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2019-05-31T06:00:00+02:00

Quand un écrivain se livre... Portrait d'Alain JASPARD

Publié par Tlivres
Quand un écrivain se livre... Portrait d'Alain JASPARD

Alain JASPARD, il y a quelques mois, je ne vous connaissais pas encore. J'avais bien entendu parler de vous lors de la remise du Prix France Bleu_Page des Libraires, c'est même là que j'avais reçu en cadeau votre premier roman, "Pleurer des rivières". Et puis, le temps a passé... jusqu'à l'organisation des Journées nationales du livre et du vin de Saumur avec l'équipe de la Librairie Richer.

Journées nationales du Livre et du Vin de Saumur 2019

Journées nationales du Livre et du Vin de Saumur 2019

Bénévole, je me suis retrouvée à vos côtés le temps d'un salon, l'occasion de faire connaissance. Il y a eu la dédicace et puis, le moment venu de vous lire. Avec "Pleurer des rivières", vous nous offrez un joli panel d'émotions et de quoi passer quelques heures à méditer sur notre société contemporaine. Et comme je suis d'un naturel curieux, je voudrais bien vous connaître un peu plus encore, Monsieur JASPARD !

Parlez-nous de ce livre : "Pleurer des rivières". Qu'est-ce qui a fait qu'un jour vous vous soyez mis à écrire ?

Lorsque j’ai cessé de réaliser – et donc d’en écrire les scénarios – des films pour la jeunesse, ce que j’ai fait pendant quinze ans avec beaucoup de plaisir, j’ai préféré me mettre en danger (et ce n’est pas un vain mot), en écrivant un roman, le premier donc, plutôt que de jouir d’une retraite modérément méritée en m’inscrivant, par exemple, dans un club de pétanque pour seniors, ou en militant dans une association de défense de la marmotte alpine grise, autre exemple.

Cela dit, écrire est une bizarrerie : j’écris dans la souffrance, alors que tous les écrivains que je fréquente depuis neuf mois travaillent dans la joie et la sérénité. Je dois être un peu maso. Je m’explique : rien que de regarder mon ordi, j’ai envie d’aller me promener, il me regarde d’un air mauvais, je crois qu’il me déteste, qu’il déteste mes petites histoires ! Parano, moi ??? Et ce que j’écris dans l’enthousiasme à un moment donné devient le lendemain à la relecture un texte imbuvable. La grande auteure Colette disait en substance : « Les rameaux d’or écrits dans la nuit ne sont plus au réveil que des brindilles desséchées ». Ajoutons-y le célèbre vertige de la page blanche, voilà donc la douleur.

Mais je pense que cette douleur me convient, comme celle que l’on inflige aux rossignols  pour qu’ils chantent leurs plus belles mélodies. Bon, physiquement je ne ressemble pas vraiment à un rossignol et mes mélodies ne sont pas toujours mélodieuses, car comme on le sait, j’aime l’écriture brutale, crue, parlée. Bien loin du rossignol !

Salon Livre en vigne en Bourgogne au Clos Vougeot

Salon Livre en vigne en Bourgogne au Clos Vougeot

Dans quel environnement écrivez-vous ? Vous qui plantez à merveille les décors, que voyez-vous de votre bureau ? de votre fenêtre ? 

J’écris n’importe où mais jamais cloîtré dans un bureau. J’aime écrire dans le bruit, la présence des gens ne me dérange pas, j’affectionne particulièrement les... cuisines ! L’ordi entre les asperges (pendant la saison), les gâteaux au chocolat, le bruit du lave-vaisselle, ça me convient. De temps à autre, je pelote le mollet de la cuisinière, ça m’encourage et elle ne déteste pas. Et j’aime les odeurs et les couleurs des cuisines.

Dans ce roman, vous mettez en lumière une communauté, celle des gens du voyage. Pourquoi ? Quel rapport entretenez-vous avec elle ?

Pendant une dizaine d’année, j’ai été réalisateur de documentaires en Afrique, plus particulièrement dans le sahel africain. Parce que j’aime les nomades : les Peuls, les Imraguen, les Touareg (y’a pas de faute : un Targui, des Touareg, sans S), les Bozos, les Pygmées. Je les aime parce qu’ils sont détestés, mal compris. Les « Gens du voyage », horrible expression, n’échappent pas à l’opprobre, souvent méritée, ne soyons pas angéliques. Mais ! Mais... ils sont libres comme un torrent (j’ai écrit ça, libre comme l’air est très banal, comme le vent irait assez bien aussi). Nous aimons tous cette liberté et je pense que si les nomades sont détestés, c’est par pure jalousie, nous sommes jaloux de cette liberté d’aller où le vent les pousse, un peu comme les marins d’antan. Pour ce livre, je les ai beaucoup fréquentés, parce que j’aime écrire sur ce que je connais. J’ai aussi fréquenté les tribunaux de comparution immédiate où j’étais dessinateur (pas très bon !) puisque ce livre parle de la justice, c’en est même le sujet principal.

Quand un écrivain se livre... Portrait d'Alain JASPARD

Ce roman, il nous parle de morale, il évoque des questions d'éthique. Il y a ce pacte signé entre des hommes, des femmes, un consentement mutuel qui pourrait bien montrer ô combien il est fragile face à la loi. Qu'est-ce que ce roman révèle de notre société d'aujourd'hui ?

Il s’agit d’enfants, d’une femme qui ne parvient pas à en faire alors qu’elle ne pense qu’à ça et d’une autre qui en a déjà sept et qui attend le huitième. Techniquement je n’ai pas eu de problèmes, la femme qui partage ma vie depuis .... - bon, très longtemps ! - est médecin, spécialisée dans la fabrication compliquée de bébés. J’avais la documentation à portée de main (quand ce n'était pas son mollet, voir passage sur la cuisine !).  Il s’agit plus sérieusement d’une réflexion sur le droit à l’enfant, quel qu’en soit le prix à payer, quel qu’en soit le risque, surtout auprès de la justice, celle des hommes, l’autre je ne la connais pas. Et la question est : doit-on obéir aveuglément à la loi, même si la loi est plus cruelle que le délit ? Question que les hommes se posent depuis la nuit des temps, pour simplifier, devait-on par exemple obéir à la loi qui déportait les Juifs ? Bien évidemment non. Immense débat dans lequel s’inscrit ce livre, à un niveau bien entendu plus modeste.

