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Articles avec #rl2021_septembre catégorie

2023-04-13T06:01:55+02:00

Les Bourgeois de Calais de Michel BERNARD

Publié par Tlivres
Les Bourgeois de Calais de Michel BERNARD

Editions de La Table Ronde, Collection La Petite Vermillon

Coup de ❤️ pour ce roman qui sort aujourd’hui en librairie en version poche. 

À l’âge de 13 ans, Auguste RODIN se souvient de la découverte en famille de la statue du Maréchal Ney, la création du père RUDE inaugurée en 1853. L’homme qu’il est devenu travaille la glaise et fabrique des plâtres que le bronze immortalisera. « L’Âge d’Airain », réalisé il y a une dizaine d’année quand il habitait encore Bruxelles, sera prochainement installé dans le Jardin du Luxembourg. Rodin a 44 ans quand Omer DEWAVRIN, Maire de Calais, pousse la porte de l’atelier parisien de la rue de l’Université. RODIN en bénéficie depuis 4 ans pour réaliser « La Porte de l’Enfer » destinée au Musée national des arts décoratifs. L’élu lui passe une commande au nom de la municipalité, celle de réaliser une oeuvre pour honorer la mémoire d’Eustache DE SAINT-PIERRE, l’un des six Bourgeois de Calais portés volontaires pour remettre, pieds nus, cheveux découverts et la corde au cou, la clé de la cité vaincue au roi d’Angleterre, Edouard III. 
Le roman de Michel BERNARD, c’est l’histoire d’une oeuvre, une sculpture qu’Auguste RODIN mettra 10 ans à réaliser.

C’est d’abord, l’histoire d’une création artistique en lien avec les évènements locaux. Auguste RODIN se mettra en quête d’archives témoignant du contexte de la guerre des Cent Ans et de ce sacrifice. Il se rendra aussi régulièrement à Calais pour s’imprégner des lieux.


La lumière n’était pas la même qu’à Paris. La clarté du jour sur les choses, l’éclairage du lieu, cela comptait beaucoup. P. 106

Michel BERNARD en profite pour magnifier la ville de Calais et son bord de mer, le Cap Blanc-Nez et ses falaises de craie. L’écrivain délivre l’histoire des fabriques de dentelle et de tulle de Saint-Pierre.
A travers cette médiation artistique, Michel BERNARD célèbre le travail de l’artiste, sa part de création dans le parti pris d’une interprétation. 

C’est aussi le lien entre l’artiste et son oeuvre, à l’image d’un enfantement et de la coupe du cordon à sa livraison au commanditaire.

C’est plus encore un hommage au pas de côté qu’aimait réalisé Auguste RODIN par rapport aux canons de la sculpture, les modèles académiques du XIXème siècle. Auguste RODIN faisait partie de ces hommes qui n’avaient que faire du regard des autres sur ses oeuvres, lui les assumait tout en prenant le risque de déplaire. 

A travers l’histoire d’une oeuvre, Michel BERNARD nous livre une biographie fascinante d’Auguste RODIN, le tout servi par une plume éminemment romanesque.

Avant de conclure, je voudrais saluer la première de couverture dessinée par Aline ZALKO, quelle plus belle illustration !

J’ai adoré tout simplement. Je remercie très sincèrement Les éditions de La Table Ronde pour ce joli cadeau.

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2022-08-31T20:29:26+02:00

Lorsque le dernier arbre de Michael CHRISTIE

Publié par Tlivres
Lorsque le dernier arbre de Michael CHRISTIE

Cette nouvelle lecture, je l'ai puisée dans la PAL de ma grande fille. Après :

"Les cerfs-volants" de Romain GARY

"Mon ghetto intérieur" de Santiago H. AMIGORENA,

"Colette et les siennes" de Dominique BONA, 

"La cause des femmes" de Gisèle HALIMI,

"Les grandes oubliées" de Titiou LECOQ...

nouvelle pépite, le premier roman de Michael CHRISTIE : "Lorsque le dernier arbre" aux éditions Albin Michel.

Nous sommes en 2038. Jake est orpheline d’une mère musicienne de l’orchestre symphonique de Los Angeles tuée dans un accident de train. Elle est dendrologue, botaniste de formation, c’est une spécialiste des arbres. Depuis 9 ans, elle travaille comme guide de la Cathédrale de Greenwood, une île de la Colombie-Britannique sur laquelle subsiste la dernière forêt primaire que les gens riches viennent visiter comme de précieux vestiges. Partout ailleurs, les arbres ont disparu, c'est le Grand Dépérissement. Les sols s’assèchent. La surface de la planète est recouverte d’une couche de poussière asphyxiante. Lors d'une visite, elle repère deux pins brunis, deux arbres appelés "Doigt d'honneur de Dieu" dont les aiguilles décolorées lui donnent à penser qu'ils sont menacés. Si leur vie est en danger et que le public le découvre, toute la forêt sera abattue. C'est à ce moment-là qu'elle apprend qu'elle pourrait être l'héritière de Harris Greenwood, un grand propriétaire de bois au passé sombre. Dès lors, sa vie bascule !

La littérature s'empare de l'environnement en perdition comme sujet de prédilection. On ne va bientôt plus compter le nombre de romans écologiques mais celui-là, bien sûr, est unique.

Il l'est d'abord, parce qu'il évoque la vie des arbres, ces êtres vivants à l'ombre desquels on aime tant se reposer, quand on ose pas s'aventurer à y grimper. Il est question de leur SURvie Ce ne sont pas les fortes chaleurs estivales, les incendies de forêts records en France de 2022, qui viendront démentir l'auteur. Ce patrimoine millénaire est menacé. Le propos est militant bien sûr, il tend à nous faire prendre conscience de l'urgence à agir, tout de suite, maintenant !


Mais pourquoi attendons-nous de nos enfants qu’ils mettent un terme à la déforestation et à l’extinction des espèces, qu’ils sauvent la planète demain, quand c’est nous qui, aujourd’hui, en orchestrons la destruction ? P. 498

La projection en 2038 est tout simplement effroyable. Souhaitons que l'écrivain joue l'oiseau de mauvais augure mais ni vous, ni moi, ne croyons désormais que nous échapperons à cette fin certaine. Ce n'est plus qu'une affaire de temps.

Il l'est ensuite parce que Michael CHRISTIE, tout au long de ce roman, va se risquer à tisser le fil d'un parallèle entre les arbres et les êtres humains. L'écrivain commence par montrer qu'en surface, ils fonctionnent de la même manière...


L’écorce d’un arbre remplit les mêmes fonctions que la peau d’un être humain : elle empêche les intrus d’entrer et les nutriments de sortir […]. P. 23

Après l'extérieur, la partie visible, Michael CHRISTIE, va explorer l'intérieur.

Peut-être vous êtes vous déjà arrêté.e.s à observer les restes d'un tronc d'arbre, vous savez, la souche qui donne à voir les cernes du bois développés à partir du coeur, ces cercles concentriques dans un nuancier de marron étourdissant. Et bien l'auteur va s'attacher à démontrer qu'ils sont les marques du temps, un peu comme des strates qui se superposeraient tout au long de la vie, mais au lieu de se pratiquer à la verticale, c'est à l'horizontal que les événements laissent leur empreinte.


Le temps, Liam le sait, n’est pas une flèche. Ce n’est pas non plus une route. Le temps ne va pas dans une direction donnée. Il s’accumule, c’est tout - dans le corps, dans le monde -, comme le bois. Couche après couche. Claire, puis sombre. Chacune reposant sur la précédente, impossible sans celle d’avant. Chaque triomphe, chaque désastre inscrit pour toujours dans sa structure. P. 534-535

Et puisque Michael CHRISTIE examine les similitudes entre les arbres et les êtres humains, il va s'appuyer sur une fresque familiale s'échelonnant sur un peu plus d'un siècle pour démontrer que les individus d'aujourd'hui sont le fruit des générations précédentes dont les traces constituent leur patrimoine charnel. Le dessein est audacieux, le défi relevé avec brio.

Et quelle fresque familiale, une véritable saga, avec des personnages de fiction hauts en couleur et profondément attachants. Vous allez vivre au rythme des événements de la vie, certains heureux - des naissances, des histoires d'amour, des mariages -, d'autres moins - des accidents, des disparitions, des abandons, des décès. Michael CHRISTIE est un jeune romancier canadien, il a dans sa plume cette capacité des auteurs du nord américain à vous embarquer dans de formidables épopées. Chapeau !

Ce qui m'a marquée plus que tout, c'est la dynamique de RESISTANCE qui anime chacun.e d'entre eux. Qu'il s'agisse de se confronter à la maladie, au handicap, aux addictions, à un frère, à la société tout entière, aux magnats du pouvoir, qu'il s'agisse d'une action individuelle ou communautaire, qu'il s'agisse encore de lutter contre une certaine forme d'autorité, peu importe, ils tracent leur voie, exploitent leur marge de liberté pour avancer, y compris au péril de leur vie. Les péripéties rythment le roman qui devient rapidement un pageturner, vous n'aurez bientôt plus envie de le lâcher.

Enfin, ce roman ne serait rien sans sa narration. La structuration ne suit aucune chronologie, les voix résonnent entre elles, et pourtant, jamais, non jamais vous ne perdrez le fil. Du grand art !

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2022-08-17T12:40:52+02:00

Ubasute de Isabel GUTIERREZ

Publié par Tlivres
Ubasute de Isabel GUTIERREZ

Joséphine BAKER chantait "J'ai deux amours". Dans la #selection2022 des 68 Premières fois, j'ai deux coups de coeur, ""Les enfants véritables" de Thibault BERARD et "Ubasute" de Isabel GUTIERREZ.

Et puisque je ne lis plus les quatrièmes de couverture des livres depuis belle lurette, dans le cadre de l'édition estivale #jamaissansmon68, je vous propose de découvrir les premières lignes de ce roman publié aux éditions La fosse aux ours...

Ces premières lignes donnent à voir le ton du roman, la délicatesse de la plume de la primo-écrivaine, le raffinement d'une cérémonie à venir.

Marie s’apprête à réaliser son dernier voyage. Elle est malade. Elle va mourir, elle le sait. Sa dernière volonté, que son fils la porte jusqu'au Grand Rocher. D’ici là, lui va fabriquer la chaise dans laquelle elle s'installera, elle va préparer les quelques effets personnels qu'elle emmènera, un bol qu'elle a tourné elle-même, une natte, une couverture. Seule la date reste à fixer. Un jour, Marie téléphone à son fils. C’est le moment de partir.

