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2022-02-12T07:00:00+01:00

Quand une écrivaine se livre... Portrait d'Alexandra KOSZELYK

Publié par Tlivres
©Patrice Normand/Robert Laffont

©Patrice Normand/Robert Laffont

Chère Alexandra, merci infiniment d’avoir accepté de répondre à mes questions. Après la lecture de ton troisième roman, "Le sanctuaire d'Emona", cet entretien s’est imposé de lui même. Mais revenons à nos débuts, ils datent maintenant !

Tout a commencé, enfin l’écriture je veux dire, avec un blog de chroniques littéraires, Bric à book, tiens, tiens, tu nous racontes ?

Oui ! Certains diraient que c'était il y a fort fort longtemps... Nous étions en 2006, je venais d'arriver en région parisienne. Je ne connaissais alors personne ou presque, je lisais énormément, sans pouvoir partager cette passion avec mon entourage... 
Après une virée en librairie, je me suis rendue compte que j'avais envie de garder une trace de mes lectures. Je me suis lancée dans la création d'un blog, rapidement aidée par mon frère (qui s'y connaît bien mieux que moi.) L'aventure venait de débuter ! Je ne connaissais rien à cet univers. Très rapidement, c'est devenu une passion, j'y ai connu des personnes qui sont devenus des amis. C'est tellement galvanisant de pouvoir partager sa passion avec d'autres ! 

Puis, j'ai ouvert un atelier d'écriture, toujours sur ce blog, cela doit faire plus de dix ans maintenant. Il s'agissait d'écrire un texte court à partir d'une photo. C'est grâce à ce média que j'ai osé me lancer un jour dans l'écriture d'un roman. 


J’ai toujours été une grande fan de tes publications, au point de lancer L’Antre des Mots et depuis 2015, T Livres ? T Arts ? D’ailleurs, tu te souviens de cette aventure ensemble, le Prix France Bleu Page des Libraires ?

Mais bien entendu ! Quel plaisir encore une fois de lire une sélection de livres, puis d'échanger avec d'autres membres du jury...


Et puis, il y a eu les 68 Premières fois, nos lectures communes de premiers romans, de nouvelles rencontres en chair et en os, jusqu’à ce que ça soit toi qui décide d’écrire un premier roman. Tu nous racontes ?

C'est l'atelier d'écriture qui m'a permis de "faire mes armes". L'écriture est comme d'autres arts, elle s'affine avec le temps, j’ai ainsi pu trouver ma voix et ma voie, de mieux connaître les thèmes qui m’étaient chers. 

Je crois que tout est lié : à mes yeux, il serait étrange d'écrire sans aimer lire. Nous écrivons sous le regard des auteurs qui nous ont précédés, nous en sommes imprégnés, que ce soit de façon consciente ou non. Quand j'écris, je lis beaucoup de poésie, j'en picore : c'est un genre qui me nourrit, par ses images, et les émotions qu'il véhicule. 


Alors, comment as-tu franchis le cap ? Ce roman « À crier dans les ruines », il représente quoi pour toi ?

Avec le temps, je me rends compte que ce premier roman était un cri du coeur, ce n'est pas un hasard si le titre contient ce nom. Un cri, car c'était avant tout un hommage à la terre de mes ancêtres, souvent bafouée et outragée par l'Histoire. Encore actuellement, c'est un pays de cicatrices. 

Il représente cette place que j'ai osé prendre un jour, celle qui est la mienne. J'ai cessé d'être un derviche tourneur. 


 

Forte d’un très grand succès, un énorme coup de ❤️ pour moi, tu as poursuivis avec « La dixième Muse ». Quelle relation entretiens-tu avec Guillaume APOLLINAIRE ?

Ha ! Guillaume... plus je me documentais sur lui, plus je l'aimais. Il y a dans l'enfance de son poète une absence qu'il a comblée grâce à son art. 

Au départ, je voulais écrire un portrait inversé d’Apollinaire. A la manière du roman Les dix amours de Nishino où un homme est vu par les femmes qui ont marqué sa vie, sans que lui soit narrateur. Puis, après avoir corrigé mon premier roman "A crier dans les ruines", j’ai eu envie de continuer de parler de la Nature, c’était une sorte d’appel. Apollinaire a eu une première partie de son oeuvre où elle avait une place prépondérante… J’avais mon sujet pour mon deuxième livre ! 


Ces deux romans ont été publiés Aux Forges de Vulcain, l’occasion d’un petit clin d’œil à David 😉 Comment s’est passée la rencontre avec cet éditeur ?

Nous avons d'abord échangé par mail, puis, David a voulu me rencontrer pour faire plus ample connaissance. C'est un moment primordial : le texte a besoin d'une bonne entente entre un écrivain et son éditeur. Ecrire est un acte intime, on s'y dévoile souvent, on s'y met à nu, aussi sans une véritable confiance, le texte pourrait en pâtir. 

J'ai la chance d'avoir rencontré deux éditeurs avec lesquels cette confiance existe, l’un pour les parutions « adultes » aux Forges, l’autre pour la jeunesse, dans la Collection R chez Robert Laffont. Nous partageons des références communes, des univers semblables. C'est un terreau pour déployer mes ramifications. 