Il y a comme un fil rouge dans votre livre, celui de la maternité. Avec les deux personnages de femmes, Mériem, la tzigane, et Séverine, la bourgeoise, vous confrontez les voies naturelles à celles instrumentalisées, vous explorez aussi deux univers sociaux et leurs pratiques. Quel message avez-vous envie de nous transmettre ? 

L’écriture de ce roman m’a demandé une réflexion très ardue. Non pour ce qui concerne l’histoire. Des histoires disait Céline (j’adore l’écrivain, je n’aime pas l’homme, air connu), des histoires donc, il y en a plein les commissariats, plein les hôpitaux, plein les rues. Ce qui a été le plus difficile mais aussi le plus excitant, c’était la manière de raconter mon histoire, de faire parler les acteurs (j’emploie le mot à dessein) avec leur propre sociologie, les Gitans d’un côté, les bobos de l’autre. Et ça, je dois le reconnaître, j’y ai pris un plaisir extrême.

Ecrire présente finalement quelques plaisirs !!! Revenons à vous maintenant. Qu'est-ce que ce roman a changé dans votre vie ?

Ensuite, une fois édité, ce livre m’a fait rencontrer la grande et belle famille des auteurs, éditeurs, critiques (d’une grande tendresse à mon égard, mille mercis à vous les critiques), les blogueurs (idem, un million de mercis), les géniaux libraires que nous avons la chance d’avoir dans ce pays, y compris ceux des  chaînes type FNAC, Cultura, Leclerc... qui connaissent bien leur boulot, le métier le plus utile du monde avec le médecin et l’instituteur (bon l’agriculteur est bien utile aussi !). 

Maintenant, place à l’avenir. Maintenant que j'ai découvert votre plume, que je l'ai particulièrement appréciée, la fin m'a, juste, bluffée, je ne résiste pas à vous poser la question que tous vos lecteurs ont sur les lèvres, y aura-t-il un deuxième roman ? Si oui, pouvez-vous nous en parler ? nous en dire quelques mots... même en avant-première, nous sommes juste entre nous !

Aïe ! Je suis sollicité avec beaucoup de délicatesse par mon éditrice chérie, Héloïse d’Ormesson, pour écrire un second roman. Mon ordi me regarde d’un air ironique, « pauvre auteur que tu es, me dit-il, tu vas pas te marrer, tu vas souffrir ». Bon, j’accepte, je vais souffrir. Mon premier roman – pourtant assez drôle parce que je considère que l’humour dans la littérature est absolument indispensable, jouant le rôle d’ amplificateur de la tragédie, encore un débat intéressant. -, finit d’une façon assez grave, surtout pour les femmes. Si je devais y mettre un sous-titre, ce serait : « Fracassée », au féminin, ça ne vous a pas échappé. Si je parviens à écrire un deuxième livre, il aura le même sous-titre, Fracassée. Il s’agira donc encore d’une femme dans la tourmente, cette fois de la guerre. Je ne peux pas en dire beaucoup plus pour l’instant, je pédale dans la choucroute !

Nancy, un moment de partage entre amis avec Dany LAFERRIERE et Alain MABANCKOU

Nancy, un moment de partage entre amis avec Dany LAFERRIERE et Alain MABANCKOU

Enfin, pour que la boucle soit bouclée, et parce que cet entretien s'inscrit dans un partenariat avec Page des libraires  (j'en profite pour faire un petit clin d'oeil à Françoise Gaucher de la Librairie Le Coin des livres de Davézieux)  dites-nous ce que la revue et/ou le réseau vous ont apporté en tant qu'écrivain.

Quoi qu’il arrive, je ne remercierai jamais assez les revues et les réseaux qui se montrent si chaleureux et pros à l’égard des auteurs en général et du mien en particulier, c’est par eux que le travail des écrivains passe, qu’ils aillent un jour au paradis, ils le méritent.

Quand un écrivain se livre... Portrait d'Alain JASPARD

Mais « le paradis, c’est ici », non ? Jean-Louis Aubert le chantait... et moi, j’y crois !

Merci infiniment Alain pour ce moment de complicité, j’y ai retrouvé votre humour, votre coquinerie aussi ! Au plaisir de vous retrouver, sur un salon ou ailleurs...

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2019-05-28T06:00:00+02:00

La partition de Diane BRASSEUR

Publié par Tlivres
La partition de Diane BRASSEUR

Allary éditions


Je sors de cette lecture totalement habitée par le personnage de Bruno K, un homme d’un peu plus de 50 ans. Sur le chemin de l’Université de Genève où il enseigne la littérature à des étudiants qui l’adulent, il se laisse porter par les pas d’une femme. Brutalement, il s’écroule, il est victime d’un arrêt cardiaque et en meurt. Dans sa poche, la police découvre deux billets pour un spectacle du violoniste Alexakis le soir même au Victoria Hall. La boucle aurait pu être bouclée mais le destin en a décidé autrement.

Avec ce roman, Diane BRASSEUR déroule le fil de l’existence de Bruno K à travers un personnage flamboyant, excessif aussi, celui de Koula, sa mère, d’origine grecque, mariée quand elle était toute jeune à un Suisse qui, la bague au doigt, l’emmène dans son pays pour vivre au plus près de sa famille à lui. Seulement, lui est très attiré par les femmes, pour le meilleur comme pour le pire. Sa vie va être rythmée par des tragédies, des déménagements. L’écrivaine nous fait voyager entre la Grèce, la Suisse, l’Égypte...

Ce roman, c’est une affaire de femmes, de filiation, de malédiction aussi un peu comme si elles avaient à affronter bien malgré elle le fardeau des hommes. Elles sont trompées par leur mari, vivent des grossesses difficiles, sont confrontées au deuil. Il y a la maternité et ce qu’elle apporte de différent dans une relation mère-fille :


Depuis qu’elle était enceinte elle ne pouvait pas dire qu’elle aimait sa mère davantage, mais elle la comprenait mieux et la respectait infiniment. P. 57

Ce roman, c’est aussi une histoire d’hommes, des fils, des frères, des maris, des amants. Avec le personnage de Bruno K, Diane BRASSEUR nous livre un roman d’apprentissage avec comme fil rouge, la musique.