S’il est question de faire de la mort son alliée, ce roman n’en est pas moins profondément lumineux. Le portrait de femme de Marie est fascinant. En attendant le grand jour, Marie revisite sa vie et, dans une narration qui alterne la première et la troisième personnes du singulier, elle nous livre ses confidences. Outre cette décision, tellement courageuse, du choix du moment et des modalités de sa fin de vie, elle est en quête d’une paix intérieure, une libération, une certaine forme de pardon.

Ce roman, c’est une ode à la vie.

La prose est tendre, les mots sont beaux.

"Ubasute", c’est un voyage intérieur, une quête spirituelle, une expérience humaine portée par l’espoir.

Ce roman, qui fête aujourd'hui sa première année de sortie en librairie, je l'ai aimé, passionnément, à la folie !

Petit récap de la #selection2022 :

"Laissez moi vous rejoindre" de Amida DAMERDJI

"Faire corps" de Charlotte PONS

"Aux amours" de Loïc DEMEY,

 "Les nuits bleues" de Anne-Fleur MURTON,

"Furies" de Julie RIOCCO,

"Les maisons vides" de Laurine THIZY, découvrez les premières lignes

"Ubasute" d’Isabel GUTIERREZ,

"Les envolés" d'Etienne KERN,

"Les enfants véritables" de Thibault BERARD, un coup de , découvrez les premières lignes

"Une nuit après nous" de Delphine ARBO PARIENTE

"Blizzard" de Marie VINGTRAS,

"Saint Jacques" de Bénédicte BELPOIS,

 "Les confluents" de Anne-Lise AVRIL,

"Le parfum des cendres" de Marie MANGEZ, découvrez les premières lignes

"Jour bleu" de Aurélia RINGARD

"Debout dans l'eau" de Zoé DERLEYN,

"La fille que ma mère imaginait" de Isabelle BOISSARD...

#68premieresfois #68premieresfoisetplussiaffinité #68premieresfois2022 #litteraturefrancaise #premiersromans #68unjour68toujours
#bookstagram #premierroman #7anscasefete #onnarretepasles68 #un68sinonrien #touchepasamon68 #jepensedoncje68  #ubasute #isabelgutierrez

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2022-08-13T06:00:00+02:00

Laissez-moi vous rejoindre de Amina DAMERDJI

Publié par Tlivres
Laissez-moi vous rejoindre de Amina DAMERDJI
 
Le bal des 68 Premières fois  se poursuit avec un premier roman fascinant, « Laissez-moi vous rejoindre » de Amina DAMERDJI.
 
Une femme, Haydée SANTAMARÍA, à peine la soixantaine, se souvient de son enfance à Encrucijada à Cuba. Nous sommes en 1951, dans les pas de son frère, Abel, 6 ans plus jeune qu’elle, elle adhère au Parti orthodoxe, fondé par Eduardo CHIBÁS à La Havane en 1947. Prío SOCARRÁS est alors Président de la République. Haydée SANTAMARÍA ne sait pas encore que l’élan de la révolution cubaine la fera descendre dans la rue, l’impliquera jours et nuits en faveur du soulèvement, jusqu’au 26 juillet 1953…
 
Haydée SANTAMARÍA a l’arme à feu dans la bouche, elle s’apprête à tirer. 
 
Dans une narration à la première personne, comme une longue confession qui va vous prendre aux tripes, et par la voie du roman, une pure fiction, Amina DAMERDJI rend hommage à une révolutionnaire cubaine, une guerillera.
 
De ce mouvement, on se souvient bien sûr de Fidel CASTRO et de Che GUEVARA, les portraits emblématiques de cette révolte. L’autrice vient rendre justice à une femme militante, une prisonnière politique. En réalité, par la voie de cette biographie, Amina DAMERDJI rend hommage à toutes les femmes qui y étaient investies. A défaut, ne finiraient-elles pas, elles aussi, comme "Les grandes oubliées" ?
 
J’ai aimé découvrir les premières heures de son engagement pour son pays :


Mais c’est aussi parce que c’était la première fois que je manifestais dans un cortège. Peu à peu, la force de ces voix vibrant à l’unisson a fait battre mon cœur d’une manière spéciale, plus lentement mais plus puissamment aussi. P.

Son appartement deviendra progressivement le QG de la mobilisation révolutionnaire, elle vouera sa vie au combat jusqu’à l’assaut de la caserne de Moncada à Santiago de Cuba.
 
Quelle aurait été sa vie sans la présence d’Abel et ses actes politiques ? Le roman montre l’amour fraternel que vouait Haydée SANTAMARÍA pour son frère, Abel, mort sous les balles du régime...


Je pensais surtout à travers deux grands yeux brillants derrière leurs lunettes sales, ceux de mon frère. P. 89

Elle vouait à son frère un amour inconditionnel. Etait-elle une révolutionnaire dans l'âme qui n'attendait que son frère pour se révéler ? Son frère lui a-t-il permis de trouver une cause à défendre ? Dans tous les cas, Haydée SANTAMARÍA lui aura été fidèle toute sa vie. Rien, ni personne, ne viendra éroder ce lien, pas même Boris Luis SANTACOLOMA, lui aussi militant, l'amoureux de Haydée SANTAMARÍA.
 
Dans ce portrait brossé par l’écrivaine d'une femme publique, j'ai aimé découvrir aussi sa condition de femme des années 1950. 
 
Ce roman résonne comme une détonation, celle de l’arme de Haydée SANTAMARÍA contre elle-même, fatiguée d’avoir chaque année à tenir le même discours, tenir debout alors que les autres, eux, sont tombés fièrement sous les balles des militaires.
 
La plume de Amina DAMERDJI est fascinante et son premier roman une révélation. Merci aux fées des 68 d'avoir fait une place à ce roman historique dans cette #selection2022.
 
Avant de nous quitter, vous prendrez bien quelques notes de musique, du jazz revisité par le grand Franck SINATRA, c'est une référence de l'écrivaine elle-même.

Retrouvez les autres références de la #selection2022 :

"Une nuit après nous" de Delphine ARBO PARIENTE

"Les enfants véritables" de Thibault BERARD

"Aux amours" de Loïc DEMEY,

 "Les nuits bleues" de Anne-Fleur MURTON,

"Furies" de Julie RIOCCO,

"Ubasute" d’Isabel GUTIERREZ,

"Les envolés" d'Etienne KERN,

"Faire corps" de Charlotte PONS

"Blizzard" de Marie VINGTRAS,

"Saint Jacques" de Bénédicte BELPOIS,

 "Les confluents" de Anne-Lise AVRIL,

"Le parfum des cendres" de Marie MANGEZ,

"Jour bleu" de Aurélia RINGARD

"Debout dans l'eau" de Zoé DERLEYN,

"La fille que ma mère imaginait" de Isabelle BOISSARD...

#68premieresfois #68premieresfoisetplussiaffinité #68premieresfois2022 #litteraturefrancaise #premiersromans #68unjour68toujours
#bookstagram #selection2022 #premierroman #7anscasefete #onnarretepasles68 #un68sinonrien #touchepasamon68 #jepensedoncje68  #Laissezmoivousrejoindre #Aminadamerdji

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2022-08-12T06:00:00+02:00

Ultramarins de Mariette NAVARRO

Publié par Tlivres
Ultramarins de Mariette NAVARRO
 
"Ultramarins", c’est le premier roman de Mariette NAVARRO. Je l'ai découvert grâce au Book club, une nouvelle référence, un coup de coeur, l'occasion d'inviter une nouvelle fois en quelques jours mon ami Botero Pop
 
Elle est Commandante de navire depuis 3 ans. D’elle, on ne sait presque rien, sauf que son père, avant elle, faisait ce même métier. Ce que l’on sait toutefois, c’est qu’elle est respectée pour la qualité de son travail. Elle s’est fait un nom dans le métier. Les marins veulent désormais faire partie de son équipage. Sur son cargo, tout est réglé comme du papier à musique jusqu’au jour où elle répond par l’affirmative à une question tellement improbable, se baigner en pleine mer. A partir de ce moment-là, plus rien ne se passera comme il se doit lors de la traversée de l’Atlantique.
 
Ce roman est une pépite.
 
D'abord, il m'a touchée par l’éloge du travail au féminin. A celles et ceux qui douteraient encore de la capacité des femmes à assurer des métiers, par le passé, dits d'hommes, je ne peux que leur conseiller cette lecture, c'est un hymne au professionnalisme des femmes.


Depuis qu’elle est celle qui donne les ordres et décide de la carrière des autres, on ne dit plus rien, le féminin a fait son chemin dans les esprits, est entré dans les histoires comme le surnom d’autres marins célèbres. P. 15

Et puis, il y a quelque chose d’exceptionnel dans ce roman, c’est le rapport au corps. Je me suis laissée surprendre par cette dimension alors que je m’imaginais m'immerger au cœur d’un univers technique,  mécanique, un brin militaire, froid et insensible. C'est tout autre chose que nous propose Mariette NAVARRO, notamment avec l’évocation du corps de la femme, la commandante, en fusion totale avec celui de la machine, le cœur de l’animal, grandiose.


Le cargo, quand elle ferme les yeux, c’est son corps à elle, stable et droit. À en oublier les vagues. P. 16

Mais il y a aussi et surtout ce moment d’ivresse des hommes, nus, la cure de jouvence que procure ce bain en plein océan. Il y a l'entrée des corps dans l'élément naturel, le choc des températures, et très vite, l'effervescence des sens. Mariette NAVARRO décrit formidablement bien le lâcher prise pour laisser place à une certaine forme de (re)naissance.


Ils naissent adultes et de leur plein gré, les pieds en avant, les bras le long du corps, et dans la gorge un chant retenu, un cri débutant. P. 23

Cette baignade clandestine, radars coupés, agit comme un instant de rupture dans le roman. Alors que le décor était planté, que tout semblait parfaitement maîtrisé, il y a cette demande, tellement incongrue, et la commandante qui répond "D'accord".
 
Dès lors, les hommes aguerris s'exposent à la perte totale de leurs repères, s'aventurant aux confins de leur zone de confort, là où la prise de risques est la plus grande. Jamais, non jamais, ils n’ont plongé dans les profondeurs de l’océan. Passée la période d'euphorie, ils prennent conscience de leur vulnérabilité. Comme j'ai vibré avec eux, imaginant que le navire puisse les laisser choir, là. Ils nagent en eaux troubles, dans la plus grande détresse.
 
