa mère dans un accident de voiture duquel elle a survécu avec son frère. Leur père mourra de ses blessures quelques jours plus tard. Elle n'avait alors que 8 ans. Si tous se sont évertués pendant son enfance à lui cacher la vérité, c'était pour mieux lui donner à la quarantaine l'opportunité de se délivrer d'un texte profondément émouvant, un texte qui s'est subitement imposé à elle, lors d'une résidence d'écriture sur sa terre natale. Elle a ressenti un irrépressible besoin d'écrire sur son histoire.

À l'image de "L'Archiviste", roman écrit d'une traite les jours qui ont suivi l'invasion de l'Ukraine en février 2022, "Pages volées" a mûri au fond d'elle pour surgir tel un souffle, une respiration après une phase d'apnée.


[...] déposer mes mots est une manière de reprendre la barre de ma navigation, de faire avec la houle de mes souffrances d'enfant, non contre elle. P. 33

Tour à tour roman (d'autofiction), recueil de poèmes, ce texte construit comme un journal intime, devient au fil des pages un essai autour de la littérature, la lecture


Le lecteur est celui qui se dénude au moment d'entrer dans un sanctuaire. Il est avide de découvertes. En refermant le livre, il portera de nouveaux habits, sera allé à la rencontre d'autres vies, d'autres histoires, et portera vers l'autre le regard d'un ami. P. 85

et l'écriture.


Travailler, effacer, raturer, s'étendre, se restreindre, couper, remettre. Arriver à la phrase qu'on trouve juste, passer sur d'autres en pensant qu'elles le sont, sans être certain qu'elles le soient, avoir l'oeil de l'éditeur, mais aussi de ses proches, amis, lecteurs, en discuter avec d'autres... P. 178

Elle creuse le sillon de ce qui forge sa plume. Ce texte protéiforme transcende les limites des registres littéraires (ce qui prouve bien qu'elle peut exceller dans tous !) pour tisser les fils de son existence et révéler la femme qu'elle est devenue aujourd'hui, l'écrivaine, une oeuvre se constituant progressivement...


Survivre, c'est vivre deux fois. Pour moi. Et pour eux qui ne le pouvaient plus. P. 41

Parce que tout mérite d'être expliqué (les avides de synchronicités vont être servis !), Alexandra KOSZELYK dévoile ce qui l'a construit à travers les richesses de la langue, qu'elle soit orale, écrite, celle des livres et celle des éléments (la mer, la forêt, la nature quoi !)... elle fait feu de tout bois pour nous offrir un livre lumineux (n'est-elle pas solaire !), empreint d'espoir, avec cette quête de laisser une trace de ses sentiments, ses doutes, ses convictions aussi.


Chaque mot est un barreau d'échelle qui m'élève, là où la réalité fait de moi une orpheline. P. 91

Il y est question d'origines, d'identité, de transmission intergénérationnelle, Alexandra KOSZELYK écrit sur la vie. David MEULEMAN sont éditeur ne s'y est pas trompé, ce texte (il a décidé de ne publier que celui-là à la rentrée littéraire), il est fort, il est poignant tout en étant puissant, c'est un inclassable, un livre qui vous marque "À la vie à l'amor" (aphorisme emprunté à Miss. Tic). C'est ma #vendredilecture !

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2024-06-21T08:00:00+02:00

Les voleurs d’innocence de Sarai WALKER

Publié par Tlivres
Les voleurs d’innocence de Sarai WALKER

Gallmeister

 

Nouvelle référence du Book club, bonne pioche avec cette lecture "imposée" !

 

Nous voilà au Nouveau-Mexique, dans le sud des Etats-Unis. Sylvia Wren, artiste, partage sa vie avec Lola, une femme qui voyage à travers le monde pour son activité professionnelle. Alors qu'elle est seule, Sylvia reçoit une lettre, puis deux, d’une journaliste qui pense qu’elle pourrait être Iris Chapel, une femme du Connecticut, portée disparue en 1957 à l'âge de 20 ans. Elle se serait enfuie d'un hôpital psychiatrique. Avec ces lettres, ressurgissent immanquablement les souvenirs de l'enfance d'Iris. Elle faisait partie d'une fratrie de 6 filles, toutes portant des noms de fleurs mais frappées par une malédiction transmise de mère en fille depuis plusieurs générations. La mère d'Iris, Belinda, a elle-même vécu un calvaire qui la maintiendra la quasi totalité de sa vie isolée ou éloignée des siens. C'est une très longue histoire familiale qui commence alors.

 

Je ne connaissais pas encore la plume de Sarai WALKER, une écrivaine américaine. Publiée chez Gallmeister, vous pouvez facilement imaginer à quel point le récit va s'étirer dans le temps, pour votre plus grand plaisir évidemment.

 

Ce roman, vous l'avez compris, est celui d'une famille dont l'itinéraire est malmené. Les femmes, tout juste mariées, décèdent au lendemain de leur nuit de noces. Ces tragédies auraient peut-être pu être évitées, encore aurait-il fallu écouter Belinda, cette femme considérée comme folle dont on a oublié pourquoi les lobes de ses oreilles ont un jour été coupés.

 

Dès lors, le propos prend une toute autre dimension. Quels mystères cette femme peut-elle bien porter ? Et sa fille Iris ?

 

J'ai beaucoup aimé explorer cette saga familiale, cheminant au fil chronologique des révélations.

 

Le propos est fascinant autant qu'il est effrayant. Souvenons-nous, dans les années 1950 aux Etats-Unis, des femmes étaient brûlées parce que considérées comme des sorcières, des êtres soupçonnés de pouvoirs maléfiques que l'on préférait éliminer pour garder la main mise sur le reste du troupeau !