J’ai adoré la découverte des partitions par Bruno K et les coïncidences qui ont mis sur son chemin des instruments, donnant à voir son talent. Lui aussi va grandir, il va se confronter aux difficultés de la vie, lutter contre la maladie, chercher sa voie à côté de celle de son frère, Alexakis, un violoniste virtuose, pour devenir quelqu’un...


Il m’a semblé que l’essentiel n’était pas de devenir un « grand homme », un homme célèbre, tout cela est si relatif. J’ai préféré essayer de devenir un homme complet. Un homme simplement. P. 305

La discipline artistique est explorée tout en beauté sous la plume de Diane BRASSEUR mais ce que j’ai le plus aimé, c’est cette forme narrative régulièrement ponctuée de correspondances. La distance prise entre Bruno K et sa mère est compensée par des relations étroites par la voie de l’écriture, une forme singulière d’expression des sentiments :


Les lettres suscitent une intimité propice aux confessions. P. 137

Ce livre, je l’ai beaucoup aimé pour ses personnages éminemment romanesques, j’ai pris un immense plaisir à me faufiler le temps d’une lecture dans la toile familiale tissée autour de Kalou, une mère exigeante qui a pris l'habitude de se réaliser à travers la réussite de son fils, Bruno K, un poids lourd à porter.

Je ne connaissais pas Diane BRASSEUR, c’est maintenant chose faite. Je remercie Netgalley de m’avoir mise sur la voie, ce roman fait partie du challenge lancé jusqu’au 6 juin prochain. C’est la deuxième lecture après « L’âme du violon » de Marie CHARVET

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2019-05-27T20:52:50+02:00

Visage de Raphaëlle FABRIS-MATUSZEWSKI

Publié par Tlivres
Visage de Raphaëlle FABRIS-MATUSZEWSKI

Il y a des oeuvres qui captent votre regard, vous fascinent, vous subjuguent.

C'est exactement ce que j'ai ressenti hier lorsque j'ai visité l'exposition organisée par Amnesty International à l'Abbaye du Ronceray en faveur de la liberté.

J'aime beaucoup ce type d'exposition qui mixe les genres et là, je suis tombée face au "Visage" de Raphaëlle FABRIS-MATUSZEWSKI, une révélation.

Réalisée en terre cuite, elle représente le visage d'un homme que l'on imagine d'Afrique ou d'ailleurs, les traits sont fins, quant au regard, absolument incroyable, nous pourrions croire que les yeux nous fixent, ils sont d'une expression tout à fait remarquable. J'aime beaucoup aussi le mariage des deux couleurs de terre pour réussir à représenter la chevelure et la barbe.

Ce "Visage" est ma #lundioeuvredart, je la garderai longtemps en mémoire et suis ravie d'avoir découvert une nouvelle artiste, une femme qui a un talent fou, et quand j'aime, je partage !

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2019-05-26T09:20:48+02:00

50ème sélection du Prix des Lectrices Elle

Publié par Tlivres
50ème sélection du Prix des Lectrices Elle

Comme vous le savez, j'ai eu l'immense chance cette année de participer au 50ème Prix des Lectrices Elle, 50, tient donc, on dirait que les choses sont bien faites !!!

Cette aventure ne se conjugue pas encore au passé, nous n'avons pas franchi la ligne d'arrivée et les lauréats ne sont pas proclamés, alors, nous pouvons toutes y aller de nos pronostics...

Certaines se sont déjà lâchées, elles ont dévoilé leur trio de tête comme Moonpalaace avec qui je partage un coup de coeur !

Pour moi, les trois romans qui m'ont le plus transportée, exaltée, surprise, envoûtée, enivrée... ce sont :

 

Dans la catégorie des romans

Asta de Jon Kalman STEFANSSON chez Grasset

"Sous la plume de Jón Kalman STEFANSSON, la tragédie devient une fatalité, emportant tout sur son passage, y compris la raison. 

L’exercice littéraire est époustouflant dans la maîtrise des scénarios. Ce roman fait un peu plus de 490 pages, j'aurais aimé qu'il en fasse 100, 200, 300 de plus, totalement habitée que j'ai été par le personnage d'Ásta.

A saluer également la qualité de la traduction proposée par Eric BOURY, juste prodigieuse !"

 

Dans la catégorie des documents

L'empreinte d'Alexandria MARZANO-LESNEVICH chez Sonatine Editions

"L’écrivaine pose un regard d’une extrême lucidité sur les pulsions sexuelles des hommes et dénonce, avec l’affaire du petit Jeremy, un système américain incapable d’y pallier. Les recherches réalisées sont impressionnantes, rien n’est laissé au hasard, l’auteure a étudié scrupuleusement toutes les archives pour retracer l’ensemble des débats. 
 
Ce récit de vie est particulièrement intéressant et éclairant pour les mots posés. Il a l’extrême mérite aussi de se construire autour de deux situations  distinctes pourtant tellement ressemblantes. 
 
La plume est précise, dense, la traduction est de très bonne qualité. Les répétitions n’y feront rien, j’ai été fascinée par le destin d’Alexandria MARZANO-LESNEVICH et souhaite qu’elle puisse poursuivre dans la voie de l’écriture, elle à un talent fou."

 

Dans la catégorie des policiers

Rituels d'Ellison COOPER chez Cherche midi

"Ce premier roman est haletant de bout en bout. Je me suis surprise à tourner les pages frénétiquement pour connaître dans les toutes dernières l'auteur de faits absolument terrifiants. La chute est magistrale.

Les stratagèmes complexes mis en oeuvre relèvent d'un terrible psychopathe monté de toutes pièces par une écrivaine spécialiste notamment des neurosciences et des religions.

J’ai été captivée par ces domaines d’expertise qu’Ellison COOPER rend tout à fait accessibles. J'adore ce registre qui mise sur l'urgence à agir dans un contexte de menace permanent.

La plume est fluide, l’intrigue totalement maîtrisée."

