Ce roman, je l’ai acheté à la Librairie Contact d'Angers (l'occasion d'un petit clin d'oeil à l'équipe) suite aux recommandations d’Antoine BONNET de la Librairie Michel de Fontainebleau dans #unendroitoualler et Bernard POIRETTE sur Europe 1.
Assurément un très bon choix !
Sandrine tombe sous le charme de « l’homme qui pleure », celui dont la première femme est portée disparue et qu’elle découvre sur son écran de télévision. Elle décide de participer à une marche blanche, c’est là qu’elle va le rencontrer, en chair et en os. Une histoire d’amour commence, pour le meilleur et pour le pire !
Je ne vais pas vous en dire beaucoup plus sauf que le scénario machiavélique est parfaitement orchestré par une écrivaine talentueuse.
Dans le rôle de la victime, il y a Sandrine, une jeune femme que personne n’a jamais aimé. Elle mène avec son corps une guerre sans merci et se maltraite à coups de propos injurieux. Il n’en fallait pas plus pour que « l’homme qui pleure » tisse sa toile de prédateur, exploite les fragilités de celle qu’il va progressivement museler.
J’ai beaucoup aimé les relations établies entre l’enfant de « l’homme qui pleure », Mathias, et Sandrine, « La deuxième femme ». Il y a, dans la complicité établie entre ces deux êtres fragiles, maltraités, quelque chose de profondément intime et émouvant.
Et eux sont là, dans la cuisine, à attendre la guerre, sans savoir s’il faut lever le pont-levis, affûter les armes, sans savoir quoi faire. P. 63
Mais plus que tout, ce qui m’a touchée dans ce roman noir, c’est le mécanisme de l’emprise que « l’homme qui pleure » déploie sur une, puis deux, femmes. A l’intérieur de la maison, un huis clos à l’abri des regards, « l’homme qui pleure » s’octroie tous les droits. Il conditionne la vie familiale à ses émotions, ses états d’âmes, ses actes :
Il faut lire les petits signes. C’est comme un livre très important qu’il faut observer lettre par lettre pour connaître la fin de la journée. P. 188/189
Ce roman, je l’ai lu comme un acte militant. Louise MEY s’est beaucoup documentée sur les violences faites aux femmes et prouve ici ô combien ce qui se passe avant le premier acte physique est lourd de conséquence. L’humiliation, les propos, les comportements qui permettent d’instaurer un climat de peur, d’angoisse, sont autant de violences qu’il convient de repérer et de caractériser. L’écrivaine décrit avec précision cette échelle de violences. Elle évoque des petits détails qui pourraient paraître insignifiants s’ils n’étaient accumulés au quotidien dans le seul but de nuire par l’asservissement.
C’est un roman (Louise MEY aurait pu choisir la forme du récit de vie) qui, par son registre littéraire même, rend universel le scénario du prédateur.
Dans une plume fluide, Louise MEY varie les rythmes, plutôt lent dans la première partie du livre avec une accélération nette et fulgurante dans le dernier quart.
C’est une lecture coup de poing, haletante, que je ne suis pas prête d’oublier, comme tous les autres romans que j’ai lus et qui sont eux aussi en lice pour le Prix Maison de la Presse 2020 :
« Rivage de la Colère » de Caroline LAURENT,
« Et toujours les forêts » de Sandrine COLLETTE,
« Il est juste que les forts soient frappés » de Thibault BERARD.
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