Pouvez-vous nous présenter l'histoire de votre maison d'édition ?
Cette maison a été fondée il y a 10 ans maintenant. Après 37 années de journalisme en presse écrite et radio, j'avais envie de quitter mon ronron quotidien. Et puis, c'est à cette période aussi que Catherine ARGAND, un temps journaliste pour le magazine Lire, devenue éditrice chez Rivages, a connu quelques remaniements dans sa maison. Nous avons construit ensemble le projet de lancer Alma éditeur, une affaire de synchronisation.
Votre maison a-t-elle une ligne éditoriale, une sorte de fil rouge dans toutes vos publications ?
Nous avons fait le choix dès le début de ne publier que de la fiction française, et puis d'aller sur le champ des essais, des sciences humaines, de la philosophie, mais avec une approche décalée par rapport à ce qui existait déjà.
La première année, nous n'avons publié que des premiers romans et puis nous avons progressivement développé notre propre école avec un rythme de trois premiers romans environ par an. Nous nourrissons tout particulièrement la fidélité qui nous lie aux auteurs pour constituer une oeuvre de leurs publications.
Nous n'avions pas la volonté d'aller "démarcher" des auteurs d'autres maisons d'édition. Pour autant, nous sommes convenus avec certains d'entre eux de faire un pas de côté et de leur permettre d'être édité par notre maison mais pour un seul de leurs livres. C'est le cas de François BEGAUDEAU avec "Au début" en 2012.
Ça sera le cas également pour Karin SERRES à la rentrée littéraire de septembre avec "Les silences sauvages". Pour les distinguer de nos autres ouvrages, nous avons choisi de les publier dans la Collection Pabloïd, très colorée.
Justement, nous y venons, vous avez parié sur une charte graphique pour singulariser vos livres. Pouvez-vous nous en dire quelques mots ?
Nous avions la volonté effectivement de travailler sur le visuel de nos livres. Nous souhaitions quelque chose de plutôt classique, dans tous les cas de sobre. C'est ainsi que nous avons retenu la proposition de François-Xavier DELARUE avec, pour la littérature, une couverture dans un ton gris, une tranche colorée en référence à notre oiseau, le jabiru, cet échassier qui figure sur toutes nos publications.
Vous recevez très certainement de nombreux manuscrits. Comment retenez-vous l'un plus que l'autre ?
Deux-trois personnes les lisent et puis, certains s'imposent, souvent au feeling. Retenir un manuscrit est une chose mais de nombreuses étapes sont encore à franchir avant la sortie en librairie. Des premiers contacts sont établis avec l'auteur, des propositions de mises au point sont faites, l'écrivain a le choix de poursuivre les échanges, ou pas. C'est sur ce canapé, présent depuis l'origine de la maison, que tout se joue... ou presque !
Vous pouvez nous le présenter succinctement ?
Oui, en fait, l'action se passe autour d'une maison familiale située en Bretagne du sud. Le roman tourne autour de souvenirs d'enfance, d'une histoire d'amour, d'une rupture, et puis de retrouvailles qui seront pires que les premières relations. La mer y est très présente. Il y a du romantisme, des sentiments avec une vraie finesse dans l'approche psychologique, mais ce n'est pas tout, il y a aussi l'histoire de l'écriture d'un livre autour de la rupture consommée.
Nous tenons beaucoup à la place de l'imaginaire dans nos romans, la présence de l'irréel nous paraît fondamentale. Ça se vérifiera avec les romans de Lenka HORNAKOVA-CIVADE. Il y a dans "La symphonie du Nouveau Monde" la présence d'une poupée, un personnage à part entière, tout comme la langue russe qui, dans "Domovoï" de Julie MOULIN, exerce une véritable fascination sur le personnage principal.
Nous développons des relations avec des libraires spécialisés, très orientés littérature. Nous avons trois personnes, des anciens libraires d'ailleurs, qui travaillent sur le créneau de la "surdiffusion", ils organisent des événements, des rencontres. Ils travaillent pour trois quatre éditeurs à la fois.
Comme vous le savez, cette interview est réalisée en partenariat avec le groupe Page des Libraires, comment qualifieriez-vous le travail réalisé par ce réseau ?
Précieux, sans aucun doute. Nous aimons tout particulièrement voir des libraires écrire sur nos livres. Certains lisent, vendent, mais d'autres encore passent à l'écriture et nous trouvons la démarche très intéressante. La formule de Page des Libraires est tout à fait adaptée. Et puis, nous suivons quelques libraires, nous connaissons un peu de leur vie, leur itinéraire professionnel, leurs mutations...
Je vous propose de conclure maintenant, enfin presque.
Avant de nous quitter, je voudrais faire un clin d'oeil à une association qui partage votre volonté à vous de promouvoir les premiers romans, il s'agit des 68 Premières fois bien sûr. J'ai l'immense chance moi-même d'y participer en tant que lectrice. Il y a dans cette association des fées qui réalisent un travail extraordinaire pour découvrir de nouveaux talents, édités, et leur offrir la lumière qu'ils méritent parmi les quelques centaines de romans qui sortent à chaque rentrée littéraire. C'est comme ça, par exemple, que j'ai découvert la plume de Lenka HORNAKOVA-CIVADE avec ses "Giboulées de soleil", celle de Julie MOULIN aussi avec "Jupe et pantalon", Fanny TONNELIER pour "Pays provisoire"...
A bien y regarder, votre maison d'édition y est régulièrement citée. Qui sait ? Peut-être que le roman de Théophile BOYER fera partie de la sélection automne 2019, je crois les doigts pour vous.
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