 

Et maintenant, que les meilleurs gagnent, parce que beaucoup d'autres ont été très bons aussi, j'ai passé de merveilleux moments de lecture avec :

Le Chant des revenants de Jesmyn WARD

Vigile de Hyam ZAYTOUN

Une maison parmi les arbres de Julia GLASS

Ma dévotion de Julia KERNINON

La vraie vie de Adeline DIEUDONNE

Asta de Jon Kalman STEFANSSON

La neuvième heure de Alice McDERMOTT

La douce indifférence du monde de Peter STAMM

Un gentleman à Moscou de Amor TOWLES

Maîtres et esclaves de Paul GREVEILLAC

La loi de la mer de Davide ENIA
 
Même les monstres de Thierry ILLOUZ
 
Tu t'appelais Maria SCHNEIDER de Vanessa SCHNEIDER
 
Les inséparables de Dominique MISSIKA
 
Pirate N° 7 de Elise ARFI
 
Suzanne de Frédéric POMMIER
 

Sirènes de Joseph KNOX

Anatomie d'un scandale de Sarah VAUGHAN

Rituels d'Ellison COOPER

Dura Lex de Bruce DESILVA
 
Rivière tremblante de Andrée A. MICHAUD
 
La disparition d'Adèle Bedeau de Graeme MACRAE BURNET
 
Présumée disparue de Susie STEINER

 

et je tiens dès à présent à remercier toute l'équipe de Elle qui a fait un travail extraordinaire pour notre plus grand plaisir.

Nous allons toutes nous retrouver le 3 juin prochain pour fêter comme il se doit les 50èmes lauréats du Prix des Lectrices Elle, alors, pour nous y retrouver, je vous donne quelques indices dans la photo. A très vite maintenant !

 

 

 

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2019-05-20T06:00:00+02:00

La danseuse jaune d'Alexis MERODACK-JEANEAU

Publié par Tlivres
La danseuse jaune d'Alexis MERODACK-JEANEAU

Alexis MERODACK-JEANEAU s'est éteint il y a tout juste 100 ans. Le Musée des Beaux Arts d'Angers lui consacre aujourd'hui une exposition temporaire intitulée "En quête de modernité". 

La danseuse jaune d'Alexis MERODACK-JEANEAU

Elle sera visible jusqu'en novembre 2019, l'occasion peut-être pour vous de programmer une visite de la ville et ses richesses.

La toile que je préfère est celle de "La danseuse jaune" réalisée en 1912, c'est aujourd'hui ma #lundioeuvredart. Elle représente le corps d'une femme, en mouvement, dans une posture sensuelle, gracieuse et délicate. Le visage en avant, la femme est révélée dans une position d'ouverture, propice aux relations avec les autres. Le jaune vient encore renforcer le caractère amical et fraternel du personnage. En référence au soleil, cette couleur invite à la fête, à la joie, au plaisir.

Toutes les peintures d'Alexis MERODACK-JEANEAU n'ont pas été, comme "La danseuse jaune" un hymne à la vie, loin de là. L'homme est né en 1873, les premiers tableaux peints par l'artiste l'étaient dans des couleurs ternes, profondément sombres, un brin soutenu par quelques traces de blanc, à l'image de ce portrait 

La danseuse jaune d'Alexis MERODACK-JEANEAU

extrait d'une série "Les femmes en blanc". L'âme humaine semble profondément triste.

C'est au début du XXème siècle que le peintre change radicalement, il évolue entre les mouvements picturaux du fauvisme et de l'expressionnisme, il abandonne les paysages pour se focaliser sur des personnages, pour partie inspirés du thème du cirque qui offre des perspectives plus chatoyantes.

C'est aussi à cette période de la vie que l'homme commence à militer en faveur des artistes. Il est à l'initiative de l'Union internationale des Beaux-Arts et des Lettres. Il organise des salons, il fait connaissance notamment avec Vassily KANDINSKY, un autre peintre que j'affectionne tout particulièrement.

Il crée enfin une revue d'art : "Les tendances nouvelles" et se plaît à promouvoir les différentes tendances artistiques, loin de lui la volonté de s'inscrire dans un mouvement unique.

Cette exposition, j'y suis entrée par la petite porte, j'y ai aussi embrassé l'intégralité d'une oeuvre remarquable d'un homme qui ne demande qu'à être connu. Vous savez maintenant ce qu'il vous reste à faire !

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2019-05-18T08:14:19+02:00

Que les blés sont beaux d'Alain YVARS

Publié par Tlivres
Que les blés sont beaux d'Alain YVARS

Ce roman, c'est un cadeau du ciel, une invitation de l'auteur, un jour, via le blog, à lire son livre. Un très beau cadeau, merci infiniment, d'autant qu'après le roman de Saïdeh PAKRAVAN, j'avais envie de quelque chose qui m'émerveille, défi relevé !

La première de couverture vous l'annonce, vous allez vivre "L'ultime voyage de Vincent VAN GOGH". Je connaissais grosses mailles la vie du peintre, je le savais notamment meurtri, mélancolique, affecté par une maladie mentale. Là, vous découvrez un artiste enchanté par la nature, ravi de se délecter à peindre, admirer les gens, en faire des modèles...

Vincent VAN GOGH est d'origine hollandaise, il est né à Groot-Zundert en 1853. A l'âge de 16 ans, il est marchand d’art, il exerce ce métier pendant 7 années qui vont lui permettre d'accéder à une formidable connaissance des arts, formation largement soutenue par la complicité qu'il entretient avec son frère, Théo. C'est à 37 ans qu'il rentre d'un séjour en hôpital psychiatrique, il était accueilli à l’Asile de Saint-Rémy de Provence. Il s'arrête à Paris pour profiter des plaisirs en famille. Il apprécie tout particulièrement la compagnie de sa belle-soeur, elle aussi passionnée d'art. Elle donne naissance à un petit garçon, Vincent Willem, le même prénom comme un fil tendu entre oncle et neveu. Vincent VAN GOGH est passionné par le travail de Camille PISSARO, présenté comme l'un des pères fondateurs de l'impressionnisme. Il peint la campagne, des paysages ruraux, des scènes paysanes découvertes lors de ses passages à Auvers-sur-Oise. Il ouvre la voie à Vincent VAN GOGH qui s'installe dans cette bourgade. Il y rencontre le Docteur Gachet, connu pour sa peinture sous le nom de Paul VAN RYSSEL. Les deux hommes vont entretenir une relation paisible, sereine, propice à la création. Vincent VAN GOGH se délecte des plaisirs naturels, des scènes de la vie, joyeuses, lumineuses, il est à cette époque extrêmement prolifique comme porté par un immense élan que seule la passion peut procurer.

