Ma #Vendredilecture, c'est un roman sorti très récemment en librairie : "Hors d'atteinte" de Frédéric COUDERC, une lecture coup de poing. Je remercie tout spécialement les éditions Les Escales qui m'ont permis de le lire en avant-première.
Paul est écriviain. Son père est décédé quand il était adolescent. Son grand-père, Viktor Breitner, est sa seule famille. Il vit à Blankenese, un quartier donnant sur l’Elbe, à Hambourg. A 92 ans, le vieillard est victime d'une attaque cérébrale qui le fait tomber dans la dépendance. Paul, qui s'est toujours intéressé à l'histoire de son grand-père sans jamais obtenir de confidences, décide de mener l'enquête. Il découvre un lien établi avec un criminel nazi, Horst SCHUMANN, mais lequel ? Son grand-père a-t-il participé aux crimes de guerre ? Dès lors, pour l'écrivain comme le petit-fils, impossible de résister à la tentation. Paul Breitner ne sait pas encore que ses découvertes vont bouleverser sa vie.
Ce roman historique, vous vous dites peut-être, encore un sur la Shoah. Et bien, le livre refermé, je peux vous dire qu'il s'agit d'un roman très original et qu'il mérite vraiment d'être lu.
D'abord, il y a le procédé narratif, ce roman, c'est un livre dans un livre, le livre que Paul souhaite écrire sur la vie de son grand-père trouve sa place dans le roman qu'écrit Frédéric COUDERC. Ce nom vous dit peut-être quelque chose. J'ai lu de lui "Yonah ou le chant de la mer" aux éditions Héloïse d'Ormesson. Il évoquait alors le conflit israelo-palestinien et s'inspirait d'une histoire vraie, celle d'Abie NATHAN impliqué dans Voice of peace. Il concourait au devoir de mémoire. Frédéric COUDERC est dans la même démarche, là, à ceci près que le personnage historique qu'il va approcher est loin d'être recommandable.
Il y a donc un personnage. A l'organisation de l'extermination massive des Juifs, tziganes et autres personnes que les nazis estimaient être des dégénérés, il y avait des hommes. Si beaucoup se sont expatriés, notamment en Amérique du Sud, d'autres ont pris la direction de l'Afrique. De tous, certains ont été retrouvés et présentés à la justice pour être jugés, d'autres comme Horst SCHUMANN réussiront toujours à passer à travers les mailles du filet. Alors, à défaut d'un jugement rendu par les organisations internationales, c'est Frédéric COUDERC qui va s'y consacrer et croyez-moi, Horst SCHUMANN, vous ne l'oublierez jamais.
Et puis, il y a ces différentes pages de la grande Histoire que je ne connaissais pas encore. L'écrivain réussit à travers l'itinéraire de Viktor à nous emmener sur les côtés danoises, et puis à Sonnenstein, là où le régime nazi faisait ses armes.
Le témoignage de Génia OBOEUF-GOLDGICHT, survivante du camp de Birkenau, est bouleversant.
J’ai essayé pendant des années, mais non, je ne trouve pas le vocabulaire. Je comprends très bien le suicide de Primo Levi. Il a dû se poser cette question que je me pose encore ; comment ça a été possible, comment expliquer des trains entiers avec des populations entières, dont il ne reste plus de traces, avec cette rapidité, cette industrialisation, cette organisation ? P. 292
Il y a encore l'histoire de la famille Breitner, des personnages de fiction, une famille attachante aux destins meurtris par la seconde guerre mondiale. Comme j'ai aimé accompagner Viktor sur les traces de sa soeur, Vera, morte à l'âge de 12 ans, une enfant qui aimait passionnément la musique, le piano.
Le tout est porté par une plume qui lie allègrement la fiction et la réalité. Elle se joue des codes et navigue entre les registres, le romanesque, l'enquête, le récit historique, le témoignage. Frédéric COUDERC confirme son talent dans le genre. Chapeau !
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