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Articles avec #second roman catégorie

2023-09-08T19:05:17+02:00

Bleu nuit de Dima ABDALLAH

Publié par Tlivres
Bleu nuit de Dima ABDALLAH

Sabine WESPIESER éditeur

 

Entre deux dates, le 25 octobre 1961 et le 21 mars 2013, c’est une page de la vie d’un homme qui s’est écrite. Depuis sa naissance jusqu’à la mort d’une femme qu’il a aimée, Alma, le temps a passé et les liens avec la société se sont étiolés. Vivant ces dernières années seul, reclus dans son appartement du 20ème arrondissement de Paris, sous neuroleptiques, il décide le jour de la sépulture d'Alma de

 

récurer son logement, vider le contenu de son frigo et son congélateur dans un sac poubelle qu’il dépose au pied de l’immeuble, claquer la porte et...  jeter les clés dans une bouche d’égout ! Il va faire de la rue son univers. Dès lors, une nouvelle page de sa vie peut s’écrire… à moins que ça ne soit la précédente qui soit revisitée !

 

J’avais lu de Dima ABDALLAH « Mauvaises herbes », son premier roman qui m’avait captivée. J’ai attendu les vacances pour me plonger dans « Bleu nuit », une lecture coup de poing. J’en sors terrassée. C'est ma #VendrediLecture.

 

A travers l’introspection d’un homme, Dima ABDALLAH propose un roman d’une profonde sensibilité.

 

Ce roman, c'est bien sûr, l'approche du deuil. En lisant les premières pages, une image s'est imposée à moi. Vous vous souvenez peut-être de cet homme dansant près du cercueil de sa femme, Agnès LASSALLE, assassinée à Saint-Jean de Luz en mars dernier. J'ai, un temps, vu le narrateur animé de ce même élan.

 

Et puis, il y a les fantômes, ceux qui hantent les nuits, longtemps après le grand départ...

 


Je devais la tuer et l’enterrer si profond que plus jamais elle ne pourrait revenir. Un corps ne meurt pas facilement, il ressuscite parfois et vient s’allonger près de vous la nuit. P. 36

Une fois à l'extérieur, le narrateur s'adonne à la contemplation. Il porte un regard tendre sur ce qui compose la rue, l’environnement, et plus encore sur les femmes qu’il va rencontrer et avec lesquelles vont s’instaurer des rituels rythmant hebdomadairement une vie d’errance. 

 

J’ai beaucoup aimé les portraits brossés d’Emma, Ella, Martha, Carla, Layla… l’attention portée et la délicatesse dans la prise de contact, tout est affaire de dignité.

 

J’ai été captivée par sa capacité d’observation et foudroyée par sa sagacité à décrypter les gestes d’êtres écorchés.

 

C’est un roman éminemment sensoriel, il y a les images, les sons, les parfums, les saveurs, les contacts comme autant de vibrations qui confèrent à l’humain sa singularité... Dima ABDALLAH les explore pour ponctuer son roman, "Bleu nuit", de flashs lumineux, de moments d'émerveillement fabuleux.


Peut-être que si le beurre est d’une grande qualité et savamment dosé, si la cuisson est d’une justesse à couper le souffle, un croissant peut vous donner le courage d’un sourire même quand les lèvres sont si gercées que ça en est douloureux. Un croissant, ça peut peut-être suffire à une journée. P. 61

 

Dans une narration à la première personne du singulier, le rythme du coeur du lecteur s'accorde sur celui du personnage de fiction. Il se met à résonner au gré des perceptions avec des effets vertigineux.

 

L'histoire est ponctuée d'extraits de poèmes comme autant de respirations dans un roman que vous lirez en apnée. Dima ABDALLAH offre un rayonnement aux textes d'ARAGON, Louis-Ferdinand CELINE, Jean-Paul SARTRE, Romain GARY, Charles BAUDELAIRE, Milan KUNDERA, Marcel PROUST, Albert CAMUS...

 

Ce roman pourrait plaire à Alexandra KOSZELYK pour la citation, bien sûr, de Guillaume APOLLINAIRE extraite de "Cortège", Alcools, figurant en incipit, mais aussi pour les liens établis entre les arts. Dima ABDALLAH convoque, outre la poésie, la musique, la peinture, comme autant d’invitations à aller plus loin. J’aime ces résonances entre les différentes disciplines, ces regards croisés sur une certaine réalité.

 

Ce roman, sincèrement, ne passez pas à côté. 

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2023-04-18T17:51:06+02:00

Fuir l'Eden d'Olivier DORCHAMPS

Publié par Tlivres
Fuir l'Eden d'Olivier DORCHAMPS

Editions Pocket

Ce roman, c'est d'abord une rencontre organisée dans le cadre du Prix du Roman Cezam 2023 avec une soirée passée à la Bibliothèque Nelson Mandela d'Angers, un très beau moment comme peut les offrir la littérature.

Olivier DORCHAMPS, j'avais fait connaissance avec sa plume grâce aux 68 Premières fois, l'occasion d'un petit clin d'oeil à l'équipe. Il était alors question de son premier roman : "Ceux que je suis" aux éditions Finitude, un bijou.

J'attendais donc avec impatience de pouvoir le retrouver avec "Fuir l'Eden", déjà lauréat du Prix des Lecteurs de la Maison du Livre, du Prix Louis GUILLOUX, du Prix des Jeunes – Alain SPIESS. C'est une nouvelle fois un roman où l'humain prend toute sa place.

