Après un feel good book, « La chambre des merveilles » de Julien SANDREL, un roman familial, « Fugitive parce que reine » de Violaine HUISMAN et deux romans historiques, « Le théâtre de Slávek » de Anne DELAFLOTTE MEHDEVI et « Un océan deux mers trois continents » de Wilfried N’SONDE, le dernier en lice pour le #Prixdulivre France bleu_Page des libraires est un roman d’espionnage, éclectique comme sélection, non ?
Kisanga d’Emmanuel GRAND a récemment été couronné par le Prix Landerneau, c’est dans ce cadre que je l’avais repéré alors, quand France bleu et Page des libraires l’ont présenté dans la sélection, j’avoue avoir frissonné de plaisir et ce n’était que le début !
Je vous dis quelques mots de l'histoire :
Olivier et Isabelle sont mariés, ils ont une fille de 4 ans, Sarah. Lui travaille chez Carmin, ils assistent aux funérailles d’un de ses collègues, Michel assassiné en Afrique en mission. Olivier apprend qu’une proposition lui sera faite le lendemain, l’entreprise compte effectivement l’envoyer au Congo avec trois autres salariés choisis sur le volet. Il faut dire que l’enjeu est stratégique, les Français sont en train de signer un accord inespéré avec les Chinois pour l’exploitation des mines de cuivre de Kisanga. Ce partenariat aurait pu être la poule aux œufs d’or mais c’était sans compter sur les réminiscences du passé, une vielle affaire d’Etat jamais résolue et des soupçons pesant toujours sur Carmin. Raphaël Da Costa, journaliste grillé il y a une quinzaine d’années, a une revanche à prendre et souhaite en découdre définitivement avec cette histoire. Il reprend ses valises et s’envole vers l’Afrique quand d’autres flairent la démarche et décident de préserver le secret à tout prix. Un militaire à la retraite, Pierre Lauziere qui a fait partie du 13ème Régiment de Dragons parachutistes des forces spéciales françaises pendant l’opération Serval au Mali en 2013, est recruté pour assurer les intérêts de l'Etat. Le destin de ces trois hommes va soudainement se trouver lié, à la vie, à la mort !
Entre fiction et réalité, mon cœur balance. Il fait dire qu’au moment où je termine ce roman, les médias relatent très largement la mise en examen de Vincent BOLLORÉ, inculpé dans une affaire de concession portuaire en Guinée et au Togo. Il est parfois troublant de voir ô combien les deux peuvent parfois se faire écho...
Bien sûr, comme le dit l’auteur, toute ressemblance est fortuite. Il n’en demeure pas moins que l’Afrique a toujours suscité les convoitises des investisseurs étrangers. Son sous-sol regorge de minerais très prisés notamment pour assouvir les besoins des pays occidentaux en nouvelles technologies.
Le Congo était maudit par les trésors de ses entrailles, un cancer qui prospérait dans son ventre et qui rendait les hommes fous à lier, violeurs, assassins, qui de son voisin, qui de sa sœur, qui de son frère. P. 332
À bien y regarder, Wilfried N’SONDÉ ET Emmanuel GRAND mènent le même combat et dénoncent tous les deux l’ignominie des hommes hantés par les affres du pouvoir, de l’argent, entraînant des malversations, de la corruption et des comportements que rien ne saurait excuser. Entre le XVIIème et le XXIème siècles, rien n’a malheureusement changé, à l’exception peut-être du K qui a laissé sa place au C, mais les terres restent les mêmes et les puissants continuent d’y instrumentaliser les plus faibles.
Le roman d’Emmanuel GRAND est original dans son approche des pays émergents. Il décide de faire la part belle à la Chine qui a jeté son dévolu sur l’Afrique. Toute la scène géopolitique se trouve de fait déstabilisée, menaçant de faire rompre l’édifice d’un savant équilibre entre l’hexagone et les nouvelles puissances mondiales.
Ce thriller est un véritable page-turner, de ceux que vous ouvrez et que vous ne lâchez que lorsque vous l’avez terminé. Le suspense est addictif. Les trois hommes ont, chacun dans leur rôle, trois mois pour arriver à leur fin. Dès lors, le compte à rebours est lancé, tous les coups sont permis, y compris une course effrénée à travers la jungle katangaise, faisant resurgir à l’occasion de vieilles rancunes ethniques.
Je ne lis pas régulièrement ce type de romans, c'est un tort je l'avoue. Chaque fois, je tombe dans le piège de l’intrigue et prends plaisir à spéculer sur son dénouement.
Je remercie infiniment les libraires pour ce très bon choix. La plume est fluide, un brin romancée, très agréable à lire, elle vous met sous tension permanente, du début jusqu’à la fin.
Bravo à Emmanuel GRAND aussi pour cette prouesse littéraire parfaitement maîtrisée.
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