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2019-05-10T06:00:00+02:00

Pleurer des rivières d'Alain JASPARD

Publié par Tlivres
Pleurer des rivières d'Alain JASPARD

Éditions Héloïse d’Ormesson


Ce roman a toute une histoire. D’abord, je souhaiterais remercier Page des libraires pour ce cadeau offert en juin 2018 lors du lancement de la rentrée littéraire. J’y étais en tant que jurée du Prix France Bleu Page des libraires qui a couronné Wilfried N’SONDE pour son formidable « Un océan, deux mers, trois continents ».

Je suis rentrée chez moi, ai posé « Pleurer des rivières » d’Alain JASPARD sur une étagère de ma bibliothèque et l’ai laissé là se faire doubler par tout un tas d’autres livres. Il aurait pu y rester encore et encore s’il n’y avait eu cette très belle rencontre avec l’auteur, s’il vous plaît, aux Journées nationales du livre et du vin de Saumur.

Je mesure aujourd’hui la beauté de ce premier roman passé à côté des 68 Premières fois...

Sammy est un gitan, il a un accident avec son camion, le moteur est mort, il ne peut pas payer son remplacement, un camion est pourtant l’outil de travail des hommes des gens du voyage. Il lui faut cet argent. Il se rapproche de son ami Franck et lui propose un coup. Il a eu connaissance du tournage d’un film dans les environs. Des kilomètres de câbles en cuivre y sont déroulés, la pause de midi leur permettra largement de s’approvisionner en matière première qu’ils revendront à la sauvette. Mais voilà, tout ne se passe pas comme prévu, ils se retrouvent coffrés par la police. Franck et Sammy sont défendus par Julien, un avocat commis d’office pour des comparutions immédiates, un lien va se tisser pour le meilleur... et le pire.

En réalité, tout ne commence pas tout à fait comme ça mais avec une scène d’amour. Les premières pages décrivent dans une plume érotique la première aventure entre Franck et Mériem, elle n’a alors que 15 ans. Le temps d’une mission évangélique, ils ponctueront leurs journées d’ébats sexuels. A la fin, elle découvre sa grossesse, le mariage est rapidement organisé. Un premier enfant naît de cette union, et puis un deuxième, un troisième... le huitième suscitera bien des convoitises.

Dans un scénario habile et audacieux, Alain JASPARD confronte deux univers sociaux pour évoquer le sujet de la maternité et de ses représentations. Dans les communautés des gens du voyage et des bourgeois, les enfants ne font pas partie du même projet familial. Il y a ceux qui les accueillent comme des cadeaux de Dieu...


[…] Dieu leur a donné sept enfants, ça fait beaucoup mais quand un enfant arrive on va pas le renvoyer à l'expéditeur. P. 13

et les autres qui veulent tout maîtriser notamment en termes de temporalité. Chez ceux chez qui ils arrivent trop tôt et viendraient chahuter un parcours professionnel ambitieux, on recourt à l’IVG, quitte à procéder à une fécondation in vitro quand l’heure choisie sera venue de procréer et que la nature peinera à reprendre ses droits. Bien sûr, certains pourraient voir des fils un peu gros avec des stéréotypes largement véhiculés, moi, je me suis glissée dans la caravane de Franck et Mériem, dans l’appartement chic aussi de Julien et Séverine, ironie du sort, elle est illustratrice jeunesse et est l’auteure d’une série lancée il y a 6 ans et dédiée aux « mal-connus mal aimés ». Je me suis laissée imprégner par les personnalités de chacun et me suis fondue dans le décor planté par Alain JASPARD. Ce roman est écrit par un réalisateur de cinéma, vous ne serez donc pas surpris(e) par toutes ces descriptions qui contribuent à nourrir l’imaginaire... Le 7ème art, il connaît, il a notamment adapté Tom-Tom et Nana de Jacqueline COHEN et Bernadette DESPRÉS.

Le propos est profondément humain, généreux, bienveillant. 

Ce roman court (190 pages), parfaitement construit, a aussi le mérite de poser des questions de société. Il aborde le sujet de la PMA, évoque la morale et l’éthique. Un consentement entre des hommes suffirait-il à contrer la loi ? Alain JASPARD ne porte pas de jugement, il nous invite à méditer sur l’évolution de la société, la place des femmes, le rapport au corps, celui-là même qui porte l’empreinte de nos blessures, et plus généralement, de nos vies. 

La narration est fluide, rythmée, haletante, la plume tendre et délicate, poétique aussi...


Le royaume des larmes est mystérieux, n’y entre pas qui veut. P. 83

le propos rieur mais attention, il peut être aussi parfois grinçant. Dans « Pleurer des rivières », méfiez vous de l’eau qui dort ! La chute est magistrale, j’ai refermé ce roman le cœur gros. 

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