L’Eden, c'est le doux nom (à mourir de rire… jaune) donné à deux immeubles, une tour et une barre, classés auprès du Fonds Mondial pour les Monuments en Grande-Bretagne. L'Eden, c'est l'illustration de ce qu'a pu produire le mouvement architectural du brutalisme en termes de construction de l'après-guerre, pour le meilleur... comme pour le pire. Derrière les intentions de professionnels du bâtiment habitent des hommes et des femmes. Adam sait bien ce qu'il en est. Il aura bientôt 18 ans. Il est né dans un environnement familial violent rongé par l'alcoolisme du père et les violences conjugales. Sa mère a fui, le laissant avec Lauren, sa petite soeur, dans les griffes de l'ogre. Heureusement, leur grand-mère est venue à leur secours pour sauver ce qui pouvait l'être, leur corps et leur âme !

Ce roman, c'est d'abord un procès fait à ces constructeurs qui imaginent, sur plan, des lieux de vie qui n'ont absolument rien d'humains. Là où les hommes et les femmes aspirent à trouver un cocon, on leur offre des lieux tout justes à photographier pour des touristes avides de découvrir la trace d’un grand nom du monde de l’architecture.

La trace, elle, marque au fer rouge celles et ceux qui y habitent. Dis moi où tu vis, je te dirai qui tu es. L’Eden, qui n’a rien d’un coin de paradis, accueille des familles qui accumulent les fractures (sociales, financières…).

J'ai personnellement été profondément touchée par l'itinéraire de cette famille, une jeune femme qui donne naissance à Adam alors qu'elle n'a que 17 ans, un compagnon alcoolique, un projet immobilier qui sera la ruine du couple.


Non, personne ne lui avait jamais dévoilé que devenir une femme signifiait saigner tout sa vie. P. 65

Le personnage d'Adam est profondément émouvant. Il donne à voir ce que l’humain peut trouver de ressources pour se sortir d’une situation de crise. Il s’est fait protecteur de sa sœur jusqu'à lui imaginer une histoire... un conte de fée.


Claire a raison, certains moments méritent de ne pas finir noyés au milieu de centaine de photos. Ils nous appartiennent et se fondent doucement dans nos mémoires. Et il suffit de fermer les yeux pour les revisiter. P. 204

Cette maturité précoce, la charge mentale qui a pesé sur ses épaules, sont autant de cailloux dans sa chaussure le rendant un jour incapable de marcher.

Et puis, il y a cette formidable histoire avec une femme âgée, une professeure d'université, non-voyante, qui demande qu'on lui lise des livres à domicile.


Les livres permettent de mieux vivre et la vie, de mieux lire. C’est une question d’équilibre. P. 178

Je ne vous en dirai pas plus, juste que des bouffées d’air comme celle-ci, Olivier DORCHAMPS vous en réserve quelques unes.

Enfin, ce roman ne serait pas ce qu’il est sans une pointe de suspense. Autour d’une histoire d’amour impossible tourne en boucle un jeune homme assoiffé de liberté !

A la question des bibliothécaire d’une qualité qu’il pourrait revendiquer, Olivier DORCHAMPS répond : « l’altruisme ». Loin de lui l’idée de se targuer d’un trait de caractère que l’on ne retrouverait pas dans sa prose. Laissez-vous porter par sa sensibilité hors pair. Si l’homme aime à concourir à la mémoire d’une société bien mal en point, il croit aussi profondément en l’avenir de l’humanité. Dans un ciel fait de grisaille, lui sait faire la place à des rayons de soleil et dessiner des arcs-en-ciel !

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2023-02-03T07:00:00+01:00

Regarde le vent de Marie-Virginie DRU

Publié par Tlivres
Regarde le vent de Marie-Virginie DRU

Après la lecture #coupdepoing du roman de Frédéric COUDERC aux éditions Les Escales, "Hors d'atteinte", difficile de rebondir bien sûr.

J'ai pourtant réussi à trouver quelque chose d'intéressant...

Ma #Vendredilecture, c'est le second roman de Marie-Virginie DRU, "Regarde le vent" aux éditions Albin Michel que je remercie pour ce cadeau de rentrée littéraire.

Camille a la quarantaine. Elle est mariée avec Raphaël avec qui elle a eu deux filles, Jeanne et Louise de 12 et 14 ans. Elle est guide conférencière à Paris. Sa grand-mère, Annette, est décédée il y a trois mois. Elle a une irrépressible envie de se mettre à écrire. Comme une adolescente, elle commence à rédiger en cachette. Raphaël est un être torturé et violent. Il met la main sur ce qui apparaît comme le journal intime de sa femme, elle qui s'évertue à remonter le fil des générations passées, des histoires de femmes. Dès lors, tout peut arriver.

Ce roman, je l'ai lu avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Dès les premières pages, Marie-Virginie DRU réussit à instaurer un climat de tension à l'image d'une présence perverse qui s'insinuerait dans la vie de cette famille, telle un prédateur. Elle réussit un tour de force qui va aller en se décuplant. Je dois vous le dire, je n'en ai fait qu'une bouchée. Impossible de lâcher ce page-turner bien après minuit tellement le suspens était à son comble !

Et puis, il y a la thématique. Je suis toujours fascinée par la mémoire intergénérationnelle, ce que nous transmettent inconsciemment nos ancêtres. A la lecture de la citation de Delphine HORVILLEUR en introduction, 


"La buée des existences passées ne s'évapore pas :

elle souffle dans nos vies et nous mène là où nous ne pensions jamais aller."


j'ai plongé !

Marie-Virginie DRU brosse aussi des portraits de femmes fortes, des résistantes, des femmes marquées par des histoires douloureuses, voire dramatiques, de maternité, un peu comme une malédiction qui se transmettrait de mère en fille. 


Sa maman lui a toujours dit qu’une fois mère, on n’était plus jamais tranquille. P. 164 Camille

Enfin, il y a l'objet de toutes les convoitises, le livre familial. Associé aux articles 311 et 312 du Code Pénal qui dit :

"Il y a abus de confiance quand une personne s'approprie un bien que lui a confié sa victime. [...]