Et puis, Mariette NAVARRO explore le besoin irrépressible qu’ont certains êtres humains de devoir quitter la terre ferme pour naviguer, aller jouer avec l’horizon, passer de l’autre côté… N'est-ce pas une question que vous vous posez ? Pourquoi ?
 
Mais ce roman ne serait rien sans le mystère de la présence d’un vingt-et-unième homme à bord du canot de sauvetage. Qui est-il ? D’où vient-il ? L'écrivaine va exercer une tension sur les esprits qu'elle va entretenir jusque dans les dernières pages. "Ultramarins" devient un thriller psychologique. Dès lors, les êtres sont capables de tout !
 
Enfin, la plume est un pur délice, une écriture tout en poésie :


Elle sait qu’on n’est pas toujours les bienvenus sur le dos des océans, qu’on ne peut pas impunément s’agripper à leur crinière. P. 39

La chute est profondément émouvante. Ce roman est original, un inclassable. Les membres du jury de l'Académie Hors Concours ne s'y sont pas trompés, les lecteurs et les lectrices l'ont élu roman de l'année 2021.
 
Pour moi, c'est un coup de coeur !
 
Voilà une nouvelle référence très surprenante du Book Club, une excellente surprise. Vous aimerez peut-être aussi :
 
"Consolation" de Anne-Dauphine JULLIAND

"La porte du voyage sans retour ou les cahiers secrets de Michel ADANSON" de David DIOP

"Malgré tout" de Jordi LAFEBRE

"Sidérations" de Richard POWERS

"Hamnet" de Maggie O'FARRELL

 "Les enfants sont rois" de Delphine DE VIGAN

"Au-delà de la mer" de David LYNCH

"Le messager" de Andrée CHEDID

"L’ami" de Tiffany TAVERNIER

"Il n’est pire aveugle" de John BOYNE,

"Les mouches bleues"» de Jean-Michel RIOU,

"Il fallait que je vous le dise" de Aude MERMILLIOD, une BD,

"Le roi disait que j'étais diable" et "La révolte" de Clara DUPONT-MONOD, 

"Un jour ce sera vide" de Hugo LINDENBERG

"Viendra le temps du feu" de Wendy DELORME,

"Il n'est pire aveugle" de John BOYNE...

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2022-08-10T19:36:34+02:00

Le parfum des cendres de Marie MANGEZ

Publié par Tlivres
Le parfum des cendres de Marie MANGEZ

Parce que je ne lis plus les quatrièmes de couverture des livres depuis belle lurette, dans le cadre de l'édition estivale #jamaissansmon68, je vous propose de découvrir les premières lignes d'un roman de la #selection2022 des 68 Premières fois : "Le parfum des cendres" de Marie MANGEZ aux Éditions Finitude, une immersion dans les profondeurs de l’âmeune lecture coup de poing.

 

Tout commence avec une scène aussi éblouissante que saisissante. Bernadette est sur son lit de mort. Sylvain, 37 ans, thanatopracteur depuis 9 ans, lui apporte les derniers soins, sous les yeux d’Alice, anthropologue, observatrice, qui prépare une thèse sur le sujet. La Grande Faucheuse est passée par là. Sylvain réalise les dernières volontés des défunts. Il donne la touche finale, éminemment gracieuse, à des corps apaisés sur qui le rideau du théâtre est tombé. Mais lui, Sylvain, comment en est-il arrivé là… un choix ou une pure foudroyante tragédie ?

Il y a des métiers plus que d’autres qui suscitent la curiosité, à moins que ça ne soit de la répugnance. La pratique de la thanatopraxie nécessite une expertise technique, la profession d’embaumeur depuis la nuit des temps requiert de la précision, de la minutie, dans les soins apportés aux défunts, de ceux qui redonnent au corps un semblant de vie. Avouons que dans le genre, Sylvain, personnage de fiction, va assumer son rôle à la  perfection.

Dès les premières lignes, avec les soins apportés au corps de Bernadette, j’ai été happée par le caractère solennel de la cérémonie à laquelle Sylvain se prête, comme un rituel ponctué par l’évocation d’arômes subtiles. 

Et pour prendre un peu de recul, qui mieux qu'Alice avec son énergie et sa fantaisie ? Le contraste des personnalités est croustillant à l'envi.  

Ce roman est éminemment sensoriel, du tactile, en passant par le visuel et l’olfactif, jusqu’au gustatif, comme autant d’opportunités de vibrer. Je ne suis pas prête d’oublier l’uppercut. La plume est glaçante comme les macchabés, éminemment poétique comme peut l’être un dernier souffle de vie, profondément lumineuse aussi.

Si vous aussi prônez un été #jamaissansmon68, vous pouvez aussi opter pour...

 

"Faire corps" de Charlotte PONS

"Aux amours" de Loïc DEMEY,

 "Les nuits bleues" de Anne-Fleur MURTON,

"Furies" de Julie RIOCCO,

"Les maisons vides" de Laurine THIZY, découvrez les premières lignes

"Ubasute" d’Isabel GUTIERREZ,

"Les envolés" d'Etienne KERN,

"Les enfants véritables" de Thibault BERARD, un coup de , découvrez les premières lignes

"Une nuit après nous" de Delphine ARBO PARIENTE

"Blizzard" de Marie VINGTRAS,

"Saint Jacques" de Bénédicte BELPOIS,

 "Les confluents" de Anne-Lise AVRIL,

"Le parfum des cendres" de Marie MANGEZ,

"Jour bleu" de Aurélia RINGARD

"Debout dans l'eau" de Zoé DERLEYN,

"La fille que ma mère imaginait" de Isabelle BOISSARD...

#68premieresfois #68premieresfoisetplussiaffinité #68premieresfois2022 #litteraturefrancaise #premiersromans #68unjour68toujours
#bookstagram #jamaissansmon68 #selection2022 #premierroman #7anscasefete #onnarretepasles68 #un68sinonrien #touchepasamon68 #jepensedoncje68 #leparfumdescendres #mariemangez

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2022-08-06T06:00:00+02:00

Une nuit après nous de Delphine ARBO PARIENTE

Publié par Tlivres
Une nuit après nous de Delphine ARBO PARIENTE

Editions Gallimard

Le bal des 68 Premières fois se poursuit avec le premier roman de Delphine ARBO PARIENTE : "Une nuit après nous".

 

Mona est une femme de 46 ans, elle a deux enfants d’un premier mariage, et la petite Rosalie avec Paul avec qui elle vit depuis 12 ans. Ça fait des années maintenant que Mona s’évertue à garder son passé cadenassé mais sa rencontre avec Vincent, professeur de Taï-chi, va ouvrir les vannes. Plus jamais la petite fille qui dormait en elle ne sera prisonnière.
 
Ce premier roman est bouleversant.
 
Il prend racine dans une histoire familiale complexe, la génération de ses grands-parents s’est exilée de Tunisie dans un contexte douloureux avec seulement quelques effets personnels sur le dos. Ils ont tout reconstruit mais nous étions dans les années 1960, et à cette époque, les logements étaient petits et miteux. Sa mère, quand elle était enfant, voulait fuir cet environnement familial toxique. Et puis, comme une prédisposition naturelle, il va y avoir une transmission de la douleur par la voie des femmes au fil des générations. Mona va hériter bien malgré elle de ce patrimoine lourd à porter qui va marquer son corps de son empreinte.
 
Vous l'avez compris, il y a dans ce nouveau roman de la #selection2022 des 68 une affaire de corps, de maltraitance du corps. Pour pouvoir se construire, Mona a choisi l'oubli, à moins que ça ne soit son cerveau qui ait pris les commandes.
 
C'est Adélaïde BON avec "Une petite fille sur la banquise" qui m'avait mise sur la voie avec un récit de vie aussi effroyable qu'éblouissant. Elle y expliquait ses mécanismes de protection lors de faits de violence. C'est un peu comme un instinct de survie. Le cerveau se déconnecte et engendre ce que l'on appelle une amnésie traumatique. Avec ce roman, et sans l'approche scientifique, Delphine ARBO PARIENTE illustre parfaitement le mal qui ronge Mona.
 
Dans ce roman, ce qui est intéressant, c'est aussi et surtout ce qui va provoquer la rupture avec un quotidien qui pourrait être qualifié d'ordinaire. Je suis totalement fascinée par ce que les rencontres peuvent générer en termes d'émotions. Là, c'est celle de Mona avec Vincent qui va tout bouleverser.


Et en ouvrant la trappe où j’avais jeté mes souvenirs, la petite est revenue, elle attendait, l’oreille collée à la porte de mon existence. P. 13

Il n'aura fallu qu'un sourire, un regard, une écoute, l'intonation d'une voix... pour que les souvenirs déferlent avec tout ce qu'ils charrient de souffrance mais aussi tout ce qui fait de la personne ce qu'elle est aujourd'hui. Je n'irai pas plus loin, bien sûr, au risque de dévoiler le charme de cette lecture. Je peux juste vous dire que les battements de mon coeur se sont accélérés à un rythme insoutenable, ce roman, je ne pouvais plus le lâcher.

"Une nuit après nous", c'est une libération...


Sa mémoire, ce n’est pas le passé qu’elle contient, mais le présent qui la déborde. P. 187

Ce roman m'a rappelé un extrait du poème "Confession" des Fleurs du Mal de Charles BAUDELAIRE :

"Tout à coup, au milieu de l'intimité libre

Eclose à la pâle clarté,

De vous, riche et sonore instrument où ne vibre

Que la radieuse gaieté,

De vous, claire et joyeuse ainsi qu'une fanfare,

Dans le matin étincelant,

Une note plaintive, une note bizarre,

S'échappa, tout en chancelant"

"Une nuit après nous", c'est aussi l'histoire d'une révélation. Mona vivait avec toute une part d'elle, de sa vie, de son itinéraire, qui lui était inaccessibles. Avec Vincent, c'est la promesse de retrouver ses origines, son enfance, son adolescence, sa vie de femme, adulte, c'est l'assurance de trouver des réponses à toutes ces questions qui la taraudaient, c'est un peu comme si elle trouvait la clé d'un trésor dont elle ne soupçonnait même pas l'existence. Ce roman, c'est une porte ouverte sur une (RE)naissance.

Finalement, l'écrivaine explore tout au long du roman le champ de la mémoire, celle des territoires, celle des hommes et des femmes. C'est fascinant.