Dans ce roman, Alain YVARS nous fait partager deux mois de la vie de l'artiste, deux mois qui correspondent à une période euphorique du peintre, deux mois qui laissent à penser qu'il est en bonne voie de guérison.

J'ai adoré cheminer avec le peintre dans l'approche de son art. J'ai profondément aimé ses réflexions personnelles et son apprentissage de la discipline, sa capacité à apprendre et à faire sa place dans un univers en pleine mutation, à choisir ses amis. 


J’ai compris qu’il ne fallait pas dessiner une main, mais un geste, pas une tête parfaitement exacte mais l’expression profonde qui s’en dégage, comme celle d’un bêcheur reniflant le vent quand il se redresse fatigué... P. 90/91

Vincent VAN GOGH était un passionné, il vibrait pour son art, il savait parfaitement reconnaître là où il retirait le plus de plaisir.


Le portrait moderne est ce qui me passionne le plus dans mon métier, celui qui permet de révéler l’âme du modèle avant son apparence. P. 93

Pourtant, Vincent VAN GOGH n'était pas un être orgueilleux, il voulait être un "peintre populaire", il voulait que ses tableaux soient accrochés dans les cuisines, les pièces de vie des maisons. Il aimait profondément les gens, il savait leur porter un regard attentionné, celui d'un peintre admiratif. Chaque détail représentait pour lui une matière à explorer.


L’usure du temps, le vent et le soleil sur les habits de travail, leur donnent les nuances les plus délicates. P. 176

Ce roman est une ode à la création artistique, servie par une très belle plume, profondément humaine, délicate et tendre. Alain YVARS nous brosse le portrait d'un peintre porté par la passion, enivré par la beauté de la nature, il nous fait, le temps d'une lecture, partager des moments d'immense bonheur. Il est le fruit de longues années de recherches, Alain YVARS s'est notamment largement inspiré des correspondances de l'artiste, des archives de la Bibliothèque Nationale de France. Que j'aime découvrir l'art par la voie de la littérature, et je crois que je ne suis pas la seule ! J'ai par ailleurs désormais une furieuse envie d'aller découvrir ce village du Val d'Oise où le peintre y a vécu des heures heureuses avant le destin tragique qu'on lui connaît.

La démarche d'Alain YVARS est à souligner à plus d'un titre, mais s'il en était un à retenir, je saluerai le fait de reverser l'intégralité des bénéfices du roman "Que les blés sont beaux" au profit de l'Association Rêves qui permet à des enfants malades d'aller jusqu'au bout de leurs rêves. N'est-ce pas là un très beau geste que... sans aucun doute, Vincent VAN GOGH aurait apprécié à sa juste valeur.
 

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2019-05-17T06:00:00+02:00

Cent voyages de Saïdeh PAKRAVAN

Publié par Tlivres
Cent voyages de Saïdeh PAKRAVAN

Belfond collection Pointillés

C'est avec ce roman que j'ai découvert la plume de Saïdeh PAKRAVAN, que l'écrivaine soit remerciée de ce très beau cadeau qu'elle m'a fait.

Si je m'étais contentée de lire le titre et fiée au bandeau qui orne le bas du livre, je me serai imaginée partir survoler les cinq continents,  visiter le monde, la réalité est toute autre, Saïdeh PAKRAVAN nous invite à un voyage intérieur.

Garance est une jeune femme que tout différencie de sa soeur Coralie. Ses parents sont divorcés. Le bac en poche, sa mère décide que c'est Garance qui ira vivre trois années à Téhéran chez son père. Quand elle rentre à Paris, elle assiste malheureusement au décès de son grand-père maternel. La relation amoureuse établie avec Henri devient une bouffée d'air dans sa vie triste, elle devient mère et porte à sa fille, Myriam,  un amour incommensurable. Une nouvelle vie commence pour elle, pour le meilleur, et pour le pire.

J'ai lu ce roman le coeur serré, l'histoire de Garance m'a profondément troublée dans ce qu'elle revêt d'épreuves dramatiques, son destin est cruel. Alors qu'elle pourrait jouir des plaisirs de la vie, son existence est marquée par des tribulations toutes plus catastrophiques les unes que les autres. 


Finalement, les nouveaux rivages où nous abordons ne sont jamais faits que de sable sous nos pieds. P. 55

Pour ne pas déflorer l'histoire de cette femme meurtrie, je ne vous en dévoilerai pas les objets mais juste les émotions qui la torturent. Ce roman déroule lentement le fil et met des mots sur le cheminement d'une femme en quête de résilience. Comment mettre du baume sur ses plaies ? 

Avec l'itinéraire de Garance, ce sont toutes les formes de l'amour qui sont explorées, celui porté à un mari, celui voué à un enfant, celui fraternel aussi qui peut tisser des liens, ou pas, entre les enfants d'une même famille. Saïdeh PAKRAVAN met le doigt subtilement sur tout ce panel de relations entretenues, bon gré mal gré. Après l'amour démesuré vécu avec Myriam, il ne pouvait y avoir que des déceptions. Le propos est mélancolique, foncièrement sombre. C'est un portrait de femme désenchanté que l'écrivaine nous livre. 

Saïdeh PAKRAVAN aborde de la même manière le sujet du deuil. La vie de Garance est régulièrement affectée par des décès d'êtres chers. 


Cette blessure ne cicatrisera jamais, le sang en continuera à couler en moi tant que je vivrai [...]. P.144

Là aussi, et même s'il n'y a pas de hiérarchie dans la douleur, l'écrivaine porte, à travers un filtre de lecture à plusieurs dimensions, un éclairage sur ce que l'on peut vivre au quotidien, mieux comprendre aussi.