Aucune poursuite légale ne pourra être engagée pour l'abus de confiance entre époux."

vous comprendrez que l'enjeu est de taille !

Cerise sur le gâteau : le propos de Marie-Virginie DRU est ponctué de mille et une références culturelles, un petit bijou. Il y a des chansons, des poèmes, des sculptures, etc. Autant de merveilles qui résonnent entre elles. 

Dernier point, la plume, une découverte pour moi. Elle est foisonnante. Les personnages sont de fiction mais Marie-Virginie DRU réussit formidablement bien à leur donner corps. Les descriptions et les vies trépidantes de celles qu'elle décrit sont autant d'invitations à s'identifier à elles. Pari réussi du second roman !

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2023-01-04T07:00:00+01:00

Les Mangeurs de nuit de Marie CHARREL

Publié par Tlivres
Les Mangeurs de nuit de Marie CHARREL

Marie CHARREL nous revient avec "Les Mangeurs de nuit" aux éditions de L'Observatoire que je remercie pour ce très beau cadeau. L'année 2023 promet d'être belle ! Nous sommes le 4 janvier, premier coup de ❤️, l'occasion d'un petit clin d'oeil à Aleksandra SOBOL.

Nous partons pour le Canada revisiter son Histoire à travers des personnages aussi attachants que mystérieux. Il y a Hannah, une femme qui vit recluse depuis une dizaine d'année dans une maison en haute montagne. Elle porte en elle les traces de sa famille meurtrie par un courant migratoire croyant en l'eldorado mais qui, en posant le pied en terre américaine, révéla à Aika Tamura la grossière erreur de croire en un mariage arrangé. Elle fit partie en 1926 de ces "picture bride", des japonaises qui, en l'absence d'avenir dans leur pays, consentirent à une union sur photographies avec un étranger. Aika n'avait que 17 ans, lui, Kuma, 45. Et puis, il y a Jack, un creekwalker, l'un des 150 hommes recrutés pour veiller sur les cours d'eau et compter les saumons de la Colombie-Britannique. Il passe sa vie avec ses deux chiens. Hannah et Jack ont tous deux été bercés par des contes pour enfants. La réalité s'est chargée de leur faire vivre un tout autre destin. 

Vous vous souvenez peut-être du premier roman de Marie CHARREL, "Les Danseurs de l'aube", un coup de ❤️, déjà.

Dans ce roman, il y a tout ce que j'aime, que dis-je, j'adore !

Il y a d'abord la grande Histoire, celle à laquelle je n'ai pas accédé sur les bancs de l'école et qui me manque tant. La littérature me permet heureusement de combler ces failles.

A l'ouest du Canada, donc, il y a eu l'installation de Japonais, des hommes, à la fin du XIXème siècle et au début du XXème. Ils se lancent dans la pêche. Et puis, en 1907, éclatent des émeutes à leur encontre. Les Japonais perdent leurs licences professionnelles, ce n'est que le début de la déchéance de leurs droits de citoyens. C'est pourtant là que des femmes les rejoignent, notamment les "picture bride". Tous sont promis à une vie dans des camps. Ils vont devoir SURvivre.

C'est aussi dans ces années-là que des enfants amérindiens sont retirés de leurs familles pour les "éduquer".

L'écrivaine creuse le sillon de l'interculturalité, de la mixité des populations, du rapport dominants/dominés.

Dans ce roman, il y a encore l'aventure. Les parcours de vie de personnages très attachants sont chahutés, la vengeance un plat qui se mange froid. Le souffle romanesque de la plume de Marie CHARREL donne du rythme et tient le lecteur en haleine jusqu'à cette révélation... 

Et puis, dans "Les Mangeurs de nuit", la nature occupe une très grande place. Marie CHARREL nous offre de magnifiques descriptions et nous dévoile les secrets de la biodiversité.


L’avenir de la forêt dépend des saumons : « Les nutriments des arêtes s’enfoncent lentement dans le sol qu’elles fertilisent, irriguant de leurs bienfaits cèdres rouges, épicéas, pins tordus, pruches à l’ombre desquels les buissons de baies s’épanouissent au printemps, buffet des orignaux, des chèvres et des ours, attendant le retour du poisson béni. Sans le saumon, la forêt disparaît. P. 26-27

Quel plaisir de retrouver l'écriture de Marie CHARREL, elle est prodigieuse. Je ne suis d'ailleurs pas la seule à le penser. L'écrivaine fait une entrée remarquée dans la rentrée littéraire. "Les Mangeurs de nuit" font partie des dix romans de la première sélection du prestigieux Grand Prix RTL Lire – Magazine Littéraire 2023. Je lui souhaite le meilleur !

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2022-12-27T07:00:00+01:00

Le principe de réalité ouzbek de Tiphaine LE GALL

Publié par Tlivres
Le principe de réalité ouzbek de Tiphaine LE GALL

La Manufacture de Livres

Pour se baigner dans la culture ouzbek, vous pouvez aller visiter les expositions qui lui sont actuellement consacrées sur Paris, au Louvre et à l’Institut du monde arabe, ou bien rester délicatement installé.e dans votre salon avec le second roman de Tiphaine LE GALL, « Le principe de réalité ouzbek ».

Tout commence avec une réponse négative reçue par la narratrice à la candidature qu’elle a déposée pour un poste de professeur de français et de philosophie au lycée de Tachkent, capitale de l’Ouzbékistan. Plutôt que de la classer, elle décide de prendre son crayon et d’annoncer à la Directrice de l'établissement son arrivée avec mari et enfants pour la rentrée scolaire prochaine. Dès lors, tous les arguments sont bons !

La singularité du roman repose dans la manière de s’approprier le sujet. Habituellement, les lettres nous annonçant ne pas retenu pour un poste sont archivées sans autre forme d’intérêt. Là, l’écrivaine nous propose un sursaut !