Ce roman, construit en cinq chapitres comme une tragédie grecque, est aussi déchirant que lumineux. Il est servi par une plume d'une très grande sensibilité. J'évoquais l'instant de rupture quelques lignes plus haut. S'il est important pour le lecteur, il l'est plus encore pour l'auteur en termes d'écriture. C'est l'évènement qui rebat l'ensemble des cartes, un tout nouveau jeu s'offre à lui. A charge pour lui de rebondir, certains réussissent l'exercice comme Delphine ARBO PARIENTE, d'autres moins.

Ce premier roman, c'est une belle réussite. Bravo !

Et pour terminer, vous prendrez bien quelques notes de musique, classiques, choisies par l'écrivaine elle-même...

Retrouvez les autres références de la #selection2022 :

"Les enfants véritables" de Thibault BERARD

"Aux amours" de Loïc DEMEY,

 "Les nuits bleues" de Anne-Fleur MURTON,

"Furies" de Julie RIOCCO,

"Ubasute" d’Isabel GUTIERREZ,

"Les envolés" d'Etienne KERN,

"Faire corps" de Charlotte PONS

"Blizzard" de Marie VINGTRAS,

"Saint Jacques" de Bénédicte BELPOIS,

 "Les confluents" de Anne-Lise AVRIL,

"Le parfum des cendres" de Marie MANGEZ,

"Jour bleu" de Aurélia RINGARD

"Debout dans l'eau" de Zoé DERLEYN,

"La fille que ma mère imaginait" de Isabelle BOISSARD...

#68premieresfois #68premieresfoisetplussiaffinité #68premieresfois2022 #litteraturefrancaise #premiersromans #68unjour68toujours
#bookstagram #selection2022 #premierroman #7anscasefete #onnarretepasles68 #un68sinonrien #touchepasamon68 #jepensedoncje68  #unenuitaprèsnous #delphinearbopariente

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2022-06-23T06:00:00+02:00

Ubasute de Isabel GUTIERREZ

Publié par Tlivres
Ubasute de Isabel GUTIERREZ

Ma #citationdujeudi est l'occasion de revenir sur un coup de coeur, un premier roman sélectionné par les fées des 68, un roman inoubliable, un roman qui me fait frissonner rien que de l'évoquer. Il s'agit de "Ubasute" de Isabel GUTIERREZ aux éditions La fosse aux ours.

Marie s’apprête à réaliser son dernier voyage. Elle est malade. Elle va mourir, elle le sait. Sa dernière volonté, que son fils la porte jusqu'au Grand Rocher. D’ici là, lui va fabriquer la chaise dans laquelle elle s'installera, elle va préparer les quelques effets personnels qu'elle emmènera, un bol qu'elle a tourné elle-même, une natte, une couverture. Seule la date reste à fixer. Un jour, Marie téléphone à son fils. C’est le moment de partir.

Il y a tout un tas de manières d’imaginer sa fin de vie.

Aux Etats-Unis, les gens font appel à une doula, cette personne qui va tout prendre en charge, se substituant aux enfants souvent occupés à vivre leur vie, loin, comme l'évoque si tendrement Jodi PICOULT dans son dernier roman, "Le Livre des deux chemins". Cette pratique arrive depuis peu en France.

Au Japon, il y aurait une tradition, l'ubasute, qui consisterait à demander à quelqu’un de nous porter sur son dos pour l'ascension d’une montagne, là où l’on rendrait notre dernier souffle.

S’il est question de faire de la mort son alliée, ce roman n’en est pas moins profondément lumineux. Le portrait de femme de Marie est fascinant. En attendant le grand jour, Marie revisite sa vie et, dans une narration qui alterne la première et la troisième personnes du singulier, elle nous livre ses confidences. Outre cette décision, tellement courageuse, du choix du moment et des modalités de sa fin de vie, elle est en quête d’une paix intérieure, une libération, une certaine forme de pardon.

 

La prose est tendre et délicate, les mots sont beaux. « Ubasute », c’est un voyage intérieur, une quête spirituelle, une expérience humaine portée par l’espoir. Ce roman je l'ai aimé, passionnément, à la folie !

Et pour que ce moment s'achève tout en beauté, vous prendrez bien quelques notes de musique... aussi ! "Sublime et silence" de Julien DORE.

http://tlivrestarts.over-blog.com/2022/03/sublime-et-silence-de-julien-dore.html

http://tlivrestarts.over-blog.com/2022/03/sublime-et-silence-de-julien-dore.html

Retrouvez mes lectures de cette #selection2022 :

"Aux amours" de Loïc DEMEY

 "Les nuits bleues" de Anne-Fleur MURTON

"Les maisons vides" de Laurine THIZY,

"Furies" de Julie RIOCCO,

"Ubasute" d’Isabel GUTIERREZ,

"Les envolés" d'Etienne KERN,

"Blizzard" de Marie VINGTRAS,

 

"Saint Jacques" de Bénédicte BELPOIS

 "Les confluents" de Anne-Lise AVRIL

"Le parfum des cendres" de Marie MANGEZ

 

"Jour bleu" de Aurélia RINGARD

"Debout dans l'eau" de Zoé DERLEYN

#68premieresfois #68premieresfoisetplussiaffinité #68premieresfois2022 #litteraturefrancaise #premiersromans #68unjour68toujours
#bookstagram #jamaissansmon68 #selection2022 #premierroman #7anscasefete #onnarretepasles68 #un68sinonrien #touchepasamon68 #jepensedoncje68  #ubasute #isabelgutierrez

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2022-06-17T06:00:00+02:00

La porte du voyage sans retour ou les cahiers secrets de Michel ADANSON de David DIOP

Publié par Tlivres
La porte du voyage sans retour ou les cahiers secrets de Michel ADANSON de David DIOP
 
Vous connaissiez peut-être la plume de David DIOP, notamment pour son roman "Frère d'âme", Prix Goncourt des Lycéens 2018, moi pas. "La porte du voyage sans retour", c'est une nouvelle référence du Book club !
 
Michel Adanson est un naturaliste français. Six mois avant de mourir, il écrit une longue lettre à sa fille pour lui raconter sa vie. Nous sommes en 1806. Il se souvient de sa mission au Sénégal pour répertorier les espèces. Il se souvient aussi de Maram, une jeune femme, noire. Surnommée la revenante, il se devait de découvrir son secret, une esclave noire n’est jamais revenue au pays !
 
David DIOP relate les quelques années passées par Michel ADANSON au Sénégal, un homme un peu plus ouvert que les colons en mal d’esclavage.
 
L’auteur nous livre un roman haletant. La vie de Michel ADANSON est à de nombreuses reprises mise en danger. C’est un roman d’aventure, une véritable épopée.
 
J’ai personnellement aimé le regard moderne de cet homme. Son altruisme et son approche de l'interculturalité faisaient de lui un homme hors du commun :


La langue wolof, parlée par les Nègres du Sénégal, vaut bien la nôtre. Ils y entassent tous les trésors de leur humanité : leur croyance dans l’hospitalité, la fraternité, leurs poésies, leur histoire, leur connaissance des plantes, leurs proverbes et leur philosophie du monde. [...] J’ai découvert ainsi, en racontant ma généalogie à Ndiak, que, lorsqu’on apprend une langue étrangère, on s’imprègne dans le même élan d’une autre conception de la vie qui vaut bien la nôtre. P. 55-56 et P. 110

Michel ADANSON prêtait une attention toute particulière à celles et ceux qui étaient différents de lui. Il savait prendre du recul, analyser ce qui fait de nous l’humanité. Il y a aussi ces passages sur la médecine, la manière qu'ont les guérisseurs de porter une attention particulière à leurs patients :


Elle m’a appris à écouter. Elle m’a souvent répété que les premiers remèdes sont à trouver dans les paroles mêmes de ceux qui exposent les symptômes de leur maladie. P. 173

Entre sorcellerie et traitement scientifique de la maladie, l’approche du soin par l’extériorisation du mal m’a toujours profondément intéressée, David DIOP me conforte.
 
L’auteur nous livre un roman salutaire dans une plume inspirante. Revenir sur Michel ADANSON, c’est assurer à ses travaux la postérité. C’est aussi inscrire la mémoire  du peuple noir du Sénégal dans le grand livre de notre Histoire.

Vous aimerez peut-être les autres références du Book club...

"Malgré tout" de Jordi LAFEBRE

"Sidérations" de Richard POWERS

"Hamnet" de Maggie O'FARRELL

 "Les enfants sont rois" de Delphine DE VIGAN

"Au-delà de la mer" de David LYNCH

"Le messager" de Andrée CHEDID

"L’ami" de Tiffany TAVERNIER

"Il n’est pire aveugle" de John BOYNE,

"Les mouches bleues"» de Jean-Michel RIOU,

"Il fallait que je vous le dise" de Aude MERMILLIOD, une BD,

"Le roi disait que j'étais diable" et "La révolte" de Clara DUPONT-MONOD, 

"Un jour ce sera vide" de Hugo LINDENBERG

"Viendra le temps du feu" de Wendy DELORME,

"Il n'est pire aveugle" de John BOYNE...

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2022-05-07T12:20:45+02:00

Le parfum des cendres de Marie MANGEZ

Publié par Tlivres
Le parfum des cendres de Marie MANGEZ

Éditions Finitude

Le bal des 68 Premières fois se poursuit.

Après :

 "Les nuits bleues" de Anne-Fleur MURTON

"Les maisons vides" de Laurine THIZY,

"Furies" de Julie RIOCCO,

"Ubasute" d’Isabel GUTIERREZ,

"Les envolés" d'Etienne KERN,

"Blizzard" de Marie VINGTRAS,

"Saint Jacques" de Bénédicte BELPOIS

 "Les confluents" de Anne-Lise AVRIL

place au premier roman de Marie MANGEZ « Le parfum des cendres », une immersion dans les profondeurs de l’âme.

Tout commence avec une scène aussi éblouissante que saisissante. Bernadette est sur son lit de mort. Sylvain, 37 ans, thanatopracteur depuis 9 ans, lui apporte les derniers soins, sous les yeux d’Alice, anthropologue, observatrice, qui prépare une thèse sur le sujet. La Grande Faucheuse est passée par là. Sylvain réalise les dernières volontés des défunts. Il donne la touche finale, éminemment gracieuse, à des corps apaisés sur qui le rideau du théâtre est tombé. Mais lui, Sylvain, comment en est-il arrivé là… un choix ou une pure foudroyante tragédie ?

