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2019-09-26T18:05:21+02:00

Quand une écrivaine se livre... portrait de Lenka HORNAKOVA-CIVADE

Publié par Tlivres
Quand une écrivaine se livre... portrait de Lenka HORNAKOVA-CIVADE

Très chère Lenka, nous nous connaissons depuis quelques temps maintenant, depuis la sortie de "Giboulées de soleil" en fait.  C'était il y a un peu plus de trois ans. Les fées des 68 Premières fois l'avaient sélectionné comme un premier roman prometteur, elles ne s'y étaient pas trompées.

Depuis, il y a eu "Une verrière sous le ciel" et puis, tout récemment "La Symphonie du Nouveau Monde".

Trois romans, trois coups de cœur pour moi ! Tu as accepté de répondre à mes questions aujourd'hui, tu m'en vois ravie ! 

Avant d'aborder cette rentrée littéraire tout à fait sensationnelle te concernant, peux-tu nous parler de ton rapport à l’écriture ? Qu'est-ce qu'elle représente pour toi ?

Vassily Kandinsky a dit à propos de la peinture qu’elle est une nécessité intérieure. Je trouve que cela exprime parfaitement mon rapport à l’écriture, et à la peinture aussi. Une nécessité fondamentale. 

Dans quel environnement écris-tu ? Une pièce en particulier ? 

Il y a, pour moi, plusieurs temps d’écriture. Les premières notes et les idées, je peux les prendre pratiquement n’importe où, dans une gare, en marchant, sur la terrasse d’un café, j’ai toujours un carnet avec moi. Ensuite, il y a un temps de travail de composition, d’écriture proprement dit, et là, il me faut le calme, la solitude, un certain retrait, quelque chose de presque monacal. Mais pas nécessairement chez moi.

Tes trois romans ont été publiés chez Alma Editeur. Qu’est-ce qui fait que l’on reste fidèle à une maison d’édition ?

Mis à part deux ou trois personnes très intimes, des lecteurs- privilégiés, on fait lire son texte, parfois encore en cours d’écriture, d’abord à son éditeur. C’est une grande chose, alors il faut beaucoup de confiance, une relation tout à fait particulière. Je fais confiance à Alma.

Ton tout dernier roman « La Symphonie du Nouveau Monde » vient de sortir en librairie. Peux-tu nous dire ce qui t'a inspirée ?

Grâce à une rencontre il y a quelques années avec un membre du corps diplomatique tchèque, j’ai entendu, pour la première fois, parler de Vladimír Vochoč, le consul tchécoslovaque à Marseille entre les années 1938 - 1941. Son histoire était passionnante, mais encore plus intriguant était le fait que lui-même et son action, pourtant héroïque, était presque oubliés, en tout cas tout à fait inconnus du grand public. Cette question de la mémoire et de l’oubli, des silences imposés et subis, y compris volontairement, tout cela était déjà la matière très intéressante pour un roman.

Et puis ce personnage de la poupée, une prodigieuse invention. Peux-tu nous en parler ?

Impertinente, perspicace, curieuse, elle est au cœur des événements mais garde une distance qui lui permet de voir et dire des choses. C’est une narratrice idéale. Puis, malgré le fait qu’elle soit une poupée de chiffon, elle possède véritablement un cœur. Et elle prétend même de respirer et d’avoir une âme !

Ce roman "La Symphonie du Nouveau Monde" tient un propos militant. Il concourt au devoir de mémoire notamment d'un homme, pourquoi ?

Les rapports entre l’individu et la grande Histoire m’intéressent profondément. Dans les "Giboulées du soleil", il s’agissait de la transmission entre les générations dans un contexte historique contraignant, "Une Verrière sous le ciel" examine les frontières intérieures de l’individu et celles entre la vérité et la réalité, les illusions et les possibilités.

Le consul Vochoč est actif, engagé, il fait tout ce qui est en son pouvoir pour infléchir le cours de cette grande Histoire, et il en est conscient.

Le roman mêle la réalité historique et la fiction. En arrière-plan, il y a une réflexion sur la relation entre le pays et la langue, entre la langue et la vérité des êtres. Ils sont tous, à un moment donné, sur cette très ténue limite entre la loyauté et la désobéissance.

Justement, Lenka, dans les trois romans, tu as une approche toute singulière de la langue. Tu écris tes romans dans ta langue d'adoption, le français, pourquoi ?

C’est une expression et un exercice de liberté. Le français me permet d’exprimer avec plus de justesse et précision même l’indicible dans ma langue maternelle. C’est comme la découverte d’un nouveau territoire, de la nouvelle manière d'appréhender, comprendre, sentir et ensuite reformuler le monde.
J’écris aussi en tchèque. Il s’agit souvent des textes plus courts, notamment pour la radio. 

Dans tous tes romans, les personnages principaux sont des femmes, émancipées, avides de liberté. Quel message veux-tu transmettre à la jeune génération ?