Au fil d’une correspondance à une voix, celle d’une femme brestoise, Tiphaine LE GALL nous offre un voyage à destination de l’Asie Centrale et nous fait visiter un pays bordé par l’Afghanistan, le Kirghizistan, le Kazakhstan et le Turkménistan, un pays bordant la mer d’Aral.

La géographie du territoire aujourd’hui est liée à son histoire. Souvenez-vous, l’Ouzbékistan était sous domination russe jusqu’en décembre 1991, période de dissolution de l’U.R.S.S.. Ses frontières sont le fruit des accords d’Alma-Ata, tout comme l’Ukraine.

Et puis, il est un autre voyage, celui de l’intime. Dans cette longue lettre écrite à la première personne du singulier, la narratrice se dévoile. Elle nous relate ses souvenirs, son enfance, sa jeunesse, et puis la vie à deux, la naissance de leurs enfants. Elle nous explique le pourquoi de cette candidature, cette volonté farouche d’en découvre avec son existence et d’écrire une nouvelle page de sa vie, cette envie irrépressible de découverte.


A chaque étape initiatique, j’ai dû composer avec la peur, me suis retrouvée nue face à elle ; j’essaie de l’apprivoiser. De m’en accommoder. Il faut passer outre. Je l’ai appris avec le temps : il faut la laisser venir, la regarder gonfler comme une vague, ne pas céder à sa tentative d’intimidation, et la laisser passer sans bouger. Derrière se trouve l’expérience, la porte, la révélation peut-être. P. 136

Elle explore le sujet de l’amour et fait l’éloge du désir.


Le désir est un mouvement, libre, sans concession. Le désir est une courtisane. Il faut l’accepter. Choisir de suivre la vague, être emportée sur sa crête, et accepter la peur, la chute, la blessure ; ou la laisser passer, attendre qu’elle nous recouvre, puis qu’elle disparaisse. P. 167

Ce roman, il me fait penser à l’œuvre de Luca IZZO, « Introspection ».

Je me suis laissée porter et surprendre par la confession de cette femme. Tiphaine LE GALL nous offre un récit rythmé et fascinant.

Merci aux éditions La Manufacture de livres de m’avoir offert cette jolie lecture. C'est mon #mardiconseil.

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2022-08-03T06:59:50+02:00

Les enfants véritables de Thibault BERARD

Publié par Tlivres
Les enfants véritables de Thibault BERARD

Parce que je ne lis plus les quatrièmes de couverture des livres depuis belle lurette, dans le cadre de l'édition estivale #jamaissansmon68, je vous propose de découvrir les premières lignes d'un roman de la #selection2022 des 68 Premières fois : "Les enfants véritables" de Thibault BERARD chez Les éditions de L’Observatoire, un coup de coeur.  

 

 
Théo élève seul ses enfants, Simon et Camille, de 7 et 4,5 ans, depuis le récent décès de sa compagne Sarah. Cléo fait son entrée, tout en délicatesse, dans ce cocon familial meurtri. Elle est douce, Cléo, elle est gentille, et puis, c'est l'amoureuse de papa, alors chacun lui fait une petite place mais les démons ne cessent de hanter tout ce petit monde. Derrière les sourires se cachent la douleur de l'absence et du manque, la peur de la mort aussi. S'il est difficile d'accepter cette nouvelle présence et le petit pas de côté fait avec les habitudes, ce n'est pas plus simple pour Cléo, qui, elle-même, a connu une famille loin des standards. Elle a été élevée par son père, Paul, dans la vallée de l’Ubaye. Quand elle n'avait que 7 ans, elle a dû faire une place à César dont le père, alcoolique, était décédé. Il habitait juste à côté et Paul avait un grand coeur, alors, il l'avait adopté. Quant à Solène, c'était le fruit d'une relation extraconjugale. Diane Chastain n'a jamais assumé son rôle de mère. Cette « mère-herbe-folle » avait besoin d'air et disparaissait régulièrement. Après 15 mois d'absence, elle est rentrée à la maison. Elle était enceinte. Là aussi, Paul a fait amende honorable. Il aimait trop sa femme pour ne pas accepter ce bébé à naître. Alors pour Cléo, cette entrée en matière, c'est un peu comme un plongeon vers l'inconnu !
Quelle plus belle parole prononcée par sa fille...


- Mais Papa, on est d'accord, c'est moi ton enfant véritable ?

C'est comme ça que l'idée a germé dans l'esprit de Thibault BERARD d'écrire un second roman et de traiter le sujet. Je ne remercie jamais assez "sa Cléo".
Dès les premières pages, je me suis prise à penser que mon hamac allait rapidement devenir une piscine ! A la page 54, les premières larmes coulaient sur mes joues, des larmes de chagrin mais aussi, des larmes de bonheur, le bonheur de lire des mots aussi forts, aussi beaux.
Thibault BERARD n'en était pas à son coup d'essai. J'avais lu son premier roman, "Il est juste que les forts soient frappés", un coup de maître.
Ce roman, une nouvelle fois, est largement inspiré de la vie personnelle de l'auteur, mais pas que. Il y a aussi toute une part de son livre suggérée par son imaginaire. Et ce qui est merveilleux chez Thibault BERARD, c'est le jeu de la narration. Si dans les premières pages, il prête sa plume à Diane Chastain, un personnage féminin, il trouve un équilibre ensuite avec le "je" de Paul, son compagnon. Et puis, un peu comme quand vous montez dans un manège de chevaux de bois, passée l'installation, il y a la mise en mouvement dans un rythme lent, s'accélérant progressivement pour terminer dans un tourbillon étourdissant. Là, les voix se multiplient, résonnent entre elles, se lient, se croisent, s'entrecroisent... dans une ivresse totale.
Ce second roman, c'est un bijou !