 

Il y a des métiers plus que d’autres qui suscitent la curiosité, à moins que ça ne soit de la répugnance. La pratique de la thanatopraxie nécessite une expertise technique, la profession d’embaumeur depuis la nuit des temps requiert de la précision, de la minutie, dans les soins apportés aux défunts, de ceux qui redonnent au corps un semblant de vie. 
 

Ce premier roman de Marie MANGEZ, « Le parfum des cendres », c’est une lecture coup de poing.

 

Dès les premières lignes, avec les soins apportés au corps de Bernadette, j’ai été happée par le caractère solennel de la cérémonie à laquelle Sylvain se prête, comme un rituel ponctué par l’évocation d’arômes subtiles. Là :


Groseille, oui. C’était bien ça. Cette fragrance piquante et fruitée. Une ville écarlate qui éclate en jus acide, très acide sous ses dehors pimpants, pas du genre à enrober le palais de douceur sucrée, la groseille, plutôt du genre à le picoter délicatement - avec, de temps à autre, l’éclair d’amertume des minuscules grains qui cèdent sous la dent… P. 8

Il y a dans la scène le paradoxe de la mort, froide, blafarde, le corps sans vie, et les tableaux brossés de couleurs vives nourris par une vive gourmandise suscitant l’évocation des sens, tout ce qui fait le sel de la vie comme le disait si bien Françoise HÉRITIER.

 

Comme elle, Alice est anthropologue. Elle explore ce champ d’activités avec curiosité. 

 

Comme j’ai aimé le contraste des personnalités. Alice est aussi pétulante et dynamique que Sylvain est calme et abattu.

 

Et puis, derrière les corps dans vie, il y a des familles meurtries, le deuil, la douleur qui ne réduit pas le temps, les tripes qui vrillent, le cœur qui s’emballe, l’air qui manque jusqu’à l’asphyxie. J’ai tressailli avec Sylvain, suis sortie KO de ses combats.

 

Et puis, les parenthèses offertes par la musique, une playlist de folie, aussi éclectique que les corps à embaumer sont divers et variés. Comme j’ai aimé saisir l’opportunité de morceaux proposés par Alice comme autant d’opportunités de se ressourcer, se ressaisir pour se reconstruire, au bout du tunnel peut-être la voie de la résilience…

 

Ce roman est éminemment sensoriel, du tactile, en passant par le visuel et l’olfactif, jusqu’au gustatif, comme autant d’opportunités de vibrer. Je ne suis pas prête d’oublier l’uppercut. La plume est glaçante comme les macchabés, éminemment poétique comme peut l’être un dernier souffle de vie, profondément lumineuse aussi.

 

Impossible de ne pas terminer en musique 🎶 je vous propose «  Gone with the wind » 

http://tlivrestarts.over-blog.com/2022/05/gone-with-the-wind-de-axel-rudi-pell.html

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2022-04-30T06:00:00+02:00

Les confluents de Anne-Lise AVRIL

Publié par Tlivres
Le bal des 68 Premières fois se poursuit.

Après :

 "Les nuits bleues" de Anne-Fleur MURTON

"Les maisons vides" de Laurine THIZY,

"Furies" de Julie RIOCCO,

"Ubasute" d’Isabel GUTIERREZ,

"Les envolés" d'Etienne KERN,

"Blizzard" de Marie VINGTRAS,

"Saint Jacques" de Bénédicte BELPOIS

place au premier roman de Anne-Lise AVRIL "Les confluents" aux éditions Julliard, une invitation au voyage.

Jaya quitte son île indonésienne. Nous sommes en 2040. Il souffle un air d’apocalypse sur ce petit coin de paradis. Les tortues qui nageaient au pied des pilotis des maisons ont disparu. L’océan continue d’envahir les terres. La température est caniculaire. Jaya quitte aussi son frère, Aslam, qui, lui, continue d’avoir la foi en son territoire, sa planète. Il plante incessamment des palétuviers dans la mangrove. Liouba et Talal, eux, embarquaient, s’envolaient, quittaient leur terre pour le travail. Nous sommes en 2009. Elle est née à Moscou d’un père français, botaniste, et d’une mère de Sibérie, journaliste, tous deux récemment disparus. Elle, dans les pas de sa mère, se destine à l’écriture. Elle a choisi de parler d’un homme qui plante des arbres pour reconstituer une forêt native dans le désert. Elle voudrait faire rayonner la technique zaï venue du Sahel et qui permet aux végétaux de pousser grâce à l’action des termites. Lui vit à Berlin et parcourt le monde. Il est photographe. Un jour, ils se croisent, se parlent, c’est là que leur histoire commence… et que tous les destins vont se croiser !
 
Ce roman, c’est celui du mouvement, celui de la terre qui tourne sur elle-même, celui de la terre qui tourne autour du soleil. A l'image de cette forme de révolution, des êtres sont sur le départ. Ils quittent leur pays, par la voie de l’eau ou des airs, en quête d'une terre d'asile.


L’être humain a toujours été une espèce migratrice, mais ce mouvement s’accentue aujourd’hui au fil des changements climatiques, de la montée des eaux, des conflits croissants. P. 43

Il y a la menace des grands mouvements de populations, ceux guidés par le besoin irrépressible de sauver sa vie contre vents et marées, ce proverbe n'a jamais été aussi vrai. Il y a là un réflexe presque animal, un instinct de survie qui poussent les réfugiés climatiques à partir.

Si Anne-Lise AVRIL porte un regard désenchanté sur cette réalité, le compte à rebours de la destruction de l'environnement définitivement lancé, il n'en demeure pas moins qu'elle donne à voir le sursaut de certains hommes. Il y a urgence à agir, là contre la fin des espèces, là contre la disparition de la biodiversité. Quel plus bel acte de rébellion que celui d'Aslam. Avec ce personnage de fiction, l'autrice donne de l'espoir, celui de croire en un possible renouveau, une résurrection.

Ce roman, c’est aussi celui de rencontres, d’une certaine forme de fraternité…


Ils souriaient, liés par cette intimité qui ne peut se créer qu’en voyage, cette communion de deux êtres éloignés de chez eux, liés par l’illusion d’un présent éternel. P. 80

qui naît quand les êtres sont un brin vulnérables, fragilisés par une certaine forme de solitude, et qui trouvent là comme une évidence de se lier.
 
Outre les relations d'amitié qui peuvent trouver naissance là où on les imaginait perdues, il y a aussi d'autres sentiments qui peuvent voir le jour, des sentiments plus forts, des sentiments qui pourraient faire changer la trajectoire du monde.
 
Ce roman c’est celui du désir ardent, celui d’une passion amoureuse, celui de l’attirance des corps, celui des pulsions charnelles. 


A distance, ils avaient continué à s’envoyer des messages qui ne contenaient que des chansons. C’était leur façon de faire l’amour, au sens littéral de le créer, de le bâtir, de le consumer. P. 114

Il y a cette relation entretenue par des instants éphémères, aussi précieux qu’ils sont rares. Quelle plus belle image que celle de la retenue, à moins que ça ne soit simplement de la tenue !

Anne-Lise AVRIL nous livre un premier roman envoûtant dans un climat de fin du monde. Elle laisse une trace dans la littérature contemporaine de la jeune génération, celle qui a 20 ans en 2020, qui ne se fait plus aucune illusion sur l’avenir de l’humanité mais elle ne saurait se résigner pour autant à mourir. Il y a ici ou là des hommes et des femmes assez fous pour rêver encore, RESISTER.

Anne-Lise AVRIL nous livre un premier roman d'une très grande maîtrise où les métaphores riment avec la couleur des sentiments. Les mots sont tendres et déchirants, la plume rythmée par les événements, le propos militant.

Impossible de vous abandonner sans quelques notes de musique. Calogero, lui aussi, parle de "La Fin de la fin du monde".

http://tlivrestarts.over-blog.com/2022/04/la-fin-de-la-fin-du-monde-de-calogero.html

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2022-04-19T06:58:08+02:00

Sidérations de Richard POWERS

Publié par Tlivres
Sidérations de Richard POWERS
 
Traduit de l’anglais par Serge CHAUVIN
 
Un roman fascinant, un énorme coup de coeur. Vous avez effectivement bien reconnu "Love" de Botero Pop, l'oeuvre d'art qui accompagne chacun de mes coups de coeur de l'année 2022. 
 
Tout commence avec cette escapade dans Les Appalaches, un séjour dans les Smoky Mountains d’un père, Théodore Byrne, astrobiologiste, avec son fils, Robin de 9 ans, dont on devine une hypersensibilité et des troubles du comportement qui lui valent des exclusions scolaires. Après une nuit à dormir à la belle étoile et s’émerveiller de la beauté de la Voie lactée, ils partent randonner, franchissent un col installent leur campement tout prêt d’un torrent. Ils se baignent et savourent l’extase des bains bouillonnants naturels, cette même expérience que lors du voyage de noces de Théo et Alyssa. Elle est décédée il y a 2 ans et hante leurs vies, jours et nuits. A leur retour, la situation de Robin s’aggrave encore à l’école, l’Etat risque de prendre de sanctionner le père qu’il soupçonne d’incompétence dans l’éducation de son enfant. C’est là qu’une nouvelle expérience commence.
 
Ce roman, c’est 398 pages d’une intensité foudroyante.
 
Il y a la monoparentalité déclinée au masculin, l’immense amour d’un père porté à son fils, l’attention de tous les jours avec cette éternelle question qui traverse l’ensemble du roman. Qu’est-ce qu’être un bon parent ? Il y a mes moments de doute, les prises de décision, et le sentiment de culpabilité devant l’échec.


Elles ont beaucoup en commun, l’astronomie et l’enfance. Toutes deux sont des odyssées à travers des immensités. Toutes deux en quête de faits hors de portée. P. 96

Et puis il y a le deuil, décliné en deux dimensions, celle d’un mari et celle d’un enfant. Tous deux entretiennent le souvenir d’une femme et d’une mère éblouissante, militante, aimée de tous. Ils sont en admiration devant cet être… parti trop tôt.
 
Il y a encore le rapport à la nature, des plus exaltants. Il y a des pages entières de descriptions sublimes.