Dans un contexte amoureux, familial, amical particulièrement douloureux, Saïdeh PAKRAVAN donne à voir un être profondément déçu par la nature humaine qui va chercher sa voie. Garance ne s'attache pas. Au fil de son existence, elle s'est faite une philosophie de vie, totalement épurée, aseptisée, tant du point de vue matériel qu'humain. Et puis, Garance se réserve le droit, ponctuellement, quand il n'est vraiment plus possible pour elle d'affronter, de couper définitivement avec tout ce qui pourrait l'ancrer, elle prend alors un billet d'avion et s'envole pour d'autres lieux. 


Les voyages sont le seul antidote réel au lent poison que je distille dans ma propre vie, à cette attitude indifférente, sinon franchement négative, que je me donne [...]. P. 122

Quand elle revient, elle s'installe dans un nouveau logement pour repartir, toujours, à zéro. J'ai été particulièrement sensible à son arrivée en Iran alors qu'elle était une jeune adulte. Né de parents étrangers, Garance cherche dans le territoire celui qui lui est sien. Saïdeh PAKRAVAN évoque ainsi le rapport des enfants d'immigrés à leurs origines, à ces terres dans lesquelles ils espèrent s'enraciner mais la réalité est plus complexe qu'il n'en paraît.


Me rappelant que j’étais dans « mon » pays comme si seul celui de mon père pouvait être ainsi qualifié et que celui de ma mère ne comptait pas [...]. P. 127

Ce roman je l'ai lu comme une fiction et pourtant, s'il n'est autobiographique, j'image tout à fait que Saïdeh PAKRAVAN ait mis dans ce livre beaucoup plus que le fruit de sa seule imagination. Si tel est le cas, souhaitons qu'elle puisse un jour trouver le repos, une paix intérieure qui lui apporte le plaisir d'EXISTER. Peut-être est-ce déjà le cas avec l'écriture...

La plume est belle, ciselée, psychologiquement élaborée. Après cette invitation dans l'univers de l'intime, j'aimerais beaucoup partir à la découverte de son roman "Azadi", lauréat du Prix de la Closerie des Lilas 2015. Vous l'avez lu ?

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2019-05-16T06:40:04+02:00

Pleurer des rivières d'Alain JASPARD

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Pleurer des rivières d'Alain JASPARD

Ma #citationdujeudi est extraite d'un premier roman qui m'a beaucoup touchée : "Pleurer des rivières" d'Alain JASPARD. 

Publié en 2018, j'étais passée à côté, il aura fallu un événement, les Journées nationales du livre et du vin de Saumur en partenariat avec la Librairie Richer pour qu'il se retrouve la priorité du moment.

"Pleurer des rivières" est un roman court mais très dense qui fait se croiser deux communautés, celle des tziganes et celle de bourgeois parisiens. Il explore judicieusement le rapport de tous à la maternité, le ton est profondément humain et généreux, la plume tendre et délicate, la narration rythmée et haletante, le propos rieur, grinçant aussi ! Je vous le conseille absolument.

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2019-05-14T16:40:00+02:00

Les oeuvres de Romain GARY éditées dans la "Bibliothèque de la Pléiade"

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Les oeuvres de Romain GARY éditées dans la "Bibliothèque de la Pléiade"

Parce qu'il y a des nouvelles dont on se félicite, assurément, l'édition des oeuvres de Romain GARY dans la très belle collection "Bibliothèque de la Pléiade" en fait partie.

Quelle joie de découvrir que le talent de ce grand homme de lettres soit reconnu à sa juste valeur !

Romain GARY, c'est assurément "La promesse de l'aube", un immense coup de coeur me concernant. Je l'avais lue au lycée, voilà quelques années maintenant, j'ai pris un immense plaisir à la relire.

J'irai bien un peu plus loin dans la découverte de cette plume, vous avez d'autres oeuvres à me conseiller ?

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2019-05-12T07:49:59+02:00

L'âme du violon de Marie CHARVET

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L'âme du violon de Marie CHARVET

Grasset
 

Le bal du printemps littéraire 2019 se poursuit avec "L'âme du violon" de Marie CHARVET, un premier roman qui fait la place belle à la musique. Allez, en piste !

Nous sommes en 1600, en Italie du Nord, à Brescia, Giuseppe travaille chez son maître luthier, Giovanni Maggini. La notoriété des artisans d'art est telle qu'ils réalisent régulièrement des travaux pour le comte de Cagliostro. La dernière commande porte sur un violon d'exception avec lequel la fille du comte jouera lors de la prochaine réception. La musique, c'est aussi la passion de Lazlo, un jeune tzigane de Nogent-sur-Marne. Nous sommes dans les années 1930, le garçon est élevé par son oncle Nathanaël. Il a pris son neveu sous son aile, sa mère a été exclue de la communauté par avoir flirté avec un gadgo, un père que l'enfant n'a jamais vu. C'est certain, il est différent des autres, il n'a pas le commerce dans la peau, mais la musique, oui, un véritable don. La différence, c'est aussi à cela qu'est confrontée Lucie qui occupe une chambre de bonne dans le quartier des Batignolles à Paris. Depuis toute petite, elle s'est distinguée de sa soeur, Iris, bien comme il faut. Lucie, elle, a besoin de liberté, de sortir du cadre. Quand elle a fait le choix d'apprendre les Beaux-Arts, c'était la goutte d'eau dans un vase déjà bien rempli, ses parents ont coupé les ponts. De sa famille, elle ne voit plus que sa grand-mère, Marguerite. Elle habite Lyon, elle a plus de quatre-vingt-dix ans aujourd'hui mais elle fut la première femme française à exercer le métier de musicienne. L'art, elle connaît. Grand-mère et petite-fille entretiennent une relation de complicité extraordinaire. Quant à Charles, il partage sa vie entre Paris et New-York. Elève surdoué, il s'est orienté vers Polytechnique. Chef d'entreprise, il investit et se prépare à l'entrée en bourse de sa société. Dans sa vie, il avait tout ou presque. C'est à 20 ans qu'il s'est retrouvé un peu par hasard à entrer dans l'église de Saint-Eustache de Paris au moment d'un concert, il s'est découvert une passion pour la musique. Perfectionniste, il s'est constitué une culture hors pair sur le sujet et découvre un nouveau terrain de jeu, financier.