Si vous aussi prônez un été #jamaissansmon68, vous pouvez aussi opter pour...

"Faire corps" de Charlotte PONS

"Aux amours" de Loïc DEMEY,

 "Les nuits bleues" de Anne-Fleur MURTON,

"Furies" de Julie RIOCCO,

"Ubasute" d’Isabel GUTIERREZ,

"Les envolés" d'Etienne KERN,

"Blizzard" de Marie VINGTRAS,

"Saint Jacques" de Bénédicte BELPOIS,

 "Les confluents" de Anne-Lise AVRIL,

"Le parfum des cendres" de Marie MANGEZ,

"Jour bleu" de Aurélia RINGARD

"Debout dans l'eau" de Zoé DERLEYN,

"La fille que ma mère imaginait" de Isabelle BOISSARD...

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#bookstagram #selection2022 #secondroman #7anscasefete #onnarretepasles68 #un68sinonrien #touchepasamon68 #jepensedoncje68  #lesenfantsveritables #thibaultberard

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2022-07-30T06:27:03+02:00

Faire corps de Charlotte PONS

Publié par Tlivres
Faire corps de Charlotte PONS
 
Le bal des 68 Premières fois se poursuit avec un second roman, "Faire corps" de Charlotte PONS.
 
Sandra, la narratrice, a la quarantaine. Depuis le drame de son petit frère, elle a pris la décision de ne jamais être mère. De fait, ses aventures avec les hommes n’ont été que de courte durée, des soirées sans lendemain. Quand son ami d’enfance, Romain, homosexuel, lui fait part de son désir d’un enfant et des nombreuses tentatives de GPA (Gestation Pour Autrui) aux Etats-Unis, sans succès, Sandra se retrouve malgré elle au cœur d’une sombre histoire de prêt de son corps.
 
La narration à la première personne de ce roman vous prend à la gorge dès les premières pages, et ce n’est pas le contexte actuel de retrait du droit à l’avortement de la Constitution américaine qui viendra désamorcer la bombe.
 
Avec ce roman, Charlotte PONS explore les différentes dimensions d’une mère…


Celle qui porte, celle qui met au monde, celle qui garde au monde, celle qui transmet, celle qui aime, celle qui nourrit, celle qui éduque. Qu’est-ce qui fait la mère ? P. 44

et pose la question de l’identité d’une femme à travers le filtre de la maternité.


J’avais dès l’enfance éprouvé ma nature périssable, devenue femme je comprenais que j’avais aussi une date de péremption. P. 121

L’itinéraire de Sandra illustre bien toutes les phases de la grossesse. Sous les projecteurs de la GPA, elle prend une dimension toute particulière, celle des doutes, ce qui rend le roman captivant. Imaginez, neuf mois à porter un enfant, neuf mois à perdre la totale maîtrise de son corps, et pas une seule seconde vous n’auriez de doute sur l’avenir de l’embryon qui deviendra fœtus, et puis un corps de chair et d’os, voué à d'autres que soi.
 
J’ai été profondément troublée par la distance à mettre avec ce bébé alors même que la société évolue et que tout invite à la fusion des corps, « faire corps », et que, voulue ou non, cette grossesse engendrera une microchimère, ce transfert de cellules fœtales vers le corps de la mère, modifiant à jamais son ADN. De cette grossesse, la mère porteuse en gardera l’empreinte jusqu'à la fin de sa vie. Tellement fascinant.
 
Et puis, dans ce roman, il y a des moments d’ivresse, des moments d’une intime beauté que rien d’autre dans la vie ne peut offrir que la maternité.
 
Ce second roman de Charlotte PONS est d’une force incroyable.
 
Ce roman aurait pu être militant, il ne l’est pas, il met toutefois le doigt sur les enjeux éthiques, sociaux, économiques, sanitaires, politiques… que revêt la GPA. L’écrivaine nourrit notre position personnelle sur le sujet. Par le biais d'une fiction, la situation des mères porteuses ukrainiennes au tout début de la guerre, sur lesquelles j'avais beaucoup lu dans les médias, résonne d'une toute nouvelle manière.
 
La plume de Charlotte PONS est directe et les mots puissants. Frappée en plein cœur.

Et parce qu'il ne peut y avoir de bal des 68 Premières fois sans musique, je vous propose "Summertime" de Ella FITZGERALD, la grande Dame du Jazz noir américain. Ce titre faisait partie de la playlist de Charlotte PONS !

http://tlivrestarts.over-blog.com/2022/07/summertime-d-ella-fitzgerald.html

http://tlivrestarts.over-blog.com/2022/07/summertime-d-ella-fitzgerald.html

Retrouvez les autres références de la #selection2022 :

"Les enfants véritables" de Thibault BERARD

"Aux amours" de Loïc DEMEY,

 "Les nuits bleues" de Anne-Fleur MURTON,

"Furies" de Julie RIOCCO,

"Ubasute" d’Isabel GUTIERREZ,

"Les envolés" d'Etienne KERN,

"Blizzard" de Marie VINGTRAS,

"Saint Jacques" de Bénédicte BELPOIS,

 "Les confluents" de Anne-Lise AVRIL,

"Le parfum des cendres" de Marie MANGEZ,

"Jour bleu" de Aurélia RINGARD

"Debout dans l'eau" de Zoé DERLEYN,

"La fille que ma mère imaginait" de Isabelle BOISSARD...

#68premieresfois #68premieresfoisetplussiaffinité #68premieresfois2022 #litteraturefrancaise #premiersromans #68unjour68toujours
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2022-07-02T06:00:00+02:00

Les enfants véritables de Thibault BERARD

Publié par Tlivres
Les enfants véritables de Thibault BERARD

Le bal des 68 Premières fois se poursuit. 