Dans une clairière en forme de cuvette aux abords du chemin, surgissant du tapis de feuilles mortes, se dressait le champignon le plus ouvragé que j’aie jamais vu. Il se déployait en un hémisphère couleur crème plus gros que mes deux mains réunies. Un ruban cannelé et fongique ondoyait sur lui-même pour former une surface aussi alambiquée qu’une collerette élisabéthaine. P. 33

Mais rien ne saurait être d’actualité sans la mise en danger de l’environnement et de l’humanité condamnée à trouver une autre planète où s’installer. Il en va de sa survie. Mais encore faudrait-il que l’Homme s’assagisse…


Des morceaux de banquise se détachaient de l’Antarctique. Des chefs d’Etat éprouvaient les limites ultimes de la crédulité collective. Des petites guerres éclataient un peu partout. P. 39

Il y a aussi et surtout l’approche de la pathologie de Robin, la quête d’un traitement qui ne soit pas médicamenteux pour lui apporter la sérénité et le bien-être.


[…] il n’y avait pas un « Robin », pas de pèlerin unique dans cette procession de visages pour qu’il reste jamais le même que toute cette farandole kaléidoscopique, qui paradait dans l’espace et le temps, était en elle-même un chantier permanent. P. 159

Comme j’ai aimé l’apprentissage des neurosciences à travers le filtre de la typologie de Plutchik et les 8 émotions de base, un décryptage fascinant de la terreur, le chagrin, l’aversion, l’étonnement, la rage, la vigilance, l’admiration, et l’extase. Il y a encore le prometteur feedback décodé et tout ce qu’il permet d’espérer.
 
Ce roman est servi par une plume profondément émouvante. Richard POWERS nous livre un roman d’une richesse éblouissante sur les objets de « Sidérations ». Je salue la qualité de la traduction de Serge CHAUVIN.
 
Impossible de vous quitter sans cette citation dans laquelle vous vous reconnaîtrez toutes et tous, j’en suis persuadée :


Mon fils adorait la bibliothèque. […] Il adorait la bienveillance des rayonnages, leur cartographie du monde connu. Il adorait le buffet à volonté d’emprunt. Il adorait la chronique des prêts tamponnée sur la page de garde, ce registre des inconnus qui avaient emprunté le même livre avant lui. P. 114

Énorme coup de cœur, une nouvelle référence du Book club (merci Ingrid) dont je vous rappelle quelques lectures précédentes :

"Hamnet" de Maggie O'FARRELL

"Les enfants sont rois" de Delphine DE VIGAN

"Au-delà de la mer" de David LYNCH

"Le messager" de Andrée CHEDID

"L’ami" de Tiffany TAVERNIER

"Il n’est pire aveugle" de John BOYNE,

"Les mouches bleues"» de Jean-Michel RIOU,

"Il fallait que je vous le dise" de Aude MERMILLIOD, une BD,

"Le roi disait que j'étais diable" et "La révolte" de Clara DUPONT-MONOD, 

"Un jour ce sera vide" de Hugo LINDENBERG

"Viendra le temps du feu" de Wendy DELORME,

"Il n'est pire aveugle" de John BOYNE...

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2022-04-16T06:00:00+02:00

Blizzard de Marie VINGTRAS

Publié par Tlivres

Le bal des 68 Premières fois se poursuit.

Après :

 

"Les nuits bleues" de Anne-Fleur MURTON

"Les maisons vides" de Laurine THIZY,

"Furies" de Julie RIOCCO,

"Ubasute" d’Isabel GUTIERREZ,

"Les envolés" d'Etienne KERN,

 

place à "Blizzard" de Marie VINGTRAS, un roman choral poignant.

 

Les premières lignes sont saisissantes...

 

 

Blizzard de Marie VINGTRAS


Je l'ai perdu. J'ai lâché sa main pour refaire mes lacets et je l'ai perdu.

Dès lors, tout peut arriver. Dans un climat hostile, deux êtres, dont on ne sait rien, qui, il y a encore une seconde, étaient solidaires dans leur destinée, se retrouvent seuls. Bess, une femme raconte son effroi, la culpabilité qui la tenaille déjà. Et puis, vient Benedict, un homme. Quand il découvre la maison ouverte et personne à l'intérieur, il s'inquiète, il peste. Lui sait que dans son pays, le simple fait de lâcher une main se fait au péril de la vie. Il est né là, en Alaska. Et encore, Freeman, un retraité noir. Et enfin, Cole. Dans la situation présente, il y a urgence à agir, à la vie à la mort.

Marie VINGTRAS nous livre un thriller psychologique haletant. Je peux bien l'avouer, une fois commencé, je n'ai pas pu le lâcher, moi !

Il y a d'abord les personnages qui un à un se saisissent d'une réalité et improvisent dans la prise de décision. L'autrice nous livre une galerie aussi mystérieuse qu'hétéroclite. Tous, dans leurs conditions, ne sont pas armés à égalité. Quand un homme ou une femme est exposé.e à des conditions climatiques extrêmes, il y a des choses à faire (ou ne pas faire), il y a des réflexes à adopter, mais encore faut-il les avoir appris, les maîtriser aussi.


C’est quelque chose qui ne s’invente pas, savoir survivre. P. 16

En parlant de personnages, il en est qui n'a pas de chapitres à son nom mais tout le titre du roman. Le "blizzard" transcende le roman. Il est celui qui confronte, celui qui épuise, celui qui rend fragile et vulnérable, celui qui donne du sens à la vie, celui qui teste les capacités à résister. Le phénomène météorologique joue avec la ténacité des êtres, il se lie aux paysages et les rend hostiles. 

Dans l'adversité, il y a des moments de désolation, de ceux que l'on redoute pour leur gravité, des moments que l'on sait fragiles, une seule seconde et tout peut basculer.


Il vaudrait mieux rester à cet instant précis, juste avant de savoir, lorsque l’on est encore dans l’ignorance, même si tout cela n’est qu’une illusion. P. 82

Comme j'ai aimé ce roman pour ce qu'il véhicule de puissance, pour ce qu'il génère chez les êtres humains qui imaginent la fin de leur vie imminente et ont cette envie irrésistible d'en dérouler le fil.

Comme j'ai aimé passer des moments d'intimité avec des personnages en introspection, seuls avec eux-mêmes, seuls confrontés à leur propre sort.

Comme j'ai aimé la narration, arriver à chaque fin de chapitre, court pour donner encore plus de vitalité au propos, et découvrir la petite phrase qui va encore faire monter d'un cran l'intensité.

Comme j'ai aimé la chute, prodigieuse. 

Comme j'ai aimé ce premier roman exceptionnel dans une plume presque cinématographique. Je crois que je vais garder très longtemps en mémoire les images que Marie VINGTRAS a fait naître dans mon esprit.

Pour rester dans le ton, je vous propose de danser maintenant...

http://tlivrestarts.over-blog.com/2022/04/blizzard-de-fauve.html

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2022-04-09T06:00:00+02:00

Les envolés de Étienne KERN

Publié par Tlivres
Les envolés de Étienne KERN

Editions Gallimard

Nouvelle lecture des 68 Premières fois, un roman historique éblouissant
 
Franz REICHELT est originaire de Prague. Son père le destinait à la relève de l’entreprise de cordonnier familiale, il choisira pourtant la mode. Ce destin le guidera jusqu’à Paris où, après quelques expériences professionnelles, il créera son atelier. Nous sommes dans les toutes premières années du XXeme siècle, les années folles, celles des inventions, des pionniers de l’aviation. L’homme rêve alors de voler… à ses risques et périls.
 
Dès les premières pages, je me suis laisser envoûter par la plume d’Etienne KERN, une plume éminemment romanesque qui décrit à l’envi le Paris de la création. Quelles plus jolies pages que celles dédiées à la Tour Eiffel ! Et puis, on y parle de couture, de mode, de tissus, de broderies, de chapeaux, rien n’est trop beau pour briller dans les salons.
 
Et puis, il y a le mystère de cette robe exposée dont l’origine sera progressivement dévoilée, de quoi aiguiser la curiosité et donner le ton de la prose.
 
Le roman historique devient roman d’aventure quand il relate le destin d’hommes portés par la fougue de l’invention, celui des femmes souvent moins séduisant, veuves prématurément. Comme j’ai aimé découvrir la quête de Franz REICHELT, l’histoire vraie de cet homme à la démarche si humaniste de sauver ses compatriotes lors d’un vol hasardeux, ou totalement fou.


Cette vérité si troublante : l’expérience du vertige n’est pas la peur de tomber mais le désir de sauter. P. 59

Les instants de vol, de lâcher prise, deviennent à s’y méprendre les affres folle de la passion amoureuse, des moments d'ivresse.


Et en pensant à elle, il revivait l’instant, cet abandon total, ce moment à nul autre pareil durant lequel il s’était senti à mi-chemin du ciel et de la terre. P. 92

Et puis, il y a la narration, l’alternance de chapitres, ceux en lettres romaines pour relater l’histoire des pionniers de l’aviation, ceux en lettres italiques pour évoquer le destin d’une disparue de 33 ans, Muriel BASSOU. Le roman « Les envolés » lui rend hommage. Muriel BASSOU était écrivaine. Elle était l’autrice du livre « Devenir Stendhal, Amitié et formation littéraire » aux éditions Classiques Garnier.

La plume est belle, éminemment romantique, jubilatoire et euphorique. "Les envolés", c'est un magnifique roman. D'ailleurs, l'Académie ne s'y est pas trompée, il est en lice pour le Goncourt du Premier Roman. Souhaitons lui bonne chance !

Je ne peux décemment pas vous quitter sans quelques notes de musique sans quoi le bal ne serait pas un bal. Vous prendrez bien quelques notes de pop rock...

http://tlivrestarts.over-blog.com/voler-de-nuit.html

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2022-04-02T06:00:00+02:00

Ubasute de Isabel GUTIERREZ

Publié par Tlivres
Ubasute de Isabel GUTIERREZ

La fosse aux ours

Le bal des 68 se poursuit. Isabel GUTIERREZ nous livre un premier roman éblouissant, "Ubasute".

Marie s’apprête à réaliser son dernier voyage. Elle est malade. Elle va mourir, elle le sait. Sa dernière volonté, que son fils la porte jusqu'au Grand Rocher. D’ici là, lui va fabriquer la chaise dans laquelle elle s'installera, elle va préparer les quelques effets personnels qu'elle emmènera, un bol qu'elle a tourné elle-même, une natte, une couverture. Seule la date reste à fixer. Un jour, Marie téléphone à son fils. C’est le moment de partir.

Il y a tout un tas de manières d’imaginer sa fin de vie.

Aux Etats-Unis, les gens font appel à une doula, cette personne qui va tout prendre en charge, se substituant aux enfants souvent occupés à vivre leur vie, loin, comme l'évoque si tendrement Jodi PICOULT dans son dernier roman, "Le Livre des deux chemins". Cette pratique arrive depuis peu en France.