Dans "L'âme du violon", vous l'aurez compris, Marie CHARVET nous brosse une galerie de portraits, des hommes, des femmes, tous passionnés par la musique. L'écrivaine nous fait voyager à travers les siècles, depuis la création d'instruments rares largement convoités encore aujourd'hui pour la qualité du son qu'ils continuent de produire. J'ai été émerveillée par les descriptions de l'atelier de Giuseppe, le travail artisanal, l'amour du matériau, noble, le bois. Il m'a fait prendre conscience de la puissance de l'objet.


Le choix du bois d’un instrument est capital. Il détermine la clarté, la rondeur et la couleur du son. P. 163

Le voyage se poursuit entre les communautés, entre les microcosmes de la société, d'hier et d'aujourd'hui. L'écrivaine s'attache à appréhender la musique dans les milieux sociaux, tous vibrant pour les maisons raisons, artistiques. La musique a ce pouvoir de transporter les humains, de les faire vibrer, et si nous étions finalement égaux ? Je me suis laissée bercer par les notes de musique de Lazlo


Les doigts de Lazlo se lancent à l’assaut de la mélodie, ils sautillent,
tricotent, entremêlent d’invisibles fils, montent et descendent, dans un chemin fait de trilles, de vibratos, d’appoggiatures, de glissandos. P. 23

Il y a cette énergie grisante et envoûtante dans les morceaux joués par le jeune homme des gens du voyage. Il a trouvé dans la musique un mode d'expression à la mesure de son être.


Alors ces notes d’amour remplacent les mots qu’il ne parvient pas toujours à trouver pour dire ses sentiments. P. 65

L'art est transcendant dans ce qu'il exige des hommes, du corps et de l'esprit, cette espèce d'abandon, cette sorte de lâcher-prise, qui font que l'être se donne tout entier à la discipline. En musique comme en peinture, mais là commence une toute autre histoire !

"L'âme du violon" est d'une construction implacable. Au rythme des premières notes, vous ferez vos premiers pas sur la piste de danse, prendrez vos repères au bras de l'écrivaine et vous laisserez bientôt transporter par le charme de la plume. Vous en sortirez enivré.

C'est un premier roman réussi, d'une très grande beauté dans la qualité de l'écriture et d'une remarquable ingéniosité dans le mélange des genres. Mesdames les fées des 68 Premières fois, voilà un berceau sur lequel peut-être se pencher...

 Cette lecture concourt à la 

 

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2019-05-11T06:46:03+02:00

Le cahier de recettes de Jacky DURAND

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Le cahier de recettes de Jacky DURAND

Stock

Il y a des plumes exquises que l'on aime savourer. Et quand elles se prêtent au registre culinaire, elles deviennent succulentes. Vous pouvez commencer à saliver, le dernier roman de Jacky DURAND est une formidable gourmandise, je vais essayer de vous mettre en appétit !


"Le cahier de recettes" vous fait entrer de plein fouet dans le monde hospitalier, Monsieur Henri y vit ses derniers jours. Avec son décès et cette dernière page du cuisinier du Relais fleuri qui se tourne,  mille et un souvenirs affluent dans l'esprit de Julien, son fils, le narrateur. Il nous dévoile le livre tout entier de la vie d'un homme passionné de cuisine, un taiseux qui a dédié toute son existence à offrir à ses clients des mets de qualité, empreints de tradition. Sa cuisine, son antre, il la partageait avec son ami Lulu, un homme avec qui il a combattu en Algérie. Tous deux entretiennent une relation inébranlable, unis à la vie à la mort, par autant de blessures qui font des hommes des êtres meurtris par la douleur.  Sa cuisine, ses recettes, il s'est toujours attaché à les conserver dans sa mémoire comme autant de bijoux que l'on sauverait du regard. Pourtant, Julien se souvient d'un cahier dans lequel sa mère s'évertuait à recopier quelques bribes obtenues à la volée d'un homme qui préférait le silence aux grands discours. Mais où est-il ? Et si "Le cahier de recettes" était la clé de secrets trop bien gardés...

Après "Marguerite" découvert avec les 68 Premières fois, Jacky DURAND nous revient avec un roman qui porte tous les stigmates de ses chroniques culinaires diffusées sur France Culture et rédigées pour Libération. Il nous fait entrer par la petite porte d'un restaurant et découvrir la gastronomie française, il nous fait saliver de bonheur, le temps d'une lecture, je m'y suis crûe, les sens en éveil ! Quant à Julien, qui a pris la succession de son père, il le fait revivre à travers ses plats. Que son père le veuille ou non, il est partout présent ! 


Tu es mes mains quand je dépose les ris de veau dans le beurre ; mes yeux quand je les fais dorer ; mon intuition quand je dose le vermouth et le bouillon. P. 207

Outre la formidable preuve d'amour d'un fils à son père, ce roman d'apprentissage met un métier sous les projecteurs, celui de cuisinier, il décrit le professionnalisme, les compétences requises, les heures passées aussi. Il évoque avec l'orientation scolaire de Julien le déterminisme social, la transmission, consciente ou inconsciente, des gestes, des postures de travail, des réflexes, d'un environnement familial tout entier qui s'infusent lentement dans le corps et l'âme. Que les parents le souhaitent ou non, l'éducation qu'ils donnent à leurs enfants est imprégniée de ce qui constitue leur quotidien. Il y a bien des tentatives, parfois, de prendre de la distance avec ses origines mais le fossé est là, béant. 