Aucun. Je propose, je conte des destins. La littérature, à mon avis, suscite plus de questions qu’elle n’apporte des réponses. Moi, je suis libre dans mon écriture, le lecteur dans sa lecture. C’est ça qui est formidable, cette rencontre des deux libertés autour d’un texte, d’une histoire, d’une idée.

Et puis, il y a les arts ! Dans "Giboulées de soleil", tu évoquais la broderie et la littérature, dans "Une verrière sous le ciel", il y avait la peinture et la sculpture, dans ton dernier roman "La Symphonie du Nouveau Monde", il y a la musique. Quel rapport personnel entretiens-tu avec les arts ? Qu'est-ce qui te fascine dans ces disciplines ?

L’art fait partie intégrante de la vie, mais parfois on ne prend pas le temps pour s’en apercevoir, pour l’apprécier, le goûter. Je ne hiérarchise pas les arts, c’est la question de support technique pour essayer de toucher ou d’approcher quelque chose d’essentiel. 

Je disais en introduction que ta rentrée littéraire est on ne peut plus réjouissante. "La Symphonie du Nouveau Monde" figure dans la première sélection du prestigieux Prix Renaudot, un prix que tu as déjà reçu. C'était en 2016, les lycéens avaient salué la qualité de tes "Giboulées de soleil". Comment vis-tu cet engouement pour ton livre ?

D’avoir la reconnaissance de la part de ses paires, c’est bien sûr réjouissant et je l’apprécie énormément. Que les lycéens aient aimé mon premier roman, "Giboulées de soleil", c’était un cadeau précieux. Ce sont des lecteurs exigeants. Je ne peux souhaiter pour "La Symphonie du Nouveau Monde" que le même accueil auprès des lecteurs !   

Comme tu le sais, cet entretien est diffusé en partenariat avec Page des libraires. J’en profite donc pour faire un petit clin d’œil à Bénédicte Férot de la Librairie Tirloy de Lille, Anaïs Ballin de la Librairie L’Écriture de Vaucresson et Lyse Menanteau de la Librairie Le Matoulu de Melle, qui ont rédigé des chroniques de tes romans.

Les libraires sont nos premiers lecteurs « innocents et professionnels », ils découvrent les romans avec leur sensibilité mais aussi avec un œil bien averti et esprit aiguisé.

Ils sont les passeurs des livres et leur regard, jugement et soutien sont primordiaux. Dire simplement « merci  à eux » est peut-être banal, mais ça vient du fond du cœur.

Outre le formidable accueil que t'a réservé le collectif Les libraires ensemble puisqu'il fait partie de leur top 100, l'occasion d'un petit clin d'œil à la Librairie Richer. Quelles relations as-tu avec les professionnels du livre ? 
 

Sans les libraires et les libraires indépendants, le monde du livre serait bien plus restreint et triste. Je suis toujours heureuse de revenir chez des libraires qui m’ont déjà invitée et de rencontrer des nouveaux. C’est d’ailleurs assez magique de constater que chaque libraire apporte à sa librairie une ambiance, un esprit particulier.

Et un grand merci à la Librairie Richer et le collectif Les libraires ensemble !

Petite surprise Lenka, rien que pour toi, une nouvelle jeune libraire qui vient de rejoindre l'équipe Richer te fait un petit clin d'oeil, coup de coeur de Sarah pour ton dernier roman !

As-tu une adresse particulière à nous conseiller ?

J’ai mes adresses préférées, puisque j’ai de la chance de connaître un certain nombre d’excellents libraires. La relation avec son libraire a quelque chose de très singulier. Le libraire est comme un ami. Je souhaite à chacun de trouver cette relation d’amitié singulière. 

Je sais que tu lis beaucoup. Quel est ton dernier coup de cœur ? 

Il y a quelques semaines, j’ai lu le dernier livre de Michèle LESBRE « Le rendez-vous à Parme » que j’ai beaucoup aimé. Puis un roman d’une auteure tchèque.

Que lis-tu actuellement ?
Je suis plongé dans un ouvrage "Les yeux de Rembrandt" de Simon SCHAMA, et je lis aussi le récit de Tibor DERY, "Niki".

Enfin, si tu devais partir t'installer sur une île déserte avec un seul livre dans ta valise. Quel serait-il ?

Alors là, j'hésite entre un dictionnaire et un atlas du monde. Je pourrais prendre les deux ?

Bien sûr, ma chère Lenka !

Quel joli cadeau tu m'as offert, Lenka, en acceptant cette interview. Je suis très touchée et t'en remercie infiniment. Ce moment de presque intimité touche à sa fin. Il ne me reste plus qu'à te souhaiter bonne chance pour les prix littéraires, nul doute que les distinctions pleuvront au cours de l'automne prochain. J'ai déjà hâte d'y être !

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