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2022-02-11T08:25:16+01:00

La patience des traces de Jeanne BENAMEUR

Publié par Tlivres
La patience des traces de Jeanne BENAMEUR
 
Il y a des rdv avec des écrivains qui sont un peu comme des rencontres avec des amis. A chaque lecture de Jeanne BENAMEUR, c’est un peu comme retrouver un univers littéraire, un registre artistique et puis toujours,  le pouvoir des mots… pour le plus grand des plaisirs.
 
Vous vous souvenez peut-être de
 
 
Dans cette rentrée littéraire de janvier 2022, place à "La patience des traces".
 
Tout commence avec la chute de ce bol bleu, un matin. Ce bol, il accompagnait Simon dans sa vie depuis longtemps, c’était un cadeau précieux. C’était avec lui qu’il commençait sa journée, avec lui qu’il buvait le premier café avant de se consacrer à ses patients. Simon est psychanalyste. Il habite en bord de mer. Il vit seul. Il sent que ce bol brisé est bien plus que deux morceaux de porcelaine séparés, il est la révélation d’un appel vers le lointain, un dépaysement pour mieux se retrouver.
 
Jeanne BENAMEUR a cette capacité, en quelques phrases, à planter le décor, focaliser son objectif sur son personnage, inviter à la concentration. Le rythme est lent, chaque mot pesé. Simon peine à se projeter. Je le ressens dans mon corps, ma sensibilité est éveillée. Partira, partira pas. Il va finir par prendre l’avion pour une destination qu’il a laissé choisir par son ami. Il joue avec Hervé aux échecs. Il est en totale confiance, la confiance que l’écrivaine va explorer sous toutes les coutures et décliner à l’envi.
 
Comme j’ai aimé découvrir la psychanalyse à travers la carrière de Simon, la nécessité d’écouter, une présence pour franchir le cap…


Et même si du divan une voix semblait s’adresser à moi, je sais que je n’étais là que pour le passage des paroles du dedans au dehors. P. 125

Et puis, il y a ce voyage intérieur, celui que Simon s’offre à lui-même, meublé de silences, habité par la solitude, porté vers la contemplation, un voyage pour se débarrasser de ce qui l’entrave, à l’image de ces raies Mantas qui se défont sur les coraux de ce qui les encombrent et s’offrent ensuite le plus beau des vols planés comme un nouveau souffle, un nouvel élan vers autre chose. Quelle plus jolie métaphore.
 
Le voyage de Simon fait ressurgir la douleur de malheureux souvenirs. Il avait bien essayé de panser ses propres plaies mais elles lui résistaient.


Les émotions violentes sont empreintes. On ne peut que les circonscrire pour qu’elles n’envahissent pas tout. P. 123

Chez Akiko et Daisuke Itô, tout est différent. Tout est différent, le cadre de vie, les saveurs culinaires, les tenues vestimentaires, le rapport aux autres. Avec eux se crée une complicité presque naturelle qui va bien au-delà des mots, c'est de leur musicalité dont il est question. Chuintés, simplement murmurés, délicatement prononcés, ils deviennent le baume de toutes les trahisons.


La langue inconnue qui vous enveloppe, se parle juste à côté de vous. Lui y trouve une paix profonde. P. 106

J'ai adoré voir la complicité se nourrir entre les deux hommes, en l'absence même de la traduction des mots. Si l'on peut parfois appréhender de ne pas pouvoir échanger par le biais d'une langue commune, il est en réalité bien d'autres alternatives à la parole pour entrer en communication avec l'autre comme le regard, l'expression du visage, les mouvements des mains, la position du corps, et bien d'autres encore. Simon et Daisuke vont expérimenter le non-verbal dans leurs échanges et nous montrer ô combien il peut être riche... d'humanité.
 
L'art peut-être le prétexte à l'expression d'émotions et devenir la source d'un partage. Si vous êtes une fidèle de Jeanne BENAMEUR, vous savez qu'il occupe toujours une place de choix dans ses romans. Dans "La patience des traces", elle nous propose une plongée dans deux disciplines artistiques, deux pratiques artisanales qui perpétuent la beauté et l’utilité du geste, sa répétition inlassable pour atteindre la perfection. Il y les tissus bingata aux couleurs vives, des couleurs crues, des couleurs pures, qui vous touchent en plein cœur. Il y a aussi la porcelaine avec le kintsugi, cette pratique artistique qui magnifie les brisures des objets avec de la poudre d’or.
 
L’écriture de Jeanne BENAMEUR est éminemment belle et délicate, profondément sensorielle. Ce roman est une nouvelle fois une invitation à arrêter le temps, se poser, toucher, sentir, regarder, écouter, savourer pour S’ÉMERVEILLER.

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