 

Le personnage d'Iris est absolument fascinant. Comme j'ai aimé porter son regard sur la vie, faire preuve de bienveillance et de compréhension pour sa mère, faire ses pas de côté pour mieux résister.

 

Et puis, cerise sur le gâteau, il y a l'art, avec une inspiration avouée de l'écrivaine dans les oeuvres de Georgia O'KEEFFE et ses tableaux de fleurs que j'ai eu la chance de découvrir lors d'une exposition temporaire au Musée Georges POMPIDOU. 

 

L'Iris blanc en référence au "Lavender Iris" de l'artiste est subtilement décrit :


Je la retournai pour voir la peinture : une fleur blanc crème aux nuances roses et bleues sur un fond vert clair. Je rougis, sans trop savoir pourquoi. Puis je compris ce qu'était en réalité le sujet du tableau. C'était bien un iris, effectivement, mais c'était aussi Veronica. Daphne avait transformé son esquisse de l'espace entre les jambes de Veronica, les courbes et les replis délicats, en une fleur. P. 382

Un brin gothique avec cette présence irrépressible de la mort et du mystère qui l'entoure, cette lecture m'a profondément émue. Vous admirerez d'ailleurs la première de couverture d'une grande beauté avec le serpent rappelant la Genèse avec Adam et Eve.

 

En lien avec une narration à la première personne du singulier, qui permet de faire corps avec Iris, la traduction de l’américain par Janique JOUIN-DE-LAURENS est bouleversante.

 

Et puisque l'opportunité m'en ai donné, quittons-nous en musique en écoutant le titre "Lady sings the blues" de Billie HOLIDAY, l'une des références musicales de Sarai WALKER.

Retrouvez les références du Book club :

"Le royaume désuni" de Jonathan COE

"Le roitelet" de Jean-François BEAUCHEMIN

"L'autre moitié du monde" de Laurine ROUX

"Mémoire de fille" d'Annie ERNAUX

Futur.e.s, comment le féminisme peut sauver le monde de Lauren BASTIDE

Les étoiles s'éteignent à l'aube de Vincent TURHAN

"L'heure des oiseaux" de Maud SIMONNOT

"Quand tu écouteras cette chanson" de Lola LAFON

"Ultramarins" de Mariette NAVARRO 

"Consolation" de Anne-Dauphine JULLIAND
 
"Malgré tout" de Jordi LAFEBRE
 
"Sidérations" de Richard POWERS

"Hamnet" et "I am I am I am" de Maggie O'FARRELL

 "Les enfants sont rois de Delphine DE VIGAN

 "Au-delà de la mer de David LYNCH

"Le messager" de Andrée CHEDID 

"L’ami" de Tiffany TAVERNIER

"Il n’est pire aveugle" de John BOYNE

"Les mouches bleues"» de Jean-Michel RIOU

"Il fallait que je vous le disede Aude MERMILLIOD, une BD

"Le roi disait que j'étais diable" et "La révolte" de Clara DUPONT-MONOD

"Un jour ce sera vide" de Hugo LINDENBERG

"Viendra le temps du feu" de Wendy DELORME

Bakhita de Véronique OLMI

Ceux qui s'aiment se laissent partir de Lisa BALAVOINE

Tosca de Muriel SZAC

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2024-04-05T06:00:00+02:00

La Colère et l’Envie d’Alice RENARD

Publié par Tlivres
La Colère et l’Envie d’Alice RENARD

Éditions Héloïse d’ORMESSON

 

J’aime faire confiance aux premiers romans, par principe. Vous vous souvenez bien sûr de toutes ces années de lectures partagées avec les 68 Premières fois.

 

De passage à la Librairie L’étincelle d’Angers, dans la rentrée littéraire de septembre 2023, j’avais choisi « Ce que je sais de toi » d’Eric CHACOUR, bonne pioche, et « La Colère et l’Envie » d’Alice RENARD, un roman qui m’a émue aux larmes. Je vous explique.

 

Dans un couple naît une enfant, Isor, dont les comportements semblent… différents. Si les parents ont tout d’abord pensé à une surdité l’empêchant d’entendre son environnement et d’interagir avec lui, ils se sont rapidement rendus compte que leur fille souffrait de quelque chose de plus complexe que les médecins ne réussissaient d’ailleurs pas à identifier. Paradoxalement, Isor les surprenait avec des réalisations tout à fait inattendues. Ils décidèrent de rompre avec le système et de la prendre exclusivement en charge. Mais c’était sans compter sur ce dégât des eaux les obligeant à confier Isor à Lucien, leur voisin, une homme de plus de 70 ans. C’est là que commence, pour tous, une nouvelle vie.

 

J’ai été émue aux larmes par cette histoire écrite par une toute jeune femme, Alice RENARD. Souvenez-vous bien de son nom, elle va faire un tabac.

 

D’abord, il y a la narration, un exercice parfaitement réussi. Le roman est pour partie choral, pour partie construit comme une discussion, pour partie comme le récit à la première personne du singulier, pour partie encore sous forme de correspondance. Bref, le procédé est audacieux et montre à quel point Alice RENARD a talent.

 

Et puis, il y a l’histoire, faite d’intrigues. Les personnages d’Isor et Lucien recèlent à eux deux de profonds mystères qui rendent le roman haletant. 

 

J’ai été happée par la complicité de deux êtres que les générations séparent mais que la solitude unie. Il y a des moments de pure complicité si beaux. 


J’aimerais tout posséder pour pouvoir tout t’offrir.

Je dis ça alors que rien ne nous manque. Ou peut-être un orchestre privé ? Un tapis plus moelleux ? Ta tête sculptée huit fois en guise de pion sur un plateau de petits chevaux ? Un théâtre dans l’arrière-jardin avec des chaises à fleurs et à paillettes ? Des journées faites seulement d’après-midis et aucune nuit pour les séparer ? Que je sois un adolescent, pour qu’on ait un futur plus long que notre présent, et que je sois tout frêle et tout chétif, pour qu’à ton tour tu me prennes sur les genoux. Que l’on m’accorde un vœu pour souhaiter que tous les tiens se réalisent. Que tu aies des chaussures à grelots et que la maison soit pleine de couloirs pour étirer ces moments où je t’entends venir vers moi. P. 81

La relation établie entre Isor et Lucien repose sur des choses simples, tellement naturelles et spontanées. C’est beau et puissant.

 

Mais Alice RENARD ne saurait s’en contenter. Elle donne un ton lyrique à son histoire, de quoi vous transporter et vous étreindre le coeur.

 

Sans oublier la place faite à la musique…


Je me crée des listes de morceaux à écouter pour toutes les occasions. Par exemple « c’est le premier jour de l’hiver et il fait froid », ou bien encore « je perds mes clefs et j’ai besoin de me calmer ». Ce sont des listes au cas où, pour être consolé. Oui, très exactement, des lettres de consolation que je m’écris à l’avance. Un filet de sécurité. Et puis il y a les « listes mémoire », qui engravent mon souvenir d’un événement, d’une période, d’une année. P. 88-89

C’est juste éblouissant. 

Tout au long de cette lecture j’ai pensé à cet album jeunesse « Nous, les émotions » de Tina OZIEWICZ et Aleksandra ZAJAC, tellement à propos.

Bravo à Alice RENARD pour le Prix Méduse 2023, nul doute qu'elle sera honorée d'autres récompenses pour son magnifique premier roman.

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2024-03-22T07:00:00+01:00

Résistance 2050 d’Amanda STHERS et Aurélie JEAN

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Résistance 2050 d’Amanda STHERS et Aurélie JEAN

Éditions de L’Observatoire

 

Si après un regard dans le rétroviseur avec « Oma » d’Ariel MAGNUS et « Bakhita » de Véronique OLMI, on portait les yeux droit devant… place aujourd’hui au roman d’Amanda  STHERS et Aurélie JEAN : « Résistance 2050 ». 

 

Imaginons la France coupée en 2 bastions, ceux qui ont fait confiance à la science et ont accepté de se faire poser une puce au niveau du cerveau. Ce petit corps étranger technologique, dont les inventeurs viennent de se voir honorés du Prix Nobel de médecine, les met à l’abri de tout risque sanitaire et leur assure  une vie paisible et harmonieuse, plus d’émotions ni de croyances en de quelconques religions… mais les expose, à qui veut l’entendre, à tout dysfonctionnement, voire piratage, informatique. Face à eux, le clan de ceux qui souhaitent conserver leur liberté de pensée et d’expression, en minorité, plutôt implantés en Bretagne et dans la région de Marseille. A leur tête, deux femmes qui, le temps d’une nuit, vont vivre une folle histoire d’amour. 

 

Tout va très vite aujourd’hui. L’intelligence artificielle se démocratise et s’invite dans nos vies personnelles. L’Homme continue d’afficher son impuissance devant la maladie d’Alzheimer et ses fragilités devant le vieillissement de la population. Pourquoi succomber au charme des progrès technologiques ou résister ? 

 

Le duo d’écrivaines nous propose d’entrer par la petite porte des moyens technologiques pour aborder bien plus largement le dessein politique. A quel projet souhaitons-nous adhérer, celui d’un régime totalitaire ou d’une démocratie ? 

 

Le propos est haletant, le livre un véritable page-turner.

 

Comme sa première de couverture et son format ne le laissent pas supposer, il est publié par les éditions de L’Observatoire que je remercie pour cette lecture tout à fait diabolique. N’avons-nous pas en réalité le choix entre la peste et le choléra ?

 

Roman d’anticipation, dystopie, ce roman à quatre mains est absolument remarquable. Tout y est, l’ancrage dans notre vie quotidienne et la projection à quelques décennies. Les personnages sont attachants, les scénarios tellement glaçants. Chapeau Mesdames !

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2024-03-15T09:46:24+01:00

Oma d'Ariel MAGNUS

Publié par Tlivres
Oma d'Ariel MAGNUS

Éditions de L’Observatoire

 

Ecrire sur la vie de sa propre grand-mère peut s’avérer hasardeux pour tout un tas de raisons. Votre propre parent pourrait vous proposer un choix qui le serait d’autant plus :


Sois tu attends que ta grand-mère meure, soit tu te débrouilles pour qu’elle ne l’apprenne pas. P. 146

Il n’en faudra pas plus pour Ariel MAGNUS pour se jeter à l’eau et il a sacrément bien fait. Il nous livre un livre exceptionnel, publié pour la première fois en 2006 en espagnol et en 2012 en allemand. Il vient tout juste de sortir en France grâce à la traduction de Margot NGUYEN BÉRAUD et aux éditions de L’Observatoire que je remercie pour ce très beau cadeau.

 

« Oma », traduisez Grand-mère, est donc un livre non seulement inspiré d’une histoire vraie  mais également de l’histoire familiale de l’auteur, Ariel MAGNUS, descendant d’immigrés juifs allemands.

 

« En guise d’avertissement », dès les premières pages, Ariel MAGNUS nous expose son dessein, non pas raconter une énième histoire de survivants de la Shoah, mais se focaliser sur ce qu’en dit sa grand-mère, ce qu’elle a à lui transmettre, à lui, et ce qu’elle acceptera qu’il communique au grand public.

 

Ce projet faisait partie d’échanges réguliers avec sa grand-mère sans jamais aboutir. C’est lorsqu’elle décida de lui rendre visite à Berlin que tout s’est concrétisé.

 

Cette lecture, je l’ai faite d’une traite, en apnée totale.

 

Bien sûr, il y a l’itinéraire de cette femme que je vous laisserai découvrir, un parcours fascinant.

 

Plus que ses années passées sous l’emprise du Führer, ce qui m’a intéressée c’est l’après, la trajectoire donnée à sa vie, parfois guidée par l’opportunité d’un jour, souvent dictée par des convictions personnelles 


Le médecin au Brésil m’avait dit que je ferais mieux de ne pas mettre d’enfant au monde. Mais moi j’ai dit : « J’en veux. » P. 87

et une immense générosité. 

 

Quelle belle âme que cette grand-mère, un sacré personnage, naturellement romanesque, qui a puisé dans sa personnalité, sa force de caractère pour avancer.


En général, elle préfère fermer les yeux sur certaines ombres du passé et se concentrer sur le côté ensoleillé de la rue. P. 136

Des faits historiques, il y en a mais le sillon creusé par Ariel MAGNUS repose bien plus sur leur interprétation, tout en nuance.

Ma grand-mère est une somme de contradictions plus ou moins inconscientes, pour la plupart en rapport avec l’Allemagne et les Allemands, qu’elle aime et déteste à la fois, sans transition. Ses enfants ont été élevés dans ce paradoxe, de même que les enfants de ses enfants. C’est compréhensible. P. 56

Ce livre est empreint d’amour. J’ai été touchée par la profonde tendresse qui anime ces deux générations et la très grande pudeur dans l’expression de leurs sentiments.

 

Le ton, teinté d’humour, fait de ce livre un petit bijou.

 

Ariel MAGNUS nous livre une formidable leçon de vie.

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2024-01-05T07:00:00+01:00

Insula de Caroline CAUGANT 

Publié par Tlivres
Insula de Caroline CAUGANT 

Éditions du Seuil

Cette rentrée littéraire de janvier 2024 nous réserve de très belles surprises. Après deux romans historiques :

"Un monde à refaire" de Claire DEYA

"Une femme debout" de Catherine BARDON

place aujourd'hui à un roman d'atmosphère, foudroyant, "Insula" de Caroline CAUGANT. C'est ma #vendredilecture.

Line est une jeune femme. Sur Paris, elle partage sa vie depuis 5 ans avec Thomas. Lui est professeur de français dans un collège, elle est hôtesse de l’air. Elle est d’astreinte à l’aéroport. Elle lui téléphone et lui annonce qu’elle est « déclenchée », elle part à la place de quelqu’un d’autre à destination du Japon. Le jour de son arrivée, un terrible séisme se produit sur Tokyo. Après quelques jours sans nouvelle, Thomas apprend que Line vient d’être retrouvée sous les décombres après 8 jours et 8 nuits. C’est une miraculée. Elle est vivante. De retour sur Paris, Line est à la fois présente et à la fois absente, c’est elle et ce n’est plus tout à fait elle. Alors commence une nouvelle page de leur vie...

Ce roman, c’est l’itinéraire d’une jeune femme victime d'une catastrophe naturelle et humaine. Elle est en phase post-traumatique. Si elle retrouve son compagnon et son appartement, les éléments de stabilité qui lui permettaient de tenir debout, avant, désormais, tout tangue autour d'elle, tout l'agresse dans son corps, dans sa chair. Cette lecture relève d’une véritable expérience sensorielle. J'ai entendu résonner dans mes oreilles l'inlassable "Tap tap tap." pour signifier sa présence, j'ai respiré le peu d'air qui était offert à Line dans sa cavité, j'ai avalé avec elle le sable qu'elle avait dans la bouche et qui asséchait sa gorge... Sous la plume de Caroline CAUGANT, le chaos dans lequel est plongée Line devient perceptible dans tout ce qu'il a de terrifiant.

Avec cet événement, tous les fantômes de sa vie d'avant resurgissent et viennent hanter ses pensées. Elle déroule le fil d'une existence marquée depuis la plus tendre enfance par un rapport au corps blessé et meurtri. Les épreuves se sont accumulées laissant chaque fois leurs empreintes. Pour les conjurer, Line avait trouvé une manière de se (re)construire.


En couvrant son corps de dessins, elle avait chaque fois la sensation de s’enraciner, d’écrire un nouveau morceau de son histoire. P. 180

Là, c'est différent. Tout est nouveau pour elle qui doit trouver le moyen de surmonter ce drame personnel pour espérer REvivre, SURvivre. Le roman prend toute sa dimension psychologique, un terrain de jeu qu'apprécie Caroline CAUGANT si j'en crois les souvenirs encore prégnants de son premier roman, "Les heures solaires" publié alors aux éditions Stock. 

Elle nous plonge dans une quête, celle d'une terre inconnue qu'elle magnifie avec des descriptions sublimes, envoutantes. C'est un lieu de fuite, c'est aussi un refuge, un lieu ressource.

Comme j'ai adhéré au principe d'un lien entre notre terre d'origine et nos existences, la nature agissant comme un déterminant. Dis moi d'où tu viens, je te dirai qui tu es. C'est absolument fascinant. 

Quant à imaginer que le titre du livre puisse faire référence, et à une portion de terre cernée par les eaux, et à une partie du cerveau de l'être humain, il n'y a qu'un pas, juste la révélation du pourquoi de la démonstration. C’est puissant.

Roman d’anticipation ? Caroline CAUGANT prend le parti de dater son roman au printemps 2024. A bien lire les médias, la terre tremble dans cette région du monde. Souhaitons que tout ce qui est écrit ne reste qu’une fiction. 

"Insula" est un roman émouvant et captivant.

Il y est question de sororité, de mémoire, de réparation au sens de Maylis DE KERANGAL dans "Réparer les vivants". C'est de la petite couture, il y est question d'humain.

Et pour sublimer le tout, l'écrivaine nous offre des parenthèses poétiques comme des respirations. Je ne résiste par à vous en partager une. C'est fin, c'est délicat, c'est plein d'espoir.


Pensée vaine
Dissoute
Annihilée

Ciel trouble
Nébuleux
Envahi par la brume

A l'horizon
Une lueur
Un phare

Publicité. Livre offert par la maison d'édition.

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2023-10-07T08:36:57+02:00

Le guerrier de porcelaine de Mathias MALZIEU

Publié par Tlivres
Le guerrier de porcelaine de Mathias MALZIEU

De Mathias MALZIEU, j’avais lu « Journal d’un vampire en pyjama », « Métamorphose en bord de ciel », « Une sirène à Paris ». 

 

Et puis, il y avait eu ses quelques notes de musique jouées à la Collégiale Saint-Martin

 

Son tout dernier roman, « Le guerrier de porcelaine » venait de sortir chez Albin Michel.

 

Nous sommes en juin 1944. La Maman de Mainou vient de mourir avec sa petite soeur, Mireille. Son papa est appelé par la guerre. A l’âge de 9 ans, l’enfant quitte la villa Yvette de Montpellier. Il va passer la frontière dans une carriole de foin pour entrer en zone occupée, là où sa grand-mère habite avec la tante Louise et l’Emile. Tous vont prendre soin de lui, de ses fantômes aussi. Dans cette maison, se passent des choses bien mystérieuses. Une nouvelle vie commence pour Mainou.

 

Ce roman est largement inspiré de la vie de son père. Alors que Mathias MALZIEU menait lui-même à l’hôpital un combat contre la grande faucheuse, il demandait à son père de lui relater son enfance en temps de guerre. Sorti vainqueur, il décide d’écrire cette page de son histoire familiale.

 

C’est à hauteur d’enfant que Mathias MALZIEU narre un an de la vie d’un petit garçon rythmée par les bombardements, les descentes en urgence à la cave, et puis, les montées en toute clandestinité au grenier.

 

Partageant la vie d’adultes, il s’offre des moments de complicité avec un oisillon, un cigogneau qui, pendant plusieurs mois, vivra dans sa chambre.

 

Mais le propos ne serait pas celui de Mathias MALZIEU s’il n’y avait une bonne dose de poésie. Les mots sont beaux, l’histoire est tendre et émouvante.

 

Et puis le fil rouge de l’écriture, toujours une plume pour laisser une trace et assurer la postérité des générations passées. 


Parfois ton souvenir se décolore comme le font les photos avec le temps. Alors je t’écris, ça ralentit le processus de disparition. P. 73

Du grand art, quoi !

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2023-09-08T19:05:17+02:00

Bleu nuit de Dima ABDALLAH

Publié par Tlivres
Bleu nuit de Dima ABDALLAH

Sabine WESPIESER éditeur

 

Entre deux dates, le 25 octobre 1961 et le 21 mars 2013, c’est une page de la vie d’un homme qui s’est écrite. Depuis sa naissance jusqu’à la mort d’une femme qu’il a aimée, Alma, le temps a passé et les liens avec la société se sont étiolés. Vivant ces dernières années seul, reclus dans son appartement du 20ème arrondissement de Paris, sous neuroleptiques, il décide le jour de la sépulture d'Alma de

 

récurer son logement, vider le contenu de son frigo et son congélateur dans un sac poubelle qu’il dépose au pied de l’immeuble, claquer la porte et...  jeter les clés dans une bouche d’égout ! Il va faire de la rue son univers. Dès lors, une nouvelle page de sa vie peut s’écrire… à moins que ça ne soit la précédente qui soit revisitée !

 

J’avais lu de Dima ABDALLAH « Mauvaises herbes », son premier roman qui m’avait captivée. J’ai attendu les vacances pour me plonger dans « Bleu nuit », une lecture coup de poing. J’en sors terrassée. C'est ma #VendrediLecture.

 

A travers l’introspection d’un homme, Dima ABDALLAH propose un roman d’une profonde sensibilité.

 

Ce roman, c'est bien sûr, l'approche du deuil. En lisant les premières pages, une image s'est imposée à moi. Vous vous souvenez peut-être de cet homme dansant près du cercueil de sa femme, Agnès LASSALLE, assassinée à Saint-Jean de Luz en mars dernier. J'ai, un temps, vu le narrateur animé de ce même élan.

 

Et puis, il y a les fantômes, ceux qui hantent les nuits, longtemps après le grand départ...

 


Je devais la tuer et l’enterrer si profond que plus jamais elle ne pourrait revenir. Un corps ne meurt pas facilement, il ressuscite parfois et vient s’allonger près de vous la nuit. P. 36

Une fois à l'extérieur, le narrateur s'adonne à la contemplation. Il porte un regard tendre sur ce qui compose la rue, l’environnement, et plus encore sur les femmes qu’il va rencontrer et avec lesquelles vont s’instaurer des rituels rythmant hebdomadairement une vie d’errance. 

 

J’ai beaucoup aimé les portraits brossés d’Emma, Ella, Martha, Carla, Layla… l’attention portée et la délicatesse dans la prise de contact, tout est affaire de dignité.

 

J’ai été captivée par sa capacité d’observation et foudroyée par sa sagacité à décrypter les gestes d’êtres écorchés.

 

C’est un roman éminemment sensoriel, il y a les images, les sons, les parfums, les saveurs, les contacts comme autant de vibrations qui confèrent à l’humain sa singularité... Dima ABDALLAH les explore pour ponctuer son roman, "Bleu nuit", de flashs lumineux, de moments d'émerveillement fabuleux.


Peut-être que si le beurre est d’une grande qualité et savamment dosé, si la cuisson est d’une justesse à couper le souffle, un croissant peut vous donner le courage d’un sourire même quand les lèvres sont si gercées que ça en est douloureux. Un croissant, ça peut peut-être suffire à une journée. P. 61

 

Dans une narration à la première personne du singulier, le rythme du coeur du lecteur s'accorde sur celui du personnage de fiction. Il se met à résonner au gré des perceptions avec des effets vertigineux.

 

L'histoire est ponctuée d'extraits de poèmes comme autant de respirations dans un roman que vous lirez en apnée. Dima ABDALLAH offre un rayonnement aux textes d'ARAGON, Louis-Ferdinand CELINE, Jean-Paul SARTRE, Romain GARY, Charles BAUDELAIRE, Milan KUNDERA, Marcel PROUST, Albert CAMUS...

 

Ce roman pourrait plaire à Alexandra KOSZELYK pour la citation, bien sûr, de Guillaume APOLLINAIRE extraite de "Cortège", Alcools, figurant en incipit, mais aussi pour les liens établis entre les arts. Dima ABDALLAH convoque, outre la poésie, la musique, la peinture, comme autant d’invitations à aller plus loin. J’aime ces résonances entre les différentes disciplines, ces regards croisés sur une certaine réalité.

 

Ce roman, sincèrement, ne passez pas à côté. 

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2023-08-25T07:49:25+02:00

Pour qui s’avance dans la nuit de Claire CONRUYT

Publié par Tlivres
Pour qui s’avance dans la nuit de Claire CONRUYT

Après un roman ancré dans la réalité, un roman loufoque et déjanté, il n’y avait plus que le registre onirique à explorer, les éditions de l’Observatoire l’ont fait avec Claire CONRUYT. Elles nous livrent « Pour qui s’avance dans la nuit ». C'est ma #VendrediLecture.

 

Ce roman, c’est de la poésie à l’état pur, une invitation à sommeiller. Entre rêve et réalité, il n’y a plus qu’à se laisser bercer.

 

Pierre est un enfant dont la mère, Bérénice, vit dans une profonde mélancolie. Elle souffre d’une éprouvante solitude. Elle porte un amour inconsidéré à son petit frère, Orphée, dont la timidité est maladive. Tous partent en vacances sur l’île de Sjena, un lieu imaginaire au bord de la mer Adriatique. C’est là que Bérénice retrouve les origines de sa famille, en plus de son amie, Anouk. Dès lors, la folie de cette mère hantée par ses monstres peut commencer !


Les choses et les visages, les lieux et les voix, tout reprenait vie à la lumière de ma mémoire comme une scène de théâtre poussiéreuse redevenant palais ottoman une fois nos costumes enfilés. P. 22

Ce roman est envoûtant, il m’a transportée.

 

D’abord, vous me reconnaîtrez bien là, il y a la maladie mentale. Elle me fascine autant qu’elle me foudroie. 

 

A hauteur d’enfant et sous la plume merveilleuse, délicate et voluptueuse, de Claire CONRUYT, le spectre de la folie s’invite au coeur d’une famille. 


Elle a l’air d’un ange, un ange blessé dont les gestes sont suspendus, soumis à d’autres lois que celles de notre gravité. P. 148

Elle bouleverse l’enfant sage dont la candeur est étouffée par la lucidité. Elle berce d’illusions celui qui plane. 


Ma mère entraînait Orphée dans des contrées qui, chez elle, étaient grises et que lui seul savait colorier. P. 107

La fratrie est mise à l’épreuve de la vie.

 

Comme j’ai aimé les descriptions de la nature, celles de ce morceau de terre baigné par les eaux, celles aussi de ces plantes parties à la conquêtes de murs en ruine.

 

Et puis, il y a le rythme du roman. Composé de chapitres courts, l’histoire d’un été menacé par une tragédie devient haletante.

 

Ce roman, c’est un conte des temps modernes, une lecture d’une beauté cruelle qui vous laisse sans voix !

 

Publicité - livre offert par la maison d’édition

 

Des éditions de l'Observatoire, dans cette rentrée littéraire, vous aimerez peut-être aussi : 

 

Humus de Gaspard KOENIG - T Livres ? T Arts ? (over-blog.com)

L’Ultime Testament de Giulio CAVALLI - T Livres ? T Arts ? (over-blog.com)

Pour qui s’avance dans la nuit de Claire CONRUYT

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2023-04-28T06:00:00+02:00

Le Roitelet de Jean-François BEAUCHEMIN

Publié par Tlivres
Le Roitelet de Jean-François BEAUCHEMIN

Editions Québec Amérique

Nouvelle référence du Book club, "Le Roitelet" de Jean-François BEAUCHEMIN. Nous avons l'immense chance d'avoir une représentation de Vleel dans notre équipe, alors, de là à nous faire adorer la littérature quebécoise, vous comprendrez qu'il n'y a qu'un pas !

Le narrateur, un écrivain, vit à la campagne avec sa femme, Livia, son chien, Pablo, son chat, Lennon. Et puis, il y a son frère, schizophrène, dont il partage les tribulations, pour le meilleur comme pour le pire.
Au fil de 63 chapitres d'une, deux ou trois pages, Jean-François BEAUCHEMIN égrenne le quotidien d'un aidant, entendez par là une personne qui partage le quotidien d'une autre, l'accompagne dans sa vie, lui porte assistance, un travail à temps plein quoi !

Le propos, bien qu'empreint de lucidité et de transparence sur les évènements, est profondément lumineux.
Des exemples, j'en aurais mille. Mais je vais retenir cette merveilleuse image, le roitelet, pour décrire son frère :


A ce moment, je me suis dit pour la première fois qu'il ressemblait avec ses cheveux courts aux vifs reflets mordorés, à ce petit oiseau délicat, le roitelet, dont le dessus de la tête est éclaboussé d'une tâche jaune. Oui, c'est ça : mon frère devenait peu à peu un roitelet, un oiseau fragile dont l'or et la lumière de l'esprit s'échappaient par le haut de la tête.

Le "je" employé dans la narration vient renforcer la proximité établie tout au long du roman avec les personnages. J'ai eu l'impression, le temps de cette lecture, de vivre au milieu d'eux, dans leur maison et puis dehors.

Les descriptions de la nature sont prodigieuses. Elles sont autant d'invitation à s'y ressourcer pour s'apaiser.
Et puis, il y a la poésie qui teinte les mots. Jean-François BEAUCHEMIN use d'une plume tendre et délicate pour explorer les tréfonds de l'âme, là, chahutée par la maladie mentale.


Pendant quatre ou cinq secondes, j’ai senti s’emballer le sismographe de mon coeur et décrire l’affolant tracé d’un tremblement de terre. P. 111

Il y a encore ce rapport à l'Autre dans ce qu'il a de plus beau, de plus riche, de plus grand à nous offrir. Il questionne tout au long de ce 23ème roman notre place au monde.


Il me semblait que ma vie s’éclairait, que la naissance à laquelle j’avais participé de si près m’aidait à prendre ma mesure, à établir un ordre de grandeur quant à la place que je me préparais à occuper dans le monde. P. 10

J'ai été profondément émue par l'absence de jugement du narrateur sur les comportements de son frère, s'émancipant de fait des conséquences. Leur complicité est absolument fabuleuse. Tous deux sont profondément attachants dans ce qu'ils expriment. Et quelle plus belle preuve d'amour ?


S’il me faut absolument être un autre que moi-même, annonça-t-il, c’est à toi que je veux ressembler. P. 106

Le roman de Jean-François BEAUCHEMIN va vous serrer le coeur, j'en suis sûre.

Retrouvez toutes mes références du Book club :

"L'autre moitié du monde" de Laurine ROUX

"Mémoire de fille" d'Annie ERNAUX

Futur.e.s, comment le féminisme peut sauver le monde de Lauren BASTIDE

Les étoiles s'éteignent à l'aube de Vincent TURHAN

"L'heure des oiseaux" de Maud SIMONNOT

"Quand tu écouteras cette chanson" de Lola LAFON

"Ultramarins" de Mariette NAVARRO 

"Consolation" de Anne-Dauphine JULLIAND
 
"Malgré tout" de Jordi LAFEBRE
 
"Sidérations" de Richard POWERS

"Hamnet" et "I am I am I am" de Maggie O'FARRELL

"Les enfants sont rois de Delphine DE VIGAN
 
"Au-delà de la mer de David LYNCH

"Le messager" de Andrée CHEDID 

"L’ami" de Tiffany TAVERNIER

"Il n’est pire aveugle" de John BOYNE

"Les mouches bleues"» de Jean-Michel RIOU

"Il fallait que je vous le dise" de Aude MERMILLIOD, une BD

"Le roi disait que j'étais diable" et "La révolte" de Clara DUPONT-MONOD

"Un jour ce sera vide" de Hugo LINDENBERG

"Viendra le temps du feu" de Wendy DELORME

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2023-04-21T07:10:27+02:00

Alter ego de Cédric DE BRAGANÇA

Publié par Tlivres
Alter ego de Cédric DE BRAGANÇA

Editions Une seule vie

Roméo allait avoir bientôt 50 ans. Il ne fêtera toutefois pas cet anniversaire. Il vient de mourir. Il assiste à ses propres funérailles. Nous sommes au cimetière de Clamart. Il va nous conter la vie de l'Autre, cet homme qui a partagé pendant une dizaine d'années la vie de Judith, mère de deux adolescentes. Il y avait eu auparavant Marguerite. Mais, chaque fois, cette envie irrépressible de partir. Là, c'est un nouveau départ qui se profile !

Cédric DE BRAGANÇA, qui a réalisé de nombreux documentaires, nous propose d'explorer les troubles dissociatifs de l'identité. Roméo fait partie de ces gens qui souffrent d'une pathologie mentale et naviguent entre des personnalités distinctes. Dès lors, lui et son alter ego, vont nous proposer des histoires familiales entre chimère et réalité, faire le jeu des situations vécues ou désirées, un imbroglio éminemment romanesque, parfaitement maîtrisé.

Comme j'ai aimé emprunter les voies de la mémoire, c'est tellement fascinant.


Il est des sons, comme des odeurs, qui imprègnent si profondément le vécu que leur simple évocation suffit à se replonger dans l’évènement associé. D’en faire resurgir chaque émotion, chaque détail. Comme si le souvenir ne suffisait pas et qu’il fallait lui rajouter la puissance des sens pour en démontrer la permanence. P. 113

L'auteur nous propose un véritable traité de philosophie autour de l'existence. Est-elle le fruit du hasard ? ou bien de coïncidences ? Et si le chemin de la vie était tout écrit... voilà un sujet qui mériterait bien des copies doubles. Moi qui suis toujours saisie par les synchronicités, le propos me captive, vous pouvez l'imaginer.

J'ai aussi beaucoup aimé les passages sur l'errance du personnage, non plus entre son moi et l’autre, mais à travers le monde. Roméo, comme l'auteur je crois (deux « moi » en fait!), affectionnent tout particulièrement de voyager, prendre son sac à dos, partir explorer la beauté de la nature et faire des rencontres aussi aléatoires qu’uniques. Chez celles et ceux qui se vouent au trek, nul doute que les mots de Cédric DE BRAGANÇA trouveront une résonance toute particulière.


Marcher est une sorte de méditation en mouvement qui donne de l’épaisseur à la solitude. On y rencontre la mélancolie, la douceur, le vide, l’énergie, l’exaltation, me souffrance, la fierté, la faim. On y affronte les éléments. On y parcourt des sentiers aveugles ou buissonniers. On y rabote les chaos. On y rectifie le rapport au temps. On y mélange rêves et réalité. Bref, en marchant, on s’emmitoufle dans le monde invisible. P. 177-178

Je ne connaissais pas la plume de Cédric DE BRAGANÇA, elle est d'une grande poésie et témoigne d'heures à parcourir le monde, poser son regard sur l'humanité, en décrypter les expressions.


Si la beauté initiale, celle de l’enfance, est un cadeau, la beauté des adultes est une victoire. Puisque les traits se forment et se déforment au gré des accidents de la vie et que chaque être humain est responsable du visage qu’il se sera façonné. Les expressions ne mentent pas. Les rides, les signes du temps figurent l’histoire individuelle mieux que n’importe quelle confidence. P. 142

L'approche de l'humain est fine et délicate, subtile et perspicace. Ce roman est d’une profonde sensibilité. Je vous le conseille ! Merci à Gilles PARIS pour l'organisation d'une rencontre dédicace.

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2023-03-17T21:54:33+01:00

Petit traité du racisme en Amérique de Dany LAFERRIERE

Publié par Tlivres
Petit traité du racisme en Amérique de Dany LAFERRIERE

Ma #Vendredilecture, je la dois à l'équipe de Vleel qui a eu la très belle idée de lancer son #challengedelhiver.

J'avoue avoir un peu cherché un auteur québécois, et en fait, il est venu à moi, enfin pas seulement à moi... Dany LAFERRIERE est venu à Angers dans le cadre des Entretiens littéraires de la Collégiale Saint-Martin il y a quelques semaines. J'ai eu l'immense chance d'écouter l'Académicien et l'honneur d'échanger quelques mots avec lui au moment de la dédicace de son "Petit traité du racisme en Amérique" publié chez Grasset.

A bien y réfléchir, les deux auteurs rencontrés ce jour-là ont un point commun, leur lutte contre la banalisation de faits de violence. L'un titre son roman "Ceci n'est pas un fait divers" pour aborder un féminicide, vous avez reconnu Philippe BESSON bien sûr, l'autre choisit un registre hybride pour dénoncer les violences faites aux Noirs aux Etats-Unis.

Dany LAFERRIERE traite d'un sujet grave, l'atteinte portée à des hommes et des femmes, à la vie à la mort.

Le livre est composé d'un florilège de textes pouvant aller de quelques lignes à quelques pages dans lesquels l'écrivain égrène des faits, des émotions, des sentiments, il nous fait vibrer, quoi !

J'aime tout particulièrement celui qui évoque "L'honneur"


On ne saura jamais ce qui se passe
dans le coeur de la mère
d'un adolescent noir
tué par un policier blanc
qui a voulu faire croire qu'il s'agissait
d'un dangereux criminel
qui l'avait menacé.
Ce n'est pas assez d'avoir pris sa vie
il voulait aussi son honneur. P. 53

Il est question d'honneur encore quand Dany LAFERRIERE dresse le portrait d'hommes et de femmes, noirs, brillants, il leur rend hommage avec toute la noblesse dont sa plume est capable.

J'aime tout particulièrement le passage sur Miles DAVIS...


Il est vexé que des imbéciles, simplement parce qu'ils sont blancs, osent le regarder de haut. [...] Il prend sa revanche dans la musique en planant si haut qu'ils ne peuvent l'atteindre. P. 148

Il y a James VAN DER ZEE aussi, grand photographe américain, et puis, Harriet BEECHER STOWE, pour ne citer qu'eux.

Ce livre, vous pourrez le laisser sur votre table de salon.

Vous pourrez vous en saisir quand vous aurez quelques minutes, il vous donnera à méditer des heures.

Votre famille, vos amis, pourront l'ouvrir, s'en nourrir, il est à partager sans modération pour qu'un jour nous puissions dire : plus jamais ça ! Il fait partie de ces essentiels, ces repères qui nous rappellent, s'il en était nécessaire, que nous faisons tous partie de  l'Humanité. 

Petit traité du racisme en Amérique de Dany LAFERRIERE

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