Au Japon, il y aurait une tradition, l'ubasute, qui consisterait à demander à quelqu’un de nous porter sur son dos pour l'ascension d’une montagne, là où l’on rendrait notre dernier souffle.

C'est dans cette pratique, ou légende, qu'Isabel GUTIERREZ puise l'inspiration de son premier roman, un coup de coeur de cette #selection2022 des 68 Premières fois.

S’il est question de faire de la mort son alliée, ce roman n’en est pas moins profondément lumineux. Le portrait de femme de Marie est fascinant. En attendant le grand jour, Marie revisite sa vie et, dans une narration qui alterne la première et la troisième personnes du singulier, elle nous livre ses confidences. Outre cette décision, tellement courageuse, du choix du moment et des modalités de sa fin de vie, elle est en quête d’une paix intérieure, une libération, une certaine forme de pardon


Se réconcilier avec eux et accueillir leur absence qui l’a finalement sauvée, voilà ce qu’elle décide, avant d’entreprendre la longue marche à dos de fils. P. 24/25

Ce roman, c’est une ode à la vie.

Et puis, il y a cette relation mère/fils, ce dernier moment de complicité, ce sursaut de vie intense avant l’abandon, l’abandon d’un être cher, l’abandon du corps, l’abandon de la vie.


Il reste un moment figé dans la solitude de cet instant et laisse les larmes monter. Il n’a pas froid, il n’a pas peur, il n’est même pas malheureux. Une joie immense le fait pleurer, la joie d’être le dernier présent dans ce monde, le bonheur d’être l’unique passeur vers l’autre monde. P. 98

Il y a encore le rapport au corps et à sa mémoire. J’ai été bouleversée par l’empreinte laissée dans le corps de cette femme des traumatismes comme des jours heureux. Notre corps, c’est le témoin de notre vie, notre plus fidèle compagnon, celui qui sait tout de nous, celui qui décidera aussi du moment du lâcher prise.


Les notes silencieuses se mettent à sonner sur la même partition, corps de femme ou foetus, je n’ai donc rien oublié. P. 55

Il y a enfin cette place laissée au silence. Il est à lui seul un personnage du roman. J’ai adoré son intensité. Si tout au long de la vie, les mots permettent l’expression de nos émotions, dans les derniers instants, les regards, le peau à peau, le corps à corps, le simple fait d’être là, suffisent à combler le vide, donner de la profondeur aux sentiments.

La prose est tendre et délicate, les mots sont beaux. « Ubasute », c’est un voyage intérieur, une quête spirituelle, une expérience humaine portée par l’espoir. Ce roman je l'ai aimé, passionnément, à la folie !

Et pour que ce moment s'achève tout en beauté, vous prendrez bien quelques notes de musique... aussi ! "Sublime et silence" de Julien DORE.

http://tlivrestarts.over-blog.com/2022/03/sublime-et-silence-de-julien-dore.html

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2022-03-31T17:30:00+02:00

Furies de Julie RUOCCO

Publié par Tlivres
Furies de Julie RUOCCO

Nouvelle lecture coup de poing, un premier roman époustouflant de la #selection2022 des fées des 68 Premières fois, "Furies" de Julie RUOCCO chez Actes Sud.

Bérénice est archéologue de formation. Elle part en mission. Elle a pris l’habitude de faire l’aller-retour. Elle recèle des antiquités. Mais arrivée à Kilis, une ville turque à la frontière avec la Syrie, au moment où elle doit choisir les bijoux qu’elle rapportera en France, une voiture explose. C’est un attentat suicide. Sonnée, elle s’enfuie avec le sac ensanglanté. Elle trouve refuge chez sa logeuse. Lors d’une sortie, près du grillage de la frontière, une mère lui confie son enfant. Une petite fille. Bérénice dont la vie est en danger assume cette nouvelle responsabilité. Elle doit rentrer en France avec elle mais pour ça, un passeport est nécessaire. Elle s’adresse à un homme qui fait de faux papiers. Il fait revivre tous ceux de son village, assassinés, en transmettant leurs noms à ceux qui cherchent encore à sauver leur vie. Avec lui et l’enfant, Bérénice va laisser s’étirer le temps, à la vie, à la mort.

Ce roman, c’est une claque, un roman puissant qui parle de la guerre. Julie RUOCCO revisite les événements à travers des personnages de fiction.

Il y a cette femme, Bérénice, cette française, une occidentale, qui se retrouve étrangère, en terre inconnue, au Moyen-Orient, en Syrie, dans un pays en guerre.

Et puis, il y a Asim, un homme né en Syrie. Il y avait sa famille, connaissait ses voisins, il les a tous vus mourir... ou presque, et tente de faire revivre leurs âmes.

Il y a encore Taym, la sœur d’Asim, une « Furie » en référence aux Erinyes, les filles de Gaïa et Ouranos, qui, dans la mythologie grecque, poursuivaient les criminels. Taym alerte l’opinion internationale. Un temps dans la rue à manifester, maintenant recluse, elle résiste en publiant tout ce qu’elle découvre, un jour justice sera rendue.

Julie RUOCCO fait de la guerre un objet littéraire, une tragédie. Dans un récit rythmé par les explosions, elle a cette capacité à faire émerger de la torpeur et l’hébétude des instants de grâce, des moments aussi précieux que fulgurants comme autant de ponts dressés entre les hommes que plus rien ne retient...

Julie RUOCCO nous livre un roman percutant, c'est de la bombe.

Cette publication est l'occasion d'un petit clin d'oeil à Julien LECLERC qui a eu la chance de s'entretenir avec l'écrivaine dans le cadre de ses "Balades artistiques", un podcast à écouter... absolument !

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2022-03-26T07:00:00+01:00

Furies de Julie RUOCCO

Publié par Tlivres
Furies de Julie RUOCCO

Nouvelle lecture coup de poing, un premier roman époustouflant de la #selection2022 des fées des 68 Premières fois, "Furies" de Julie RUOCCO chez Actes Sud.

Bérénice est archéologue de formation. Elle part en mission. Elle a pris l’habitude de faire l’aller-retour. Elle recèle des antiquités. Mais arrivée à Kilis, une ville turque à la frontière avec la Syrie, au moment où elle doit choisir les bijoux qu’elle rapportera en France, une voiture explose. C’est un attentat suicide. Sonnée, elle s’enfuie avec le sac ensanglanté. Elle trouve refuge chez sa logeuse. Lors d’une sortie, près du grillage de la frontière, une mère lui confie son enfant. Une petite fille. Bérénice dont la vie est en danger assume cette nouvelle responsabilité. Elle doit rentrer en France avec elle mais pour ça, un passeport est nécessaire. Elle s’adresse à un homme qui fait de faux papiers. Il fait revivre tous ceux de son village, assassinés, en transmettant leurs noms à ceux qui cherchent encore à sauver leur vie. Avec lui et l’enfant, Bérénice va laisser s’étirer le temps, à la vie, à la mort.

Ce roman, c’est une claque, un roman puissant qui parle de la guerre. Alors que celle de l’Ukraine a envahi depuis un mois les médias, qu’elle détruit tout sur son passage, qu’elle pousse les femmes et les enfants hors des frontières, qu’elle garde en son sein des hommes condamnés à mourir… au nom de la démocratie, comment rester indifférent à la guerre en Syrie, une guerre civile engagée depuis 2011. Souvenez-vous, soufflait alors l’élan du Printemps arabe !

Julie RUOCCO revisite les événements à travers des personnages de fiction.

Il y a cette femme, Bérénice, cette étrangère qui se retrouve en terre inconnue, en guerre.

Et puis, il y a Asim, un homme né en Syrie. Il y avait sa famille, connaissait ses voisins, il les a tous vus mourir. Dans les ruines des bâtiments et la fosse commune, il continue à chercher ce qu’il y a encore de vivant. Mais autour de lui, tout n’est que décombre et désolation.


La chaîne des générations avait été brisée, sa mémoire s’évaporait par toutes les fenêtres, par tous les pores du pays. À ce rythme, il n’y aurait bientôt plus de vivants sur la terre, à peine des vestiges. P. 125

Il consacre ses journées à donner à chacun un semblant de dignité.

Il y a encore Taym, la sœur d’Asim, une « Furie » en référence aux Erinyes, les filles de Gaïa et Ouranos, qui, dans la mythologie grecque, poursuivaient les criminels. Taym alerte l’opinion internationale. Un temps dans la rue à manifester, maintenant recluse, elle résiste en publiant tout ce qu’elle découvre, un jour justice sera rendue.


Même devant le constat de la défaite imminente, sa détermination restait intacte, comme si son courage s’était mué en quelque chose d’autre, une forme de devoir, une nécessité impérieuse de tirer du sens de toute cette folie pour qu’elle ne se reproduise plus jamais. P. 52

Il en est d’autres, des « Furies », ces femmes qui résistent au joug des hommes, ces femmes guerrières peshmergas.

Julie RUOCCO fait de la guerre un objet littéraire, une tragédie. Dans un récit rythmé par les explosions, elle a cette capacité à faire émerger de la torpeur et l’hébétude des instants de grâce, des moments aussi précieux que fulgurants comme autant de ponts dressés entre les hommes que plus rien ne retient...


À son contact, Bérénice découvrait l’orgueil fou d’être une femme au bord du précipice, la surprise perpétuelle de se relever au-delà du silence et des entraves, même si c’était la dernière chose qu’elle faisait, surtout si c’était la dernière chose qu’elle faisait. P. 225

Julie RUOCCO nous livre un roman percutant, une bombe… à retardement.

 »Furies », c’est aussi l’occasion d’un petit clin d’œil au Book Club, merci Gwen de ce prêt 😉

Parce qu'il n'y a pas de livre sans musique au bal des 68, après 

"Jolene" de Dolly PARTON pour "Les nuits bleues" de Anne-Fleur MURTON

"Fear of the dark" d'Iron Maiden pour "Les maisons vides" de Laurine THIZY,

j'ai choisi un nouveau morceau de hard rock, je vous propose de rester dans le dur, le fort, le puissant avec "Civil War" des Guns N'Roses, le groupe de hard rock américain. Allez, maintenant, musique !

http://tlivrestarts.over-blog.com/2022/03/civil-war-de-slash.html

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2022-03-15T20:56:04+01:00

Comme un ciel en nous de Jakuta ALIKAVAZOVIC

Publié par Tlivres
Comme un ciel en nous de Jakuta ALIKAVAZOVIC

Il y a des livres qui sont d'abord des rencontres.

