Pour le 8ème jour de l'opération "Noël en poche", je reviens sur l'un de mes coups de coeur. J'avais terminé l'année 2018 en beauté avec la lecture du roman de Maylis DE KERANGAL "Un monde à portée de main" publié aux éditions Verticales, et aujourd'hui en poche chez Folio.
Paula, Kate et Jonas ont tous les trois fait l’Institut de peinture de Bruxelles, rue du Métal, en 2007. Ils se retrouvent et se remémorent leur apprentissage de la technique du trompe-l’œil, leur appropriation lente et laborieuse des matériaux, du bois, des marbres, des pierres semi-précieuses, leur sensibilisation aux nuanciers de couleurs... Ils y ont passé 6 mois intenses de formation, ont éprouvé les limites de leur corps. Ils ont eu leur diplôme, ce passeport pour les contrats, les missions, à travers la France, le monde. Une nouvelle vie commence alors !
Avec ce roman d'apprentissage, Maylis de KERANGAL nous initie à la discipline de la peinture de décor, elle nous fait entrer dans l'atelier des artistes, nous apprend à distinguer le pinceau à lavis de celui à laque en poils d'ours d'Alaska, elle nous fait voyager à travers le monde en suivant la route du marbre, il y a le vert de Polcevera, le mischio de San Siro, l'albâtre du Mont Gazo... L'écrivaine a ce talent de nous captiver pour un sujet qu'elle explore jusque dans les tréfonds, elle l'appréhende avec minutie, nous familiarise avec le vocabulaire et les codes, nous dévoile son histoire, son environnement.
Maylis DE KERANGAL explore une question philosophique : quel est le sens de la copie ? Le miroir de la société renvoie à Paula une approche du trompe-l'oeil qui ne serait pas une véritable forme de peinture, un art à part entière, elle s'interroge sur son activité, sa pratique. Le fac-similé de Lascaux est un faux comme le roman est une fiction, mais tous ne guident-ils pas vers une vérité ?
Que les artisans de la peinture de décor se rassurent, quelle plus belle ambassadrice auraient-ils pu rêver que Maylis de KERANGAL pour porter aux nues leurs oeuvres !
La plume de l'écrivaine est juste sensationnelle. Je me suis surprise une nouvelle fois à noter de nombreuses citations. Les phrases sont belles, elles sont longues, précises, soignées, méticuleuses et traduisent la quête perpétuelle de la fidélité, de l'exactitude et de la justesse du propos. Un roman qui sublime la peinture, comme la littérature !