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2018-05-08T08:41:42+02:00

Juste après la vague de Sandrine COLLETTE

Publié par Tlivres
Juste après la vague de Sandrine COLLETTE

Editions Denoël

Je ne lis par régulièrement du roman noir mais une rencontre sur le Salon du Livre de Paris m’a fait replonger si je puis dire. Il faut dire que la plume de Sandrine COLLETTE est toujours la promesse de profondes émotions, impossible de résister ! Après « Six fourmis blanches » et « Un vent de cendres », voici donc « Juste après la vague », son tout dernier roman publié en janvier 2018.

Je vous dis quelques mots de l’histoire :

Un tsunami a récemment immergé l’ensemble des terres d’une  île, à l’exception du sommet où vit une famille de 11 personnes, Pata, Madie, et leurs 9 enfants. Ils sont les seuls survivants du cataclysme. Après 6 jours passés à scruter l’horizon dans l’attente de secours et devant la montée permanente des eaux charriant les restes des maisons détruites et les corps des noyés, les parents décident de fuir. Ils ne tiendront toutefois pas tous sur l’embarcation de fortune qui leur reste encore. Les parents décident finalement de laisser trois enfants, endormis, avec la promesse de venir les chercher dès qu’ils auront accoster sur les hautes terres.

Ce roman fait partie de la collection « Sueurs froides », vous comprendrez aisément qu’il y a effectivement toute sa place.

Sandrine COLLETTE plante le décor d’une fin du monde.

D’un côté, il y a une épopée familiale portée à bout de pagaies par le père et l’aîné des garçons. Le périple pour rejoindre les hautes terres est estimé à 12 jours de navigation, mais c’est sans compter sur la furie des éléments. Ils sont si fragiles face à l’immensité d’un paysage, qui n’est plus composé que d’eau, et le bouillonnement d’un océan enragé. Ils vivent des moments d’intenses frayeurs et, vaille que vaille, tentent d’avancer. 

D’un autre côté, il y a les aventures de trois jeunes enfants, plongés dans un chagrin immense d’avoir été abandonnés, qui vont se laisser guider par leur instinct de survie. Leur maman a bien laissé une lettre leur demandant de faire durer le stock de nourriture pour tenir le temps qu’ils reviennent les chercher, mais il ne s’agit que d’enfants ! Ils ont bien vu leur mère cuisiner, mais de là à assurer la préparation de repas pour trois... Ils ont bien vu leur père pêcher mais de là à relever un poisson des eaux noirâtres...

Ce roman, je ne vais pas vous en dire beaucoup plus si ce n’est que votre cœur va être mis à rude épreuve.

L’histoire est terrifiante et profondément dramatique. Sandrine COLLETTE maîtrisant à la perfection l’art de la description, elle met tous nos sens en éveil. Les tribulations de cette famille sont toutes plus intenses les unes que les autres. Vous pensez que le pire est arrivé ? L’écrivaine, elle, conçoit un scénario qui va encore plus loin !


La barque est seule et dérisoire sur l’océan en colère. La mère regarde Pata de toutes ses forces. Il observe le monde, il sait lui aussi. Il compte leurs chances. Les rames sont posées sur le bord de l’embarcation, inutiles à présent. P. 129

Avec ce roman, l’auteure met le doigt sur le rapport de l'homme à l'environnement dès lors qu'il en perd la maîtrise. Elle en dit long sur l’histoire des réfugiés climatiques, une population trop peu appréhendée aujourd’hui qui pourrait pourtant atteindre les 250 millions en 2050 selon les prévisions de l’Organisation des Nations Unies. Je n’ose à peine concevoir qu’il s’agisse d’un roman d’anticipation et pourtant. On se souvient tous des images largement médiatisées du tsunami du 26 décembre 2004 dans l’océan indien et qui a fait environ 250 000 morts. La nature se fait d’une telle violence qu’elle en devient une arme de destruction massive.

Ce sont aussi dans les contextes où la vie devient la plus fragile que la vraie nature des gens s’exprime le plus fortement. Sandrine COLLETTE crée une intrigue post-apocalyptique qui devient le terrain de jeu idéal à l’exploration des relations humaines. Elle va ainsi disséquer celles qui unissent cette famille, déchirée.

Il y a celles des parents avec leurs enfants, les émotions d’une mère, torturée par le sentiment de culpabilité d’en avoir laissé trois, meurtrie viscéralement par l’amour inconditionnel qu’elle porte à tous :
 


Madie ne se délivrera pas de sa peine, c’est elle qui la porte. Sans elle, elle serait déjà devenue un courant d’air, une ombre, une poussière de mère. P. 181

Il y a aussi la résignation d’un père qui tente le tout pour le tout, histoire de sauver ce qu’il lui est encore permis d’espérer, à la vie à la mort.

J’ai personnellement beaucoup aimé suivre les aventures des trois enfants restés seuls, rivalisant d’ingéniosité, se heurtant à la méconnaissance des matériaux et leur alchimie, de la loi de gravité (au sens propre comme au sens figuré !), menant expérience sur expérience avec une ténacité redoutable. Le portrait de chacun est attendrissant et les trois, ensemble, constitue une équipe de charme.  Sandrine COLLETTE nous offre ainsi quelques parenthèses jubilatoires d’enfants portés par un enthousiasme débordant, animés le sens de la fratrie et  une furieuse envie de vivre. Il y a une dimension sauvage, presque animale, dans leur parcours.

Quant à la chute, elle est juste magistrale.

Ce roman est un coup de maître porté par une plume prodigieuse, à lire absolument.
 

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commentaires

K
Je n'ai jamais lu cette auteure, je croyais qu'elle écrivait du policier...
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T
Ce roman-là est classé dans les policiers mais il n’y a rien de policier dedans

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