Aujourd’hui, avec ce troisième roman, « Le sanctuaire d’Emona », changement de maison, il est donc édité chez Robert Laffont, pourquoi ?

Là aussi, c'est une rencontre entre Elsa (mon éditrice) et moi : elle venait de lire "A crier dans les ruines", et trouvait que j'avais parlé avec justesse des adolescents. Elle m'a envoyé un mail pour savoir si je souhaitais écrire pour cette tranche d’âge. Je n'y avais pas pensé, mais l'idée me séduisait. J'en ai parlé à David, qui ne publie pas de jeunesse, puis j'ai rencontré Elsa. 

Très vite, je lui ai proposé un synopsis qui lui a plu, c'était parti pour une nouvelle aventure. Je ne pensais pas que cette écriture m'emporterait ainsi. En fait, je côtoie tous les jours des adolescents : à l'origine, c'est un public que j'adore, pour son authenticité, sa façon d'être enthousiaste. Ecrire pour eux a été une véritable révélation : pour eux, j'ai eu envie de me dépasser. 


Alors, là, oui, changement de registre, tu t’improvises dans le roman jeunesse. Tu nous dis quelques mots de l’histoire ?

Il est question de magie, de coïncidences qui n'en sont pas, d'amitié qui renverse tout sur son passage et fait devenir meilleur, mais aussi de quête des origines, de civilisations perdues... 


Pourquoi cette histoire ?

Pour l'imaginer, je me suis replongée quelques années en arrière. Quelle histoire aurais-je voulu lire à cette époque ? Quel message aurais-je voulu entendre ? Ecrire pour la jeunesse est une façon d'écrire à l'adolescente que j'étais...


Séléné comme Irina sont en quête de leurs origines, leurs racines. Je crois que ton propre regard est porté par l’Est. Cette quête là n’est-elle pas aussi un peu la tienne ?

Je crois bien qu'il me serait difficile d'écrire sur un thème qui ne me plairait pas. Nous restons des mois, voire des années avec nos personnages, leurs joies comme leurs tristesses. Sans que mes personnages soient un miroir de moi-même, il y a des thématiques que je creuse. Et je pense vraiment que je ne pourrais pas écrire un roman qui ne se passe pas à l'Est. C'est un territoire tellement riche... Et je trouve qu’on n’en parle pas assez en littérature française. 


Pourquoi un roman jeunesse alors ?

Parce que c'est une histoire que j'ai imaginée pour eux, qu'écrire pour eux se rapproche aussi de ce que je fais tous les jours avec eux : les guider vers l'âge adulte. Il y avait une sorte de défi que je me devais de relever tant l'estime que j'ai pour eux est grande. 


Moi qui suis totalement tombée sous le charme de ce conte fantastique (il faut dire que mon adolescence date seulement d’hier.. enfin avant-hier ! Vous pouvez donc toutes et tous en déduire que ce livre est aussi pour vous 😉), j’ai eu l’immense joie de découvrir en 4ème de couverture qu’il s’agit d’une saga. Pourquoi ?

Oh, d'emblée, quand j'ai vu mon éditrice, elle m'a dit que c'était une saga, j'ai donc construit aussi mon synopsis selon cette donnée. Et c'est très grisant de ne pas terminer une histoire une fois le premier livre terminé, je vais pouvoir faire évoluer mes personnages, les faire grandir, c'est tout simplement génial ! Elles ne me quittent pas, mais restent encore un peu, comme ces élèves que je vois de la 6e aux études supérieures. Je les regarde toujours avec un regard attendri. C'est ça aussi le métier de professeur : voir deux ou trois générations défiler, apprendre quelles études puis quels métiers ils font, savoir qu’ils sont devenus parents.  


Combien de tomes prévois-tu ?

Plusieurs ! 😊


Je suppose que le public jeunesse va aussi modifier ta tournée des libraires plus orientée vers les lycées, non ?

Je ne sais pas vraiment, car j'ai déjà énormément vu des lycéens avec mon premier roman. Il a été sélectionné sur de nombreux prix de lycées. C'est un peu pareil pour la « La dixième Muse » : certains professeurs le conseillent à leurs classes de Première. Avec "Le sanctuaire d'Emona", ce sera sans doute une continuité de ce qui a été amorcé. 


Tu abandonnes les adultes un temps ou bien nous prépares-tu aussi un roman à venir ?

Oh non, je n'abandonne personne ! J'ai déjà réfléchi à mon prochain roman aux Forges, je l'ai commencé lui aussi. J'ai toujours été hyperactive et boulimique : l'écriture est un trésor dans lequel je nage sans éprouver de fatigue. 

Je ne voudrais pas te mettre la pression mais je suis déjà en sevrage de ta plume et je ne sais pas comment je vais pouvoir tenir !!! Mais oublions-ça, pour le moment, tapis rouge à ce dernier roman sorti il y a quelques semaines seulement. Je te souhaite un immense succès. Que la jeunesse te rende bien tout l’amour que tu lui donnes !

Hahaha ! Merci ! A très vite pour la suite des aventures, alors ! 

 

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