Je sors de cette lecture totalement habitée par le personnage de Bruno K, un homme d’un peu plus de 50 ans. Sur le chemin de l’Université de Genève où il enseigne la littérature à des étudiants qui l’adulent, il se laisse porter par les pas d’une femme. Brutalement, il s’écroule, il est victime d’un arrêt cardiaque et en meurt. Dans sa poche, la police découvre deux billets pour un spectacle du violoniste Alexakis le soir même au Victoria Hall. La boucle aurait pu être bouclée mais le destin en a décidé autrement.
Avec ce roman, Diane BRASSEUR déroule le fil de l’existence de Bruno K à travers un personnage flamboyant, excessif aussi, celui de Koula, sa mère, d’origine grecque, mariée quand elle était toute jeune à un Suisse qui, la bague au doigt, l’emmène dans son pays pour vivre au plus près de sa famille à lui. Seulement, lui est très attiré par les femmes, pour le meilleur comme pour le pire. Sa vie va être rythmée par des tragédies, des déménagements. L’écrivaine nous fait voyager entre la Grèce, la Suisse, l’Égypte...
Ce roman, c’est une affaire de femmes, de filiation, de malédiction aussi un peu comme si elles avaient à affronter bien malgré elle le fardeau des hommes. Elles sont trompées par leur mari, vivent des grossesses difficiles, sont confrontées au deuil. Il y a la maternité et ce qu’elle apporte de différent dans une relation mère-fille :
Depuis qu’elle était enceinte elle ne pouvait pas dire qu’elle aimait sa mère davantage, mais elle la comprenait mieux et la respectait infiniment. P. 57
Ce roman, c’est aussi une histoire d’hommes, des fils, des frères, des maris, des amants. Avec le personnage de Bruno K, Diane BRASSEUR nous livre un roman d’apprentissage avec comme fil rouge, la musique.
J’ai adoré la découverte des partitions par Bruno K et les coïncidences qui ont mis sur son chemin des instruments, donnant à voir son talent. Lui aussi va grandir, il va se confronter aux difficultés de la vie, lutter contre la maladie, chercher sa voie à côté de celle de son frère, Alexakis, un violoniste virtuose, pour devenir quelqu’un...
Il m’a semblé que l’essentiel n’était pas de devenir un « grand homme », un homme célèbre, tout cela est si relatif. J’ai préféré essayer de devenir un homme complet. Un homme simplement. P. 305
La discipline artistique est explorée tout en beauté sous la plume de Diane BRASSEUR mais ce que j’ai le plus aimé, c’est cette forme narrative régulièrement ponctuée de correspondances. La distance prise entre Bruno K et sa mère est compensée par des relations étroites par la voie de l’écriture, une forme singulière d’expression des sentiments :
Les lettres suscitent une intimité propice aux confessions. P. 137
Ce livre, je l’ai beaucoup aimé pour ses personnages éminemment romanesques, j’ai pris un immense plaisir à me faufiler le temps d’une lecture dans la toile familiale tissée autour de Kalou, une mère exigeante qui a pris l'habitude de se réaliser à travers la réussite de son fils, Bruno K, un poids lourd à porter.
Je ne connaissais pas Diane BRASSEUR, c’est maintenant chose faite. Je remercie Netgalley de m’avoir mise sur la voie, ce roman fait partie du challenge lancé jusqu’au 6 juin prochain. C’est la deuxième lecture après « L’âme du violon » de Marie CHARVET
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