L'Association Bouillon de Cube nous avait concocté une très belle soirée le 24 février dernier, au Musée des Beaux Arts d'Angers s'il vous plaît.

En première partie, immersion dans une salle de l'édifice pour se confronter à l'exercice de l'écriture, la description d'une oeuvre choisie. Petite mise en bouche de ce qui nous attendait un peu plus tard.

En deuxième partie était invitée Jakuta ALIKAVAZOVIC pour son essai aux éditions Stock, "Comme un ciel en nous", Prix Médicis 2021. 

Vous connaissez peut-être cette collection : « Ma nuit au musée », de petits livres noirs. C’est dans ce cadre que Jakuta ALIKAVAZOVIC nous relate sa nuit passée au Louvre, juste avant le confinement de 2020, en mars, dans la section des Antiques, dans la salle des Cariatides.

Quelques pas de danse et puis, la nuit venue, l’installation du matelas au pied de la Vénus de Milo, un petit clin d’œil à sa mère.

Mais cet essai est en réalité une formidable preuve d’amour d’une fille qui à son père, cet immigré arrivé du Monténégro en France à l’âge de 20 ans. Ses études d’économie ont très vite été abandonnées pour laisser place à celles de l’histoire de l’art. Il s’enivrait de la beauté. Homme de fantaisie, il posait régulièrement cette question à sa fille :


Et toi, comment t’y prendrais-tu, pour voler la Joconde ?

Il n’est pas très étonnant que Jakuta ALIKAVAZOVIC ait entretenu un rapport particulier avec ce musée et qu’elle veuille y passer une nuit pour retrouver son père, honorer l’immense amour qu’elle lui voue…


L’amour de mon père était un ciel en moi, sa réalité aussi évidente que celle du ciel au-dessus de ma tête, que je le voie ou pas. P. 83

De l’histoire de son père, son arrivée en France, l’apprentissage des codes… elle n’en a rien su. Quand il y faisait référence, tout n’était qu’un conte, mais elle sait aujourd’hui qu’il mentait.


Lorsqu’on quitte tout, lorsqu’on trouve la force en soi de se lever et de partir, de quitter son pays, sa langue, sa famille, comme l’a fait mon père, pour se réinventer […], lorsqu’on quitte tout, l’histoire qu’on se raconte et qu’on raconte à ses enfants est celle d’une table rase. Mais cette renaissance aussi est un mensonge. P. 138

La question de la transmission des traumatismes aux générations suivantes me captive. Comment ne pas mettre cet essai aujourd’hui en relation avec ce que vivent les réfugiés ukrainiens qui fuient leur pays, menacés de mort par Vladimir POUTINE ? Comment vont-ils se construire après ces événements ?

J’ai été profondément émue par cette dimension de l’essai.

Et puis, il y a eu aussi le rapport à l’art, l’appréciation des détails grâce à un regard initié porté aux œuvres. Fascinant !

Enfin, et c’est là le sel de ce livre, c’est le sujet de la transgression, le fait de pourvoir repousser les limites et accéder à un interdit. Impossible de ne pas penser à cette sculpture de Philippe RAMETTE exposée à Nantes, installée Cours Cambronne. L’autrice est un peu cette petite fille portée par l’élan de la liberté.

Je ne connaissais pas encore Jakuta ALIKAVAZOVIC, pourtant lauréate du Prix Goncourt du premier roman pour « Corps volatils » en 2008. J’ai découvert une plume aux multiples couleurs, j’ai découvert une voix profondément attentionnée. 

Quelle soirée !

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2022-03-08T21:23:50+01:00

Les grandes oubliées de Titiou LECOQ

Publié par Tlivres
Les grandes oubliées de Titiou LECOQ

Le 8 mars, journée internationale en faveur des droits des femmes, il y a le choix entre les grandes figures du féminisme du XXème siècle comme Gisèle HALIMI, Benoîte GROULT, sans oublier Simone VEIL, Françoise HERITIER, et puis, il y a des nouvelles, celles du XXIème siècle comme Adeline FLEURY ou encore Titiou LECOQ.

En vacances, j'ai passé ma journée à lire l'essai de Titiou LECOQ, "Les grandes oubliées", publié aux éditions de l'Iconoclaste, un bijou à offrir sans modération.

La préface est rédigée par Michèle PERROT, historienne, je vous conseille d'ailleurs de l'écouter, ou la réécouter, sur France Culture. Une série d'une dizaine de podcasts sont disponibles. 

Au fond, la démarche de Michèle PERROT lancée en 2005 et cet essai de Titiou LECOQ ont la même finalité, écrire l'histoire des femmes, prendre la plume pour revisiter l'Histoire écrite par des hommes, l'Histoire dans laquelle elles sont, a minima oubliées, pire encore effacées.

Avec Titiou LECOQ, on repart de la Préhistoire et on déroule jusqu'à l'histoire contemporaine, en relisant les textes, en réinterprétant les mythes, mais mon Dieu, mais c'est bien sûr !!!

Tout depuis notre plus jeune âge est orienté, tout prête à conférer aux hommes le rôle de leader, d'acteur, de décideur, bref, seuls les hommes présents dans la sphère publique laissèrent une trace dans les livres d'histoires, y compris dans les manuels scolaires encore entre les mains de nos chères têtes blondes.

J'ai profondément aimé la manière très singulière qu'a Titiou LECOQ de déconstruire ce qui nous paraissait comme des évidences, à force de nous l'avoir rabâché.

C'est aussi, avec cet essai, une manière intelligente d'aborder des concepts tels que l'alloparentalité, l'agentivité...

C'est encore l'opportunité de se rendre compte que même dans notre langue les mots de vocabulaire afférents aux femmes ont été progressivement et purement supprimés, le sexe faible balayé d'un revers de main.

C'est enfin le moyen de se remémorer des temps pas si anciens au cours desquels le corps des femmes faisait l'objet de maltraitances, des ablations d'ovaires ou de clitoris pour calmer ou soigner les hystériques, quand il ne devenait tout simplement pas une arme de guerre.

Ce livre à diffuser sans modération est à exposer sur la table du salon pour permettre à chacun, chacune, de s'en saisir pour quelques minutes, une heure...

Si l'on parle de quotas encore aujourd'hui pour faire une place aux femmes, souvenons-nous que l'Académie royale de peinture et de sculpture au début du XVIIIème siècle en avait fixé pour réserver aux hommes une place confortable face aux femmes artistes qui arrivaient en nombre. Ce n'était nullement parce que les femmes étaient absentes de ces disciplines !

Parce que le féminisme évolue avec les années et c'est bien normal, Titiou LECOQ fait partie de ces femmes qui assurent la relève, déconstruisent le passé pour imaginer l'avenir. "Les grandes oubliées", c'est mon #mardiconseil du jour !

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2022-01-11T07:00:00+01:00

La révolte de Clara DUPONT-MONOD

Publié par Tlivres
La révolte de Clara DUPONT-MONOD

C'est fou, il y a des autrices à côté desquelles j'étais passée toutes ces années et puis, il aura suffit d'une référence lors d'une rencontre du Book club pour que je fasse connaissance avec la plume de Clara DUPONT-MONOD et que je ne m'en lasse plus.

Vous vous souvenez de cette première lecture : "Le roi disait que j'étais diable" qui relatait la vie d'Aliénor D'AQUITAINE depuis l'âge de 13 ans jusqu'à 25, feu son premier mariage.

J'ai enchaîné grâce à Gwen avec "La révolte".

Richard Coeur de Lion, Geoffroy et Henri voient leur mère arriver. Ils se figent. L'heure est grave. Aliénor d'Aquitaine donne l'ordre à ses fils de renverser leur père, son mari, le roi d'Angleterre, Henri DE PLANTAGENET. Dès lors, les enfants deviennent les "jouets" de deux personnalités bien trempées, de celles qui vont à la conquête du monde.

Dans ce nouveau roman, c'est par la voix de Richard Coeur de Lion, le narrateur, qu'est brossé le portrait de la reine de France devenue reine d'Angleterre.

Elle va vivre la période la plus sombre de sa vie, outre le fait que Le Plantagenêt comme elle l'aime à l'appeler, la trompe avec Rosemonde DE CLIFFORT, elle est emprisonnée par son propre mari, hors de portée de nuire. Quel plus grand châtiment que l'impuissance pour une personnalité haute en couleur, de celles dont l'action, le pouvoir et la guerre sont les moteurs en puissance.

Dans ce roman, j'ai retrouvé le côté aventurier de la plume de Clara DUPONT-MONOD. Les conquêtes des territoires au Moyen-Âge relevaient de pures épopées. L'écrivaine nous livre des scènes presque cinématographiques des déplacements et des combats. Et puis, entre loyauté et trahison, il n'y a parfois qu'un pas, rendant un brin haletante la destinée de ces têtes couronnées.

Mais ce que j'ai aimé, c'est une nouvelle fois, côtoyer le personnage d'Aliénor D'AQUITAINE, une résistante s'il en est. Si elle savait que ses filles seraient comme elle, mariées à des hommes dès leur plus jeune âge au service de stratégies royales, elle s'était attachée à leur donner une éducation qui leur permette de s'affirmer, et quelle plus belle voie que celle de la lecture. 


Mon armée, ma vraie, celle qui passe les siècles et ne plie devant personne, c’est la littérature. P. 118

Et puis, avouez que parader à l'Abbaye de Fontevraud à du charme. C'est là que sont exposés les gisants notamment d'Aliénor D'AQUITAINE et son fils, Richard Coeur de Lion.

La révolte de Clara DUPONT-MONOD

Bien sûr, l'effet de surprise est passé, mais la plume de Clara DUPONT-MONOD reste talentueuse.

Vous aimerez peut-être aussi : "S'adapter" couronné en 2021 des Prix du Goncourt des Lycéens, Femina Landerneau.

Retrouvez toutes les références du Book club :

 

« Hamnet » de Maggie O'FARRELL

« Les enfants sont rois » de Delphine DE VIGAN

« Le roi disait que j'étais diable » de Clara DUPONT-MONOD

« Au-delà de la mer » de Paul LYNCH

« Le messager » de Andrée CHEDID

« L’ami » de Tiffany TAVERNIER

« Il n’est pire aveugle » de John BOYNE,

« Les mouches bleues » de Jean-Michel RIOU,

« Il fallait que je vous le dise » de Aude MERMILLIOD, une BD.

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