Habilement, Jacky DURAND fait se côtoyer l'art culinaire et la littérature avec cette mère, professeure de lettres au lycée. Petit garçon, Julien s'invitait dans la chambre des parents où les livres envahissaient l'espace. Cette chambre était aussi le lieu de partage du repas familial, la tendresse y était reine. Pas très étonnant qu'en guise de plan B, Julien prenne la voie de sa mère et choisisse les lettres pour des études supérieures. L'envie était là et pourtant :


J’aime les mots mais ils m’échappent comme les truites que je pêchais à la main avec Gaby. P. 183

Avec la disparition du père, l'écrivain évoque le deuil, l'absence, le vide, cette envie irrépressible aussi de savoir, de découvrir l'autre visage de l'être aimé, la nécessité de connaître son histoire, celle tue :


Je ne sais pas si tu es un autre ou si je te connais enfin. P. 209

Comme dans "Marguerite", Jacky DURAND invite la guerre à la table familiale. Si Julien ne l'a pas connue, son père l'a vécue. Elle est bien présente en lui, totalement verrouillée. Il y a des revenants qui parlent, assurent la mémoire pour ne jamais avoir à le revivre, et puis les autres qui font de leurs plaies un secret. Mais si les mots ne franchissent pas leurs lèvres, leurs corps, eux, se chargent d'exprimer la souffrance physique et les fantômes qui continuent de les hanter. L'approche est suggestive. Avec  le personnage du père de Julien, elle est profondément émouvante.


J'ai beaucoup aimé aussi dans ce roman les vacances estivales de Julien passées chez Gaby, le frère de Lulu, et Maria, sa femme. Tous deux lui offrent un foyer apaisant, une maison dans une prairie pour se ressourcer. Le narrateur y découvre un autre mode de vie, une autre façon de s'aimer.    


"Le cahier de recettes" est un roman empreint de générosité, de bienveillance et de bonté. La plume est délicate, poétique... 


Je découvre que les sentiments peuvent s’échapper sur la pointe des pieds sans vous fracasser le cœur. P. 159

Le menu est alléchant, il ne me reste plus qu'à vous souhaiter : "Bon appétit". 

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2019-05-10T06:00:00+02:00

Pleurer des rivières d'Alain JASPARD

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Pleurer des rivières d'Alain JASPARD

Éditions Héloïse d’Ormesson


Ce roman a toute une histoire. D’abord, je souhaiterais remercier Page des libraires pour ce cadeau offert en juin 2018 lors du lancement de la rentrée littéraire. J’y étais en tant que jurée du Prix France Bleu Page des libraires qui a couronné Wilfried N’SONDE pour son formidable « Un océan, deux mers, trois continents ».

Je suis rentrée chez moi, ai posé « Pleurer des rivières » d’Alain JASPARD sur une étagère de ma bibliothèque et l’ai laissé là se faire doubler par tout un tas d’autres livres. Il aurait pu y rester encore et encore s’il n’y avait eu cette très belle rencontre avec l’auteur, s’il vous plaît, aux Journées nationales du livre et du vin de Saumur.

Je mesure aujourd’hui la beauté de ce premier roman passé à côté des 68 Premières fois...

Sammy est un gitan, il a un accident avec son camion, le moteur est mort, il ne peut pas payer son remplacement, un camion est pourtant l’outil de travail des hommes des gens du voyage. Il lui faut cet argent. Il se rapproche de son ami Franck et lui propose un coup. Il a eu connaissance du tournage d’un film dans les environs. Des kilomètres de câbles en cuivre y sont déroulés, la pause de midi leur permettra largement de s’approvisionner en matière première qu’ils revendront à la sauvette. Mais voilà, tout ne se passe pas comme prévu, ils se retrouvent coffrés par la police. Franck et Sammy sont défendus par Julien, un avocat commis d’office pour des comparutions immédiates, un lien va se tisser pour le meilleur... et le pire.

En réalité, tout ne commence pas tout à fait comme ça mais avec une scène d’amour. Les premières pages décrivent dans une plume érotique la première aventure entre Franck et Mériem, elle n’a alors que 15 ans. Le temps d’une mission évangélique, ils ponctueront leurs journées d’ébats sexuels. A la fin, elle découvre sa grossesse, le mariage est rapidement organisé. Un premier enfant naît de cette union, et puis un deuxième, un troisième... le huitième suscitera bien des convoitises.

Dans un scénario habile et audacieux, Alain JASPARD confronte deux univers sociaux pour évoquer le sujet de la maternité et de ses représentations. Dans les communautés des gens du voyage et des bourgeois, les enfants ne font pas partie du même projet familial. Il y a ceux qui les accueillent comme des cadeaux de Dieu...


[…] Dieu leur a donné sept enfants, ça fait beaucoup mais quand un enfant arrive on va pas le renvoyer à l'expéditeur. P. 13

et les autres qui veulent tout maîtriser notamment en termes de temporalité. Chez ceux chez qui ils arrivent trop tôt et viendraient chahuter un parcours professionnel ambitieux, on recourt à l’IVG, quitte à procéder à une fécondation in vitro quand l’heure choisie sera venue de procréer et que la nature peinera à reprendre ses droits. Bien sûr, certains pourraient voir des fils un peu gros avec des stéréotypes largement véhiculés, moi, je me suis glissée dans la caravane de Franck et Mériem, dans l’appartement chic aussi de Julien et Séverine, ironie du sort, elle est illustratrice jeunesse et est l’auteure d’une série lancée il y a 6 ans et dédiée aux « mal-connus mal aimés ». Je me suis laissée imprégner par les personnalités de chacun et me suis fondue dans le décor planté par Alain JASPARD. Ce roman est écrit par un réalisateur de cinéma, vous ne serez donc pas surpris(e) par toutes ces descriptions qui contribuent à nourrir l’imaginaire... Le 7ème art, il connaît, il a notamment adapté Tom-Tom et Nana de Jacqueline COHEN et Bernadette DESPRÉS.

Le propos est profondément humain, généreux, bienveillant. 

Ce roman court (190 pages), parfaitement construit, a aussi le mérite de poser des questions de société. Il aborde le sujet de la PMA, évoque la morale et l’éthique. Un consentement entre des hommes suffirait-il à contrer la loi ? Alain JASPARD ne porte pas de jugement, il nous invite à méditer sur l’évolution de la société, la place des femmes, le rapport au corps, celui-là même qui porte l’empreinte de nos blessures, et plus généralement, de nos vies. 

La narration est fluide, rythmée, haletante, la plume tendre et délicate, poétique aussi...


Le royaume des larmes est mystérieux, n’y entre pas qui veut. P. 83

le propos rieur mais attention, il peut être aussi parfois grinçant. Dans « Pleurer des rivières », méfiez vous de l’eau qui dort ! La chute est magistrale, j’ai refermé ce roman le cœur gros. 

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