Après :

"Aux amours" de Loïc DEMEY,

 

 "Les nuits bleues" de Anne-Fleur MURTON,

"Les maisons vides" de Laurine THIZY,

"Furies" de Julie RIOCCO,

"Ubasute" d’Isabel GUTIERREZ,

"Les envolés" d'Etienne KERN,

"Blizzard" de Marie VINGTRAS,

 

"Saint Jacques" de Bénédicte BELPOIS,

 "Les confluents" de Anne-Lise AVRIL,

"Le parfum des cendres" de Marie MANGEZ,

"Jour bleu" de Aurélia RINGARD

"Debout dans l'eau" de Zoé DERLEYN,

"La fille que ma mère imaginait" de Isabelle BOISSARD,

place au second roman de Thibault BERARD, "Les enfants véritables" chez Les éditions de L’Observatoire, un coup de coeur.
Théo élève seul ses enfants, Simon et Camille, de 7 et 4,5 ans, depuis le récent décès de sa compagne Sarah. Cléo fait son entrée, tout en délicatesse, dans ce cocon familial meurtri. Elle est douce, Cléo, elle est gentille, et puis, c'est l'amoureuse de papa, alors chacun lui fait une petite place mais les démons ne cessent de hanter tout ce petit monde. Derrière les sourires se cachent la douleur de l'absence et du manque, la peur de la mort aussi. S'il est difficile d'accepter cette nouvelle présence et le petit pas de côté fait avec les habitudes, ce n'est pas plus simple pour Cléo, qui, elle-même, a connu une famille loin des standards. Elle a été élevée par son père, Paul, dans la vallée de l’Ubaye. Quand elle n'avait que 7 ans, elle a dû faire une place à César dont le père, alcoolique, était décédé. Il habitait juste à côté et Paul avait un grand coeur, alors, il l'avait adopté. Quant à Solène, c'était le fruit d'une relation extraconjugale. Diane Chastain n'a jamais assumé son rôle de mère. Cette « mère-herbe-folle » avait besoin d'air et disparaissait régulièrement. Après 15 mois d'absence, elle est rentrée à la maison. Elle était enceinte. Là aussi, Paul a fait amende honorable. Il aimait trop sa femme pour ne pas accepter ce bébé à naître. Alors pour Cléo, cette entrée en matière, c'est un peu comme un plongeon vers l'inconnu !
Dès les premières pages, je me suis prise à penser que mon hamac allait rapidement devenir une piscine ! A la page 54, les premières larmes coulaient sur mes joues, des larmes de chagrin mais aussi, des larmes de bonheur, le bonheur de lire des mots aussi forts, aussi beaux.

Thibault BERARD explore avec gourmandise et tout en délicatesse l'entrée de Cléo, le personnage principal de cet opus, dans la famille de Théo. Il s'agit d'un lent apprivoisement, de l'un, de l'autre, des uns, de l'autre, parce que oui, il y a une communauté initiale... à trois, et un individu de plus qui va progressivement chercher sa place, un peu comme un corps étranger à greffer dont on attend l'acceptation ou le rejet. Au gré, des opportunités, festives les premières, courantes de la vie pour les suivantes, les choses lentement s'organisent sous l'autorité d'un chef d'orchestre, Théo, le dénominateur commun de tous. Théo c'est le père, Théo c'est l'homme fou amoureux de Cléo, Théo c'est l'amant de Cléo.

Les fondations de cette nouvelle famille reposent sur ses épaules, à lui. C'est un sacré pari pris sur l'harmonie d'un groupe, l'alliance entre ses membres, la solidarité, la fraternité, l'équilibre, tout ce qui a besoin, pour se construire, de beaucoup d'amour, mais aussi, de mots. Avec Thibault BERARD, je suis toujours impressionnée l'exploration des maux. A chaque sujet, l'expression et le partage de sentiments, d'états d'âme, d'émotions que l'auteur sait allégrement transmettre à ses lecteurs.

Thibault BERARD traite ici magnifiquement de la mère, légitime et d'adoption, de son rôle, de sa place. A travers deux personnages qu'il fait se croiser, celui de Diane Chastain, la mère de Cléo, cette actrice qui a préféré se consacrer à sa vie professionnelle, et celui de Cléo qui consacre ses jours et ses nuits à tisser du lien. Ce que j'aime chez Thibault BERARD, c'est qu'il n'y a pas de jugement, chacun mène sa vie comme il croit bon de la mener, faisant des choix, les assumant... ce qui n'empêche pas d'avoir des prises de conscience et de vouloir changer du tout au tout.

L'écrivain restitue magnifiquement les sensations des femmes et leur rôle dans l'approche des enfants, ces trésors de candeur, qu'elles vont accompagner, au fil du temps, dans leur construction d'adulte. Il est question de transmission dans la relation et de confiance pour permettre à chacun de trouver sa voie, s'émanciper et passer à l'expression de soi... Ainsi se construit une constellation avec toutes ces étoiles qui ne demandent qu'à scintiller.

 

Ce roman, une nouvelle fois, est largement inspiré de la vie personnelle de l'auteur, mais pas que. Il y a aussi toute une part de son livre suggérée par son imaginaire. Et ce qui est merveilleux chez Thibault BERARD, c'est le jeu de la narration. Si dans les premières pages, il prête sa plume à Diane Chastain, un personnage féminin, il trouve un équilibre ensuite avec le "je" de Paul, son compagnon. Et puis, un peu comme quand vous montez dans un manège de chevaux de bois, passée l'installation, il y a la mise en mouvement dans un rythme lent, s'accélérant progressivement pour terminer dans un tourbillon enivrant. Là, les voix se multiplient, résonnent entre elles, se lient, se croisent, s'entrecroisent... dans une ivresse totale.

L'écrivain, qui a le souci du détail, pousse la fantaisie jusque dans les titres de chapitres qui, pour certains, prendront la forme d'une ritournelle.

Impossible de vous quitter sans la playlist de Thibault BERARD, j'y ai choisi "Ready to start" de Arcade Fire. Cette chanson colle à merveille au propos, je vous assure, parce que... je ne vous ai pas tout dit !

https://youtu.be/9oI27uSzxNQ

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2022-06-18T06:00:00+02:00

Aux amours de Loïc DEMEY

Publié par Tlivres
Aux amours de Loïc DEMEY
Le bal des 68 Premières fois se poursuit.
 
Après :

 "Les nuits bleues" de Anne-Fleur MURTON

"Les maisons vides" de Laurine THIZY,

"Furies" de Julie RIOCCO,

"Ubasute" d’Isabel GUTIERREZ,

"Les envolés" d'Etienne KERN,

"Blizzard" de Marie VINGTRAS,

"Saint Jacques" de Bénédicte BELPOIS

 "Les confluents" de Anne-Lise AVRIL

"Le parfum des cendres" de Marie MANGEZ

"Jour bleu" de Aurélia RINGARD

"Debout dans l'eau" de Zoé DERLEYN

place à un roman aux allures de manège poétique, un tourbillon chimérique, une lente divagation...

Loïc DEMEY et les Éditions Buchet Chastel nous proposent un texte hors norme : « Aux Amours », une douce rêverie.
 
Le texte s’étire sur une centaine de pages, en une seule phrase, c’est là toute l’originalité, une tendre et délicate attention portée à une femme que le narrateur attend, espère, convoite, désire, fantasme… jusqu’à son dernier souffle.
 
On aurait pu imaginer que je m'y ennuie. En fait, cette lecture, je l’ai savourée.
 
Comme quoi, c'est bon de se laisser surprendre par la littérature, et dans le genre, les fées des 68 Premières fois savent y faire !
 
La plume est délicieuse, c’est une succulente friandise, un bonbon tendre, une gourmandise exquise.
 
Vous connaissiez peut-être "Je, d'un accident ou d'amour". Je me prends à penser que l'auteur fait de l'amour son sujet de prédilection, non ?
 
Pour l'accompagner, j'ai choisi le titre "Manège" de November Ultra, histoire de poursuivre l'enchantement...
http://tlivrestarts.over-blog.com/ 2022/06/manege-de-november-ultra.html

http://tlivrestarts.over-blog.com/ 2022/06/manege-de-november-ultra.html

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2022-06-02T05:27:13+02:00

Les rêves échoués de Carine JOAQUIM

Publié par Tlivres
Les rêves échoués de Carine JOAQUIM
Le premier roman de Carine JOAQUIM, "Nos corps étrangers", c’était un coup de maître, je m’en souviens comme à sa première heure, c’était une lecture coup de poing, un roman que l’on n’oublie pas, un de ces premiers romans que les fées des 68 Premières fois avaient sélectionné.
 
Et puis il y a eu cette rencontre à La Collégiale Saint-Martin avec Laurent PETITMANGIN et leur maison d’édition, La Manufacture de livres.
 
Inutile de vous dire que j’attendais avec impatience le second roman. Je l’ai lu. Il sort aujourd’hui en librairie. Carine JOAQUIM confirme son immense talent. Avec le premier, j’avais terminé avec un mal au cœur déchirant, là j’ai fini en larmes… j’aime que la littérature me bouleverse.
 
Tout commence avec une commission éducative qui réunit parents et professeurs sous l’autorité de Madame Salignes et son adjointe pour juger du cas de Clarisse, la jeune adolescente de 13 ans, diagnostiquée élève à haut potentiel. Ses parents sont séparés. Clarisse vit une semaine chez sa mère, une semaine chez son père. Au collège, Clarisse répond aux interpellations par l’agression, elle use d’un vocabulaire vulgaire, insupportable pour le corps enseignant. Tout va de mal en pis. Heureusement, elle entretient sur internet une relation avec un certain Sergio, au scooter rouge, un garçon à qui elle se confie, qui la comprend et avec qui elle a rendez-vous. Elle ne sait pas encore que c’est précisément à ce moment là que sa vie va basculer.
 
Dès les premières lignes, Carine JOAQUIM plante le décor, la commission éducative permet de tendre l’arc pour lequel les flèches ne vont pas manquer. Si l’écrivaine évolue elle-même dans ce cadre professionnel dans lequel elle puise son inspiration, elle sait ô combien une jeune adolescente ne saurait être réduite au statut d’élève et à ce qu’elle donne à voir par ses comportements dans l’établissement dans lequel elle est scolarisée. C’est ainsi qu’elle va, dans une narration ingénieuse, glisser des passages en écriture italique, un livre dans un livre, pour expliquer son histoire, les événements qui font aujourd’hui ce qu’elle est, en tant qu’être humain.
 
Clarisse est mal dans sa peau, tout l’agresse, alors elle répond :


J’entends rugir les mots depuis les profondeurs de ma rage, et c’est par des hurlements qu’ils quittent ce corps trop petit pour de si grandes émotions. P. 41

Comme dans "Nos corps étrangers", le rapport au corps est un fil rouge de ce roman. Il y a des descriptions presque cliniques de ce que Clarisse vit, traverse, exulte. J’ai vibré dès les premières évocations, ressenti moi dans mes tripes de femme, d’épouse, de mère aussi, ce que Carine JOAQUIM décrit. J’ai senti bien sûr la menace poindre, la tension s’établir pour ne plus se relâcher que dans les toutes dernières lignes. Si on a l’habitude de parler de thriller psychologique, là, je parlerai plutôt de thriller charnel, un registre littéraire dans lequel ce qui nous incarne physiquement en tant qu’individu, nos membres, nos organes, nos tissus… dit tout des traces laissées, des blessures, des douleurs.
 
Et puis, dans ce roman, il y a l’évasion, cette sortie de soi, sortie de la maison, sortie des frontières, au sens propre comme au figuré. Clarisse va vivre un périple initiatique, des moments de gloire, une véritable renaissance. Carine JOAQUIM choisit le Portugal comme lieu de pérégrinations. Vous allez visiter Sesimbra, Lisbonne, Alcobaça, Nazaré… comme jamais un guide touristique n’aurait pu vous l’offrir. Portée par la complicité d’un homme, sa bienveillance, sa maturité, sa capacité à la comprendre, Clarisse va s’ouvrir au monde avec des moments… de grâce ! Comme j’ai aimé les passages avec la vieille femme, Dona Capitolina, des moments d’apprivoisement empreints d'une profonde humanité.


Ses mots sont pour moi dénués de sens, mais la musique de sa voix enrouée me porte, moi si légère face à ce chant qui dit le poids des ans. P. 105

Mais comme le chantait les Rita MITSOUKO, « Les histoires d’amour finissent mal », les rêves ne peuvent durer une éternité… c'est d'ailleurs ce qu'annonce le titre du roman !


Sans doute, la grâce de ce qui vient d’éclore ne peut finir, tôt ou tard, autrement que piétinée et salie. P. 180

de quoi relancer le rythme du roman, se remettre à haleter !
 
Ce roman, je l’ai lu d’une traite, j’avais envie de savoir ce qui torturait Clarisse et puis, les vannes ont lâché. J’ai terminé ma lecture en pleurs, les larmes ont coulé. Carine JOAQUIM a ce talent fou de vous prendre aux tripes, de vous faire vivre des émotions fortes par le biais d’une fiction, de vous révéler, à vous-même, votre propre part de sensibilité.
 
Du grand art… littéraire ! Pari réussi avec ce second roman, bravo.

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2022-04-23T06:00:00+02:00

Saint Jacques de Bénédicte BELPOIS

Publié par Tlivres
Saint Jacques de Bénédicte BELPOIS
Le bal des 68 Premières fois se poursuit.

Après :

 "Les nuits bleues" de Anne-Fleur MURTON

"Les maisons vides" de Laurine THIZY,

"Furies" de Julie RIOCCO,

"Ubasute" d’Isabel GUTIERREZ,

"Les envolés" d'Etienne KERN,

"Blizzard" de Marie VINGTRAS,

place à "Saint Jacques", le second roman de Bénédicte BELPOIS aux éditions Gallimard.

Tout commence avec cet appel téléphonique. Françoise, la sœur cadette, ne pouvait être que porteuse d’une mauvaise nouvelle. « Maman est morte ». Il y a eu les funérailles et puis le passage chez le notaire. Là, un testament avec les dernières volontés, la répartition des biens. Françoise gardera l’appartement de Sète dans lequel elle vivait avec sa mère, Paloma, elle, aura la maison des Cévennes de Camille où elle pourra lire un cahier laissé à son attention.
 
Quel plaisir de retrouver la plume de Bénédicte BELPOIS découverte avec les 68 Premières fois il y a quelques années.
 
Le roman entretient le mystère tout au long de l’histoire. Cette maison de montagne regorge de secrets si bien gardés. Une nouvelle fois, j’ai été marquée par le souvenir des murs


Je pourrais dire que la maison a pris la parole en premier, qu’elle m’a raconté, ce matin-là, sa solitude insupportable, ses petits maux et ses grandes douleurs. Je l’ai écoutée gémir, subjuguée, interdite. P. 29

Bénédicte BELPOIS nous immerge dans une famille fracassée dès l’adolescence des filles. Il y a cette prédisposition à se voir confrontée aux blessures, à la douleur, à l’absence, un peu comme si la malédiction se transmettait de génération en génération, comme si les mères n’avaient que ce modeste baluchon à offrir à leurs filles. Le propos est foudroyant. Il y est question de sexualité, de maternité, de déni, d’abandon… mais aussi de fraternité, d’amour. Il y est évoqué la condition de femme, sa place aux côtés, avec et pour l’homme, l’être décliné au masculin.


Ce sont les hommes qui nous font femmes Paloma. Nous avons besoin d’amour pour croître, pour nous sentir merveilleuses, pour exister. P. 105

Il y a les interactions entretenues, l’équilibre et l’évolution des règles du jeu dans une société en mutation.
 
Ce roman c’est aussi une ode à la montagne, la beauté de la nature, sa capacité à reconstruire celles et ceux qui ont eu à vivre des tragédies. Il y a des descriptions sublimes du lever du soleil dans les Cévennes.


Ce n’était plus la grande conversation de la nuit, celle qu’elle s’autorise quand les hommes dorment, c’était le murmure sibyllin du matin, fait de mille chuchotements : feuilles qui frémissent, becs qui chantent, herbes qui dansent. P. 127

Il y a bien sûr les rats des villes et les rats des champs. Dans une prose parfaitement orchestrée, le roman présente une alternative à la vie à la mode citadine. Il y est question de la vraie vie, non pas que l’autre soit fausse, mais il s’agit d’une vie empreinte d’authenticité, une vie faite de tous ces petits gestes solidaires et bienveillants, de l'altruisme à l'état pur.


En silence c’était celui des gens de la terre où l’on sent mieux qu’on ne parle. P. 115

La plume est belle, les messages denses et puissants. J’ai aimé la force des sentiments qui porte des personnages à la vie complexe. C’est un beau plaidoyer en faveur de l’acceptation de l’autre, de ses différences comme autant de richesses à découvrir.

Je ne peux décemment pas vous laisser sans quelques notes de musiques, choisies par l'autrice s'il vous plaît...

http://tlivrestarts.over-blog.com/2022/04/cucurrucucu-paloma-de-caetano